Vers des stocks de sécurité européens pour lutter contre les pénuries de médicaments

Plusieurs pays de l’UE sont en train de mettre en place des stocks de sécurité pour lutter contre les pénuries de médicaments, d’une durée allant de 3 à 10 mois. Ces stocks de sécurité seraient par nature « tournants », répondant en grande partie aux problématiques potentielles de durée de conservation. Une coordination européenne est plus que jamais nécessaire pour vaincre la résistance de l’industrie pharmaceutique et faire en sorte que ces stocks soient proportionnels à la durée médiane des pénuries, en constante augmentation*. 

L’obligation de constituer des stocks de sécurité jusqu’à 4 mois des besoins en médicaments, introduite par la loi de financement de la sécurité sociale du 24 décembre 2019, a suscité une forte résistance de l’industrie pharmaceutique, qui s’est traduite par le ralentissement du processus d’adoption du décret d’application, qui n’est toujours pas publié 10 mois après l’adoption de la loi, et la réduction de la durée des stocks de sécurité à 2 mois pour les médicaments d’intérêt thérapeutique majeur (MITM) et 1 mois pour les autres médicaments.

Pourtant, un nombre croissant de pays européens a, ou envisage d’avoir, recours aux stocks de sécurité pour lutter contre les pénuries de médicaments. C’est le cas de la Finlande, qui impose depuis 2009 des stocks de sécurité pour une liste de 1457 médicaments, d’une durée de 3 à 10 mois selon les classes thérapeutiques. Aux Pays-Bas, le ministre de la santé a proposé au parlement l’instauration d’un stock de sécurité correspondant à 5 mois des besoins en médicaments, dont 4 à la charge des producteurs pharmaceutiques et 1 à la charge des distributeurs en gros. Le Danemark a quant à lui considérablement augmenté les exigences de stocks pesant sur les distributeurs en gros pendant la pandémie – de 3 à 4 semaines à 3 à 9 mois – et s’interroge aujourd’hui sur l’opportunité de créer des stocks de sécurité permanents.

Le rapport du Parlement européen sur les pénuries de médicaments, adopté le 17 septembre dernier, prend acte de l’insuffisance des stocks de MITM en Europe et rappelle que la production de médicaments en flux tendus accroit les risques de pénuries.  Il appelle dès lors à la mise en place de plans de prévention et de gestion des pénuries harmonisés, incluant des mesures de stockage stratégique pour garantir un approvisionnement adéquat en MITM, et invite la Commission européenne à coordonner les initiatives nationales visant à créer des stocks de sécurité.

Affordable Medicines Europe, qui représente les opérateurs d’importation parallèle de médicaments, propose l’inscription dans la législation de l’UE d’une obligation de stocks de sécurité jusqu’à 4 mois pour les MITM, assortie de sanctions financières en cas d’infraction***.

La mise en place d’une action conjointe sur la prévention des pénuries, proposée par France Assos Santé et reprise par le Parlement européen dans son rapport, pourrait faciliter l’échange de bonnes pratiques en matière de stocks entre les États membres et permettre d’atteindre, à moyen terme, cet objectif que nous partageons.

* La durée médiane des ruptures d’approvisionnement en officine en France est passée de 90 jours en septembre 2019 à près de 250 jours (soit plus de 8 mois) en septembre 2020 :  Ordre National des Pharmaciens
** Fimea (the finnish medicines agency) : Mandatory reserve supplies
*** Access to medecin : Solving the problem of medecine shortages

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