Pénuries de médicaments : charte de bonnes pratiques et nécessité d’une régulation du marché

Les acteurs de la chaîne du médicament ont pris le 22 novembre 2023 neuf engagements dans une charte de bonnes pratiques pour un accès équitable des patients aux médicaments faisant l’objet de tensions d’approvisionnement.

Cette charte vise exclusivement à répondre à une inégale répartition des stocks de médicaments sur le territoire. Elle ne vise pas à répondre à l’ensemble des causes des pénuries.

Une charte -non opposable et non coercitive- peut sembler dérisoire devant l’explosion de médicaments non disponibles et les conséquences désastreuses pour l’ensemble des personnes malades.

Les notions d’éthique et de solidarité invoquées dans la charte peuvent faire sourire quand on sait que les obligations légales d’approvisionnement « approprié et continu du marché national de manière à couvrir les besoins des patients en France » sont couramment transgressées par les exploitants des médicaments.

Certains engagements peuvent paraitre insuffisants quand on sait que certains industriels délaissent la production de médicaments anciens et essentiels pour investir dans des médicaments nouveaux beaucoup plus lucratifs.

Néanmoins France Assos Santé considère que ce document engage l’ensemble des acteurs. Nous serons vigilants quant à son application rapide car les personnes malades ne peuvent plus attendre !

Par ailleurs, ces travaux montrent une nouvelle fois la nécessité de renforcer la régulation et le contrôle du marché.

C’est pourquoi nous souhaitons vivement que les mesures visant à renforcer les pouvoirs de l’Agence du médicament et des produits de santé (ANSM) soient maintenues dans le plan de financement de la sécurité sociale 2024, en cours d’examen parlementaire.

Loi, application de la loi et contrôle : la situation appelle, une nouvelle fois, à renforcer les moyens de l’ANSM pour faire face à une augmentation exponentielle de ses missions concernant les pénuries des produits de santé.

Les 9 engagements de la charte

Les industriels, les dépositaires, les grossistes-répartiteurs, les pharmaciens d’officine et les pharmaciens hospitaliers s’engagent, collectivement, à :

  1. S’informer mutuellement de manière transparente et régulière des disponibilités des médicaments   toutes les étapes de la chaîne pharmaceutique, via les outils partagés et au travers de la mobilisation de réunions avec l’ensemble des acteurs de la chaîne sous l’égide de l’ANSM.
  2. Entretenir un dialogue constant avec l’ANSM afin de mobiliser de manière adéquate les stocks disponibles des industriels pour assurer une couverture continue et équitable des besoins de la population.
  3. Prioriser les flux de distribution des industriels au profit des grossistes-répartiteurs pour une répartition équitable aux pharmacies du territoire national des stocks disponibles.
  4. Appliquer une démarche éthique systématique excluant tout argument commercial au détriment de la santé publique.
  5. Assurer par les grossistes-répartiteurs une répartition équitable des stocks dans les pharmacies sur l’ensemble du territoire national, en tenant compte des besoins habituels de chaque pharmacie.
  6. Garantir un niveau de commande des pharmacies n’excédant pas de façon déraisonnable le besoin de leur patientèle.
  7. Privilégier les commandes des pharmacies auprès de leur grossiste-répartiteur principal (bannir le recours à des outils de commandes automatisés et systématiques par les pharmacies) et l’approvisionnement par les grossistes-répartiteurs de  leurs clients principaux.
  8. Intégrer la situation des établissements de santé dans la détermination des mesures visant à garantir une couverture optimale des besoins de la population.
  9. Diffuser ces engagements à l’ensemble de la profession par tout moyen.

Les acteurs de la chaîne du médicament s’engagent à appliquer sans délai cette charte en matière de lutte contre les tensions d’approvisionnement de médicament.

Cette charte ne présume pas de toute autre mesure qui pourrait être engagée par les autorités publiques.

Nous appelons de nos vœux d’autres mesures législatives et réglementaires qui devraient être engagées par les pouvoirs publics, notamment la constitution de au moins 4 mois de stocks de sécurité pour les médicaments d’intérêt thérapeutique majeur.

Cette mesure permettrait de mieux prévenir les pénuries, limiter les risques, les interruptions de traitements et les effets indésirables, causés par des changements de médicaments en urgence.

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