La notice d’information des médicaments subira-t-elle le même sort que les journaux et sera-t-elle bientôt remplacée par un document 100 % électronique ?
C’est ce que l’on peut craindre en lisant l’article 63 de la directive pharmaceutique qui vient de faire l’objet d’un accord informel au sein du Parlement européen, et qui laisse aux Etats membres la possibilité d’opter pour la seule e-notice, conformément à la proposition de la Commission européenne. Un projet pilote de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), qui devrait être lancé prochainement et qui vise à tester la dématérialisation des notices de médicaments via l’utilisation d’un QR Code, fait écho à cette initiative, au niveau national.
La notice est un document de référence principalement destiné aux patients. Elle comprend des informations essentielles pour la bonne utilisation du médicament : indications, contre-indications, effets indésirables, posologie, mode d’administration, etc. Le développement des notices dématérialisées, déjà disponibles en ligne – sur le site de l’Agence européenne du médicament ou la base de données publique des médicaments en France – complète utilement les notices papier et apporte des bénéfices incontestables pour les patients : plusieurs langues disponibles, possibilité de mise à jour rapide, etc.
Mais si la notice dématérialisée présente un intérêt certain, elle ne donne pas les mêmes garanties d’accessibilité que la notice papier. Préserver cette dernière permet notamment de prendre en compte la variété des publics et l’éloignement du numérique de certains groupes de population, à l’instar des personnes âgées ou des patients vivant dans des « zones blanches » ou ayant une couverture mobile et/ou un réseau internet de mauvaise qualité.
France Assos Santé demande aux parlementaires européens et aux autorités françaises de défendre la complémentarité de la notice dématérialisée par rapport à la version papier, en excluant tout remplacement à court ou moyen terme, autrement dit sans possibilité pour les États membres de choisir entre l’une ou l’autre option, ou pour la Commission européenne d’imposer la seule notice dématérialisée via des actes délégués.
La sécurité des patients et le bon usage du médicament doivent primer sur toute autre considération.
Par ailleurs, l’accès des patients à la notice dématérialisée, que ce soit via un QR Code, une recherche en ligne ou toute autre modalité, est susceptible de fournir des informations et données très sensibles sur l’état de santé des patients. Il est donc indispensable, outre le respect du RGPD et de la directive du 12 juillet 2002 sur la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques, que des mesures soient adoptées pour interdire tout traçage et/ou profilage des patients à des fins commerciales, ou même à des fins d’information personnalisée.
Il est en effet essentiel que les patients aient accès à une information sûre, complète et contrôlée par les autorités de santé, afin d’éviter tout risque de manipulation de cette information.
Le patient qui souhaitera avoir en sa possession une notice papier pourra la demander à son pharmacien d’officine au moment de récupérer son traitement. Il ne sera donc pas discriminé vis à vis d’un autre patient qui lui pourra bénéficier d’une e-notice obtenue par ses propres moyens. Le gaspillage des notices non lues fait parti des mesures correctives à entreprendre pour réduire notre empreinte carbone, pour l’avenir de notre planète, notre avenir, l’avenir de nos enfants.