Les différentes formes d’engagement des usagers dans les établissements de santé

En vingt ans, la démocratie en santé est devenue une réalité. Le soutien à l’engagement des usagers du système de santé dans les secteurs social, médico-social et sanitaire fait même l’objet d’une recommandation de la Haute Autorité de santé. Cet engagement recouvre aujourd’hui différentes formes. Et si c’était une opportunité ? Pour embrasser la complexité du sujet, France Assos Santé a pu favoriser l’émergence d’un espace travail national totalement inédit regroupant des chercheurs, patients partenaires, représentants des usagers, élus et membres d’associations. D’où il ressort que la mutualisation des approches ne peut être que profitable. Encore faut-il apprendre à se connaître et comprendre le rôle de chacun : c’est l’objet du document élaboré à l’issue de cette réflexion. Emparez-vous en ! En guise d’incipit, paroles de trois participantes.

Nolwenn Tourniaire est patiente partenaire (PP), elle occupe un poste à mi-temps de chargée de mission au sein de la CAPPS de Bretagne, une structure régionale d’appui à la Coordination pour l’Amélioration des Pratiques Professionnelles de santé. « J’accompagne des professionnels et des établissements de santé dans leurs projets de collaboration avec des usagers », précise-t-elle. La jeune femme côtoie quotidiennement des représentants des usagers (RU). A l’occasion de la mise en place d’un partenariat, elle les forme en même temps que les personnels soignants.

« Donner l’envie de se rencontrer »

De là à parler de coopération, on en est encore loin : « On incite les professionnels de santé à travailler en équipe pluridisciplinaire, mais pas à travailler avec des patients partenaires ou des RU. L’enjeu, aujourd’hui, pour l’amélioration de l’expérience patient, c’est justement d’avoir à la fois des RU qui pourront œuvrer à l’amélioration de la qualité des soins et à la promotion des droits (grâce notamment à leur rôle de représentation des intérêts de tous les usagers de l’établissement) et des PP qui ont l’expérience quotidienne de la vie avec un défi de santé. Or, souvent, RU comme PP ne se (re)connaissent pas au sein d’un même l’établissement. » Et pour étayer son propos, Nolwenn Tourniaire évoque le cas du Centre de lutte contre le cancer de Rennes, où un groupe de travail constitué de professionnels de santé, d’associations de patients, de patients partenaires et de représentants des usagers se réunit une fois par trimestre pour déterminer ensemble les projets qui sont ou non intéressants à travailler avec les RU et/ou PP et/ou associations. Et tout récemment, à la faveur de travaux, ce groupe s’est élargi à des patients partenaires. « En prévision d’une extension du centre, raconte-t-elle, deux patients qui ont été touchés par le cancer ont été conviés à penser l’agencement et l’accessibilité des locaux pour faciliter le parcours de soins des prochains usagers. »

Il n’y a pas de nécessité, ni même de pertinence à penser systématiquement ensemble des projets, reconnaît Nolwenn Tourniaire, mais le réflexe devrait davantage entrer dans les pratiques. « En cela, c’est important pour les uns et pour les autres de savoir qui fait quoi, condense-t-elle. L’idée du livret, c’est que les différents intervenants aient envie de se rencontrer pour parler de leur complémentarité. »

« On est plus forts et plus intelligents à plusieurs »

« Ce n’est pas inutile de rappeler les particularités de chacun pour éviter ou lever les éventuelles confusions », rebondit Olivia Gross, titulaire de la Chaire de recherche sur l’engagement des patients Université Sorbonne Paris Nord (Bobigny) et responsable de la licence sciences sanitaires et sociales (SSS), parcours médiateurs de santé-pairs (MSP) en santé mentale. Il n’est pas question de retirer à certains des rôles qu’ils sont tout à fait légitimes à endosser. « Il faut davantage d’acteurs, au contraire, pour qu’on y gagne, reprend Olivia Gross. De même, chaque rôle a ses limites. Le RU ne rentre pas dans les services, les associations de patients et les patients partenaires, si. L’idée, c’est donc d’aller vers plus de complémentarité. On est plus forts et plus intelligents à plusieurs. » Les patients partenaires ou les MSP sont, par nature, moins dans la contestation que les RU, parfois perçus comme des militants au contact rude, mais ça ne les discrédite pas pour autant ; travailler avec un patient partenaire n’absout pas de se rapprocher d’une association, etc.

« C’est comme dans une équipe de football, on a besoin de tous les acteurs, remarque Olivia Gross. Le but est de chercher, à travers tous ces liens possibles, à maximiser à la fois la démocratie en santé et la qualité des soins et des accompagnements. » De fait, les différents intervenants, qu’ils soient à l’intérieur, dans les services, ou à l’extérieur, dans les commissions des usagers, n’ont qu’un seul et unique dessein : améliorer la prise en soins des usagers du système de santé.

« Besoin d’un second souffle »  

Pour Marianick Lambert, du réseau Familles rurales et membre du bureau de France Assos Santé, « travailler ensemble, c’est l’avenir » : « On a besoin d’un second souffle, vingt ans après la loi Kouchner de mars 2002. Il faut s’ouvrir à des personnes qui ont des approches et des regards différents, et tendre vers une synergie nouvelle, par-delà les réticences ». La contestation, ou la revendication, aussi nécessaires soit-elle, n’est pas exclusive des autres modes d’action. Nulle rivalité, bien au contraire. « Il faut dépasser la méfiance pour comprendre l’enrichissement qu’on peut tirer de cette complémentarité des compétences », plaide-t-elle. Et d’ailleurs, souligne-t-elle, dans les associations de patients, nombreux et nombreuses sont ceux et celles qui ont la double casquette de RU et de patients pairs.

« Le temps est venu de décloisonner, conclut Marianick Lambert. Le travail de réflexion d’acteurs différents autour de la table a été un bon exercice, de ce point de vue. Il doit être un tremplin pour la suite. »

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