Formation « RU en avant ! » : invitation à l’immersion

Mission majeure de France Assos Santé, la formation, en particulier des représentants des usagers (RU). En 2023, plus de 270 sessions ont été organisées sur tout le territoire. Reine du catalogue, la formation « RU en avant ! », obligatoire pour les représentants nouvellement désignés. L’occasion aussi pour les autres, les aînés, d’une révision jamais complètement inutile. Retour de formation. C’était à Dunkerque, début juillet.    

Paperboard, écran mural, feutres de couleur, blocs-notes, fiches et guides pratiques posés sur les tables disposées en U…N’était la date, le 1er juillet, le rendez-vous dans une des salles de réunion du Musée maritime et portuaire de Dunkerque (Nord) – un ancien entrepôt de tabac – aurait presque des allures de rentrée des classes pour la poignée d’adultes appliqués à écrire leur prénom sur un porte-nom cartonné. A l’accueil, Maureen Pollart, en tant que chargée de mission et correspondante formation France Assos Santé Hauts-de-France, et Sabine Soileux, -représentante des usagers, médiatrice professionnelle et formatrice réseau France Assos Santé, « montée » de Bordeaux à Dunkerque pour la formation-phare du catalogue de France Assos Santé, la désormais obligatoire et bien-nommée « RU en avant ! », la formation généraliste pour tous les RU, quel que soit leur mandat. Ils sont cinq – sur les huit à s’être inscrits – à assister à cette session, sise Quai de la Citadelle. Présents, Danièle, Geneviève, Bertrand, Jean-Paul, et Yves, le benjamin, avec ses 61 ans. Tous sont représentants des usagers, la majorité depuis au moins quinze ans, voire plus, cumulant souvent plusieurs mandats. Bertrand, nommé fin 2022, est le seul à n’avoir pour ainsi dire aucune expérience.

Les participants se partagent entre trois associations : l’Union départementale des associations familiales (UDAF-59 et UDAF-62), l’Union nationale de familles et amis de personnes malades et/ou handicapées psychiques (Unafam) et l’Association des accidentés de la vie (FNATH). A l’exception d’Yves, RU à la CPAM de la côte d’opale (Pas-de-Calais), ses collègues siègent tous en commission des usagers (CDU) dans des établissements de soins – et dans bien d’autres instances territoriales et/ou régionales, sans oublier les sous-commissions potentiellement rattachées à certains de ces structures, à l’instar de la CRSA. Le tour de table achevé, et les nombreux acronymes entendus hypothétiquement rangés dans un coin de la mémoire (« Faut s’accrocher », admet Jean-Paul), il est temps de se saisir du Guide du représentant des usagers du système de santé, du Carnet de route du RU et de la fiche n° 2, sortie de la boîte à outils du RU, et intitulée Représenter les usagers : 12 points clés, trois documents produits par France Assos Santé, et avec lesquels les uns et les autres ne vont cesser de jongler, au gré des problématiques abordées et des exercices pratiques. En avant, c’est parti !

Passer du « je » au « nous »

Rebondissant sur une remarque d’Yves, le seul encore professionnellement actif, concernant les difficultés parfois rencontrées par des salariés pour exercer pleinement leur mandat de représentant des usagers et/ou se former, Sabine s’intéresse, pour commencer, à la légitimité des RU et à leurs raisons d’être. Cette entrée en matière nous vaut un coup de projecteur sur le code de santé publique, qui affirme noir sur blanc la légalité de la représentativité de tous les usagers, et même sur le code du travail, pour ce qui est du congé de représentation et éventuelles indemnités, ou encore sur la liste des multiples instances où les représentants des usagers sont habilités à siéger. Au gré des témoignages et interrogations qui fusent, Sabine gratifie la petite assemblée d’un aparté rapide sur la composition d’une CDU. « Une CDU sans RU n’est pas une commission des usagers », synthétise Danièle, à juste titre.

Chacun est ensuite sondé sur les raisons de son engagement. « Pour améliorer l’accessibilité aux soins pour tous », dixit Geneviève ; « Pour porter les problèmes des usagers », répond Yves ; « Pour comprendre comment cela fonctionne », ajoute Bertrand ; « Pour défendre les usagers », lance Jean-Paul ; « Pour réparer les dysfonctionnements », complète Danièle. Mis bout à bout, ces motifs dessinent à gros traits les cinq principes de la démocratie en santé. La mettre en œuvre exige quelques conditions inaliénables, précise Sabine. « Pour mener à bien ses missions, le RU doit prendre sa place singulière et imposer sa légitimité au sein du système de santé. Il doit aussi mettre à distance son histoire personnelle, pour représenter tous les usagers, et donc s’inscrire dans une approche transversale sur l’ensemble des sujets qu’il sera amené à porter à l’ordre du jour. » Ce qui revient à dire, résumé par Danièle, qu’il ne faut pas être borné : « En CDU, notre rôle est de coconstruire avec les autres RU, mais aussi la direction de l’établissement de soins. Nous ne sommes pas un alibi. Notre participation doit être active ». Ce qui n’empêche pas, s’il le faut, de « mettre la pression », défend Jean-Paul. La CDU, observe Sabine, peut émettre des avis, ce qui n’est pas le cas de toutes les instances de la représentation. Elle peut aussi s’auto-saisir, par-delà les 4 réunions au minimum prévues par an.

Dans tous les cas, et c’est probablement l’un des points cardinaux de cette formation initiale, le « je » doit céder la place au « nous ». Un « nous » qui sous-entend aussi de travailler en réseau, avec potentiellement des RU qui siègent dans d’autres comités ou commissions que la nôtre.  Maureen prend l’exemple des dysfonctionnements dans les transports sanitaires. « Face à des cas de covoiturage qui non seulement impactent les patients mais donnent lieu, en plus, à plusieurs remboursements pour un seul trajet, c’est important de le signaler à un collègue en CPAM ou de prendre contact avec les RU du CDAMUPS-TS), illustre-t-elle. L’annuaire des RU mis en place par France Assos Santé permet de trouver les contacts dont vous pouvez avoir besoin, à condition de vous inscrire à l’extranet, où vous trouverez aussi toute la documentation nécessaire pour vous soutenir dans votre mission. » De fait, pour la mener à bien, cela demande une bonne connaissance de l’organisation du système de santé, de son architecture et de ses multiples ramifications.

Valoriser la parole des usagers

Pour y voir clair, Sabine invite les participants à s’emparer de la fiche n° 5 de la boîte à outils du RU, et d’ouvrir Mon carnet de route de représentant(e) des usagers aux pages 10 et 11. Titre de la fiche, Les sigles les plus fréquemment utilisés, soit un abécédaire assez conséquent, que les « anciens » manient avec une agilité assez scotchante. Quant à la double page, elle recense, à gauche, les organisations nationales, régionales, territoriales et locales de la santé en démocratie (HAS, ARS, GHT, établissements de santé, etc.) et, à droite, les instances qui y sont hébergées, depuis la CDU jusqu’au conseil de surveillance des agences régionales de santé en passant par la commission départementale des soins psychiatriques (CDSP) ou encore la commission locale d’activité libérale (CLAL). Bref, un millefeuilles ou, selon la perception qu’on a du système sanitaire, une usine à gaz. Les participants, surtout celles et ceux qui évoluent déjà dans cette forêt d’acronymes, l’interpellent pour consolider ou rafraîchir leurs connaissances, ou s’interroger sur des points précis, touchant au mode de fonctionnement de telle ou telle instance. Sabine éclaire, remet en perspective, élargit, faisant du même coup la preuve que la réponse est souvent à chercher dans l’échange, entre RU, mais aussi avec les experts de France Assos Santé et la ligne Santé Info Droits pour tout sujet relevant du juridique ou du social.

Dernier temps fort de la formation, les travaux pratiques. Le groupe est scindée en 3 binômes. Chaque tandem, qui campe le rôle d’une paire de RU, doit démêler une situation problématique, soulevée par un patient ou un de ses proches. Objectif de l’exercice, établir une méthodologie d’action à partir de la plainte reçue. Fort utile, le carnet de RU, qui, quel que soit le contexte, établit la démarche de réflexion à mener : décrire (qui, quoi, où, quand, comment, quelles causes…), à la façon d’un PV ou d’une enquête, analyser ensemble la situation, identifier les enjeux les plus importants (personnels, éthiques, organisationnels…), pour aboutir à une demande concrète lors de la CDU. « Le RU porte la parole de l’usager. Il s’agit donc d’une restitution, pas d’une interprétation », indique Sabine. De l’importance, là encore, poursuit-elle, « d’écouter, de consulter et de confronter ». Et, bien sûr, de s’assurer du devenir de la parole de l’usager, afin qu’elle participe à faire évoluer les pratiques. « La grille d’analyse du représentant des usagers doit consister à articuler l’individuel et le collectif », conclut la formatrice. A l’image du relais de la flamme olympique qui, le mardi 2 juillet, s’est fait juste devant le Musée maritime et portuaire.

 

Quelles leçons au terme des 2 jours de formation ?

« On a toujours besoin d’une piqûre de rappel. J’ai une vision plus claire maintenant de l’organisation du système de santé. Et le fait d’être en présentiel favorise les échanges, on se sent moins seule. » Geneviève

« Ces deux jours m’ont permis de dépoussiérer des choses que j’avais oubliées, abandonnées dans une case dont j’avais égaré la clé. » Danièle

« Ces échanges vont me permettre de me remettre un peu plus dans les rails. » Jean-Paul

« A l’avenir, j’aurai très probablement davantage le réflexe de solliciter des RU qui siègent dans d’autres instances pour recueillir leur point de vue. » Yves

« Pour un novice comme moi, cette formation me paraît indispensable. J’avoue être à la fois surpris et effrayé par cette usine à gaz qu’est le système de santé. Est-ce qu’on arrive à obtenir des résultats… » Bertrand

« Parfois, le RU peut éprouver des difficultés, des doutes, une certaine tristesse à se retrouver bloqué ou stoppé dans une démarche, mais il ne faut pas perdre confiance, ni même l’espoir que son engagement apporte quelque chose. » Sabine

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