Pallidom : quand l’urgence palliative s’invite à domicile

Répondre en urgence à des situations de détresse vitale dans un cadre de soins palliatifs sans que le malade ne quitte son domicile : c’est l’enjeu de Pallidom. Cette initiative a été lancée il y a trois ans en région parisienne. Présentation.

1500… C’est le nombre de patients qui ont profité du dispositif Pallidom depuis sa création, le 6 septembre 2021. Cette structure de soins associe les particularités de trois filières médicales : les urgences, les soins palliatifs et l’hospitalisation à domicile. « Le point de départ de notre réflexion reposait sur le constat que nous transférions souvent des patients en situation palliative aux urgences alors que ce n’était pas leur place », se souvient le Dr Clément Leclaire, le médecin responsable de Pallidom.

Eviter l’hospitalisation

Transport pénible, attente interminable avant d’être pris en charge, errance avant d’être éventuellement hospitalisé dans un service en cas de besoin… Autant de situations éprouvantes, d’autant plus pour des personnes en fin de vie. Alors soignant à l’hospitalisation à domicile (HAD) de l’AP-HP, le Dr Leclaire convainc quelques confrères. « Nous nous sommes dit que la prise en charge des situations d’urgence pour ces patients ne relevait pas des structures de soins palliatifs, ni des services d’urgences. En revanche, il nous paraissait plus logique qu’une telle démarche s’appuie sur l’HAD et profite de son savoir-faire et de sa structure logistique. »

Aussitôt lancée, l’idée est mise en place. Son principe : apporter chez le patient en détresse vitale (à domicile ou en Ehpad), dans un délai très court, toutes les techniques des soins palliatifs pour répondre à un inconfort ou d’une instabilité nécessitant normalement une hospitalisation. « Les patients qui entrent dans ce dispositif ne sont pas préalablement inscrits dans une filière palliative ou dans une démarche de HAD », ajoute le Dr Leclaire.

Une équipe disponible à tout moment

Lorsqu’elle est alertée d’une situation par un médecin (Samu, médecin traitant, praticien en Ephad), l’équipe de Pallidom amorce dans la foulée une phase d’évaluation. « Notre ligne téléphonique dédiée aux soignants est accessible 24 h sur 24 et 7 jours sur 7. Il s’agit de répondre sans attendre et de façon collégiale à trois questions : Se trouve-t-on dans une situation palliative ? Un souhait de maintien à domicile a-t-il été formulé par le patient ou ses proches ? Est-on certain qu’il n’existe pas d’intérêt à hospitaliser la personne ? » La discussion prend en moyenne 45 minutes. Trois oui : l’équipe peut aussitôt passer à la phase d’intervention. Un binôme médecin/infirmier se rend alors sans attendre chez le malade, quelle que soit l’heure. « Nous arrivons avec un volumineux sac à dos rempli de matériel pour être en mesure de mettre en place tout type de soins », commente Hélène Mauri, infirmière au sein de l’équipe Pallidom.

Si les pathologies dont souffrent les malades sont variées, elles se répartissent en trois catégories regroupant environ le même nombre de personnes : les cancers en phase terminale, les maladies neurodégénératives évoluées et les insuffisances d’organes. Il s’agit donc, pour les intervenants, de pouvoir soulager aussi bien des difficultés respiratoires que des douleurs insupportables, des anxiétés, des fausses routes à répétition, etc. « Dans nos interventions, nous prodiguons des traitements palliatifs – c’est-à-dire de confort – et curatifs, précise le Dr Leclaire. Par exemple, si une personne respire mal, nous luis administrons de la morphine à titre symptomatique et mettons aussi en place des antibiotiques et de l’oxygène de façon curative. Il n’y a ainsi pas de perte de chance, même si tout se déroule à domicile. »

A l’issue de cette intervention initiale vient la phase de suivi, pendant laquelle un infirmier réalise des visites chez le patient, entre 7 h et 21 h, pour le réévaluer et adapter les traitements. « Nous nous rendons chez certains plusieurs fois par jour, chez d’autres toutes les 48 heures, note Hélène Mauri. Dans tous les cas, nous téléphonons chaque matin aux proches pour faire le point et pouvoir décider d’un déplacement si nécessaire. De leur côté, ils peuvent nous contacter à tout moment du jour ou de la nuit pour nous signaler une évolution – ce qui déclenche parfois une intervention -, nous demander un conseil ou simplement pour parler et trouver du réconfort. » On le devine aisément, la place des aidants est importante dans cette organisation. Les soignants estiment même que leur implication dans le projet de soins est primordiale. « La famille est plus présente au chevet du malade que nous, admet Hélène Mauri. Elle peut être amenée à lui administrer des thérapeutique, à nous prévenir en cas de dégradation… De fait, elle fait partie de l’équipe soignante. »

Passer le cap

Cette étape de suivi dure en générxal de trois à cinq jours, le temps de passer – ou pas – le cap des symptômes aigus qui ont justifié l’appel à Pallidom. « Dans 19 % des cas, les patients s’améliorent, rapporte le Dr Leclaire. Ils quittent alors le dispositif d’hospitalisation à domicile. Pour 8 % d’entre eux, la situation nécessite un transfert dans une unité de soins palliatifs. 1 % est transféré aux urgences. Enfin, 72 % des malades décèdent chez eux, entourés de leurs proches. »

Il faut aujourd’hui 8 médecins, 8 infirmiers et 2 aides-soignants pour faire fonctionner cette belle machinerie dans les quatre départements franciliens où elle intervient (75, 92, 93 et 94). De quoi lui permettre d’accueillir dix patients par jour. Une goutte d’eau en comparaison avec les 800 malades suivis quotidiennement par l’hospitalisation à domicile de l’AP-HP – dont 300 sont en soins palliatifs –, mais une ressource inestimable pour tous ceux qui, en dépit d’une situation très difficile peuvent demeurer chez eux dans leurs derniers instants.

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