Depuis 10 ans, l’AFA Crohn RCH France (pour vaincre la maladie de Crohn et la recto-colite hémorragique) propose un stage d’accompagnement en éducation thérapeutique pour les adolescents touchés par ces pathologies, afin de leur permettre de mieux vivre avec la maladie. Durant une semaine, une vingtaine de jeunes se retrouve à Dinard, face à la mer, dans le beau château de la Fondation Solacroup Hébert, avec qui l’AFA a noué un partenariat. C’est l’occasion pour les adolescents de mieux connaître leur maladie, d’échanger entre eux, de vaincre leurs peurs et de devenir plus autonomes.
Une maladie pleine de tabous et difficile à vivre quand on est adolescent
La maladie de Crohn et la recto-colite hémorragique sont des maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (ou MICI) qui se caractérisent par des poussées inflammatoires, avec comme symptômes principaux, des diarrhées, parfois sanglantes, et des douleurs abdominales, plus ou moins intenses et fréquentes. Ces symptômes, souvent tabous, entrainent en outre, la plupart du temps, une fatigue importante.
Le pic de diagnostic de ces maladies se situant entre 15 et 30 ans, l’AFA avait identifié qu’il était important de s’adresser tout particulièrement aux adolescents touchés par une MICI. L’adolescence est déjà en soi une période souvent difficile à traverser et ajouter au quotidien des jeunes une maladie qui leur impose d’affronter des situations parfois gênantes, de la douleur et de la fatigue mérite qu’on les soutienne tout particulièrement.
Déroulement du stage…
C’est Sylvie Monboussin, déléguée départementale à l’AFA qui coordonne cette semaine estivale, où les jeunes malades, tous entre 11 et 17 ans, viennent de toute la France. Ils peuvent être accompagnés, s’ils le souhaitent, d’un frère, d’une sœur, d’un copain ou une copine qui sera dans la même tranche d’âge que tous les participants. La majorité des participants cependant vient seule. « Leur niveau de connaissance et d’autonomie par rapport à la maladie est très variable. Certains laissent le soin à leurs parents de gérer la maladie, surtout chez les plus jeunes, jusqu’à 13 ans environ. Il y a des jeunes qui ne connaissent ainsi quasiment rien à leur pathologie quand d’autres, au contraire, ont reçu déjà énormément d’informations. » précise Sylvie.
Les matins sont réservés aux ateliers thérapeutiques et l’après-midi des animations sont organisées comme des jeux sur la plage, des visites touristiques, de l’accrobranche, du vélo, des sorties en catamaran, etc. Autant d’activités qui permettent aux jeunes de se dépasser, de vaincre leurs peurs, de gagner en confiance. L’équipe de Sylvie les accompagne avec bienveillance, ne les forçant à rien, mais leur proposant toujours de tester chaque expérience proposée pour en ressortir plus fort.
Les ateliers thérapeutiques
Les thèmes abordés durant les ateliers du matin tournent autour de la connaissance de la maladie, des traitements, de l’alimentation, des thérapies complémentaires, mais aussi de la gestion des émotions, de la confiance en soi, de la communication avec son entourage pour aborder la maladie. Les jeunes stagiaires découvrent des « trucs et astuces » pour gérer leur quotidien, et ils échangent aussi beaucoup entre eux sur leurs expériences. Les conseils fusent, comme celui, par exemple, de demander à l’école à avoir accès, quand ils veulent, aux toilettes de l’infirmerie ou à celles des professeurs. Ils se rassurent entre eux notamment concernant le délicat passage au lycée qui représente une étape de vie importante et stressante, où ils doivent mettre en place de nouvelles habitudes.
Une relaxologue intervient durant le stage pour les aider justement à gérer les périodes de stress. Tous les jours, les jeunes sont d’ailleurs invités à participer une petite séance de méditation ou de relaxation. Cela leur permet d’apprendre à gérer le stress aussi bien quand il s’agit de supporter la douleur que de passer un examen ! L’idée est qu’ils repartent avec une boîte à outils pour mieux affronter les situations difficiles que leur imposent la maladie.
Oui, mais qu’est-ce qu’on mange durant ce stage ?
Durant la semaine, l’alimentation est un sujet souvent abordé, d’autant qu’elle peut avoir un effet sur les symptômes de la maladie. L’équipe encadrante essaye de travailler sur la composition des repas, notamment du petit-déjeuner, pour le faire varier et sortir du classique « brioche, chocolat chaud, Nutella ». Les boissons font aussi l’objet d’une attention particulière puisque les jeunes stagiaires ne boivent que de l’eau pendant les repas afin d’éviter une prise trop systématique de soda qui est limitée à un verre au moment du goûter. Ce n’est pas une semaine de rééquilibrage alimentaire mais tout au long du séjour, l’équipe propose une prise de conscience autour de l’alimentation. Les jeunes savent déjà, dans tous les cas, que l’alimentation a un impact sur les symptômes de leur maladie et certains ont bien intégré qu’ils payent systématiquement le lendemain, les « excès » de la veille. Malheureusement pour eux, un banal repas au fast-food peut représenter un « excès » pour ces jeunes patients. Dans ces maladies, il n’y a pas de cause à effet scientifiquement prouvée concernant tel ou tel aliment mais d’un malade à l’autre, ils ont appris, à leurs dépens, que certains aliments ne leur conviennent pas et peuvent provoquer des crises.
Un bilan épanouissant
Le cadeau de Sylvie est de voir combien ces jeunes sont métamorphosés à l’heure de retourner chez eux. « Entre le moment où ils arrivent, souvent timides, voire inquiets, et le moment où ils repartent, il s’est vraiment passé quelque chose. Ils ont gagné en confiance, sont plus épanouis, se sont fait des amis, se sentent moins seuls face à la maladie. Il arrive que certains reviennent d’une année sur l’autre, pour le plaisir de retrouver leurs amis et pour continuer à apprendre et à mieux gérer leur maladie, d’autant que c’est un âge où de nombreux changements interviennent au fur et à mesure où l’on grandit et où il faut sans arrêt s’adapter », conclut Sylvie.
Témoignage de Floriane, 18 ans, souffrant de recto-colite hémorragique depuis 2010
« Je vais au stage chaque année depuis mes 12 ans et cette année, je suis venue également participer mais en tant qu’animatrice ! La première fois, mes parents m’ont un peu forcé à y aller mais on apprend tant de choses des autres pour mieux vivre avec cette pathologie que j’ai fini par y revenir chaque année. Cela m’a permis en outre de me sentir moins seule face à cette maladie, de relativiser en voyant que chacun a ses propres difficultés et d’apprendre les astuces des autres jeunes pour mieux faire face à certaines situations. Au fur et à mesure des années, on apporte nous-mêmes notre propre expérience aux plus jeunes et aux nouveaux. Ce qui m’a beaucoup plu également, c’est de pouvoir découvrir les médecines complémentaires durant les stages, comme la sophrologie ou la relaxation. Chaque année on teste de nouvelles thérapies alternatives adaptées à nos besoins.
En dehors du stage, nous restons en lien avec un certain nombre d’autres jeunes et l’AFA nous apporte également un soutien tout au long de l’année. C’est un peu comme une famille que j’ai finalement envie de retrouver chaque année, au point que cette année j’ai voulu passer mon BAFA et devenir à mon tour animatrice durant le stage. C’est ma façon de remercier l’AFA pour ce qu’elle m’a apporté. Sans les stages, je ne sais pas trop comment j’aurais réussi à gérer ces dernières années avec ma maladie. Au fur et à mesure, je le vis de plus en plus sereinement. Le fait aussi d’en apprendre durant le stage, sur les avancées concernant la recherche par exemple, me permet de tenir bon moralement. Aujourd’hui la maladie ne m’empêche pas de vivre mes envies, j’ai juste appris à m’adapter selon les situations. »
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