C’est quoi le burn out parental ?

Alors que le tabou sur le burn out professionnel tombe, un autre sort de l’ombre, plus timidement, car il touche un aspect de la vie très sensible : celui de la parentalité. 5% des parents seraient pourtant en « burn out parental ». 

Bien sûr, la plupart des parents se sentent fatigués ou dépassés dans leur rôle de parent à un moment ou un autre, mais ainsi que l’explique Elise Lecornet et Corinne Melot dans leur livre « Le Burn out parental : 100 questions/réponses », sorti il y a quelques semaines, il y a bel et bien des symptômes spécifiques qui permettent de poser un diagnostic sur ce syndrome.

Dans leur livre, Elise Lecornet et Corinne Melot, respectivement psychologue et sophrologue, expliquent que 3 aspects importants définissent le burn out parental, qui peuvent s’installer insidieusement, les uns après les autres :

  • Un épuisement profond, physique et émotionnel, qui n’est pas ou peu soulagé par un repos.
  • Une distanciation progressive avec les enfants. Le parent ressent de moins en moins d’affect pour ses enfants et agit au quotidien comme un automate.
  • Une perte d’épanouissement par rapport à son rôle de parent qui se manifeste davantage chez les personnes perfectionnistes et qui ont eu tendance à idéaliser leur vie de famille.

On ne souffre pas forcément des 3 symptômes en même temps mais plus on prend conscience tôt qu’il ne s’agit pas d’une simple fatigue ou lassitude passagère, et plus on a de chances de récupérer rapidement. Il est donc important de savoir repérer ces signes et de prêter également attention au fait de culpabiliser de cette situation. En effet, la plupart du temps, il est extrêmement difficile pour les parents touchés par le burn out parental d’en parler autour d’eux, même à leur entourage très proche et à leur conjoint.

Le burn out parental touche surtout les mamans mais les papas peuvent également en souffrir. Si un papa qui s’est beaucoup investi auprès de ses enfants à un moment, se jette tout à coup dans le travail et délaisse la vie familiale, cela peut être un signe de burn out parental. En revanche, s’il a toujours été plus investi au travail qu’à la maison dès la naissance, il s’agira sans doute moins probablement d’un burn out paternel.

INTERVIEW D’ÉLISE LECORNET ET CORINNE MELOT, AUTEURES DU LIVRE « LE BURN OUT PARENTAL : 100 QUESTIONS/RÉPONSES », PARU AUX ÉDITIONS ELLIPSES

66 Millions d’Impatients : À qui s’adresse le livre ?

Elise Lecornet et Corinne Melot : L’objectif du livre est de mieux faire connaître le syndrome du burn out parental et il s’adresse donc au plus grand nombre. L’idée est d’ouvrir à une prise de conscience, soit pour ne pas basculer vers un burn out parental, soit pour trouver des solutions afin de s’en sortir si l’on en souffre. En effet, nous n’exposons pas simplement les signes du burn out parental, nous proposons également un certain nombre de techniques thérapeutiques pour se soigner. Le livre peut aussi être lu par le conjoint, l’entourage, ou les professionnels de la petite enfance, afin de les aider à comprendre ce que la personne en burn out parental traverse.

Comment distinguer les signes d’un burn out parental par rapport à une fatigue intense mais finalement passagère ?

La fatigue fait partie de la vie de parents, mais quand elle est omniprésente, quand doucement s’installe une distanciation par rapport à ses enfants, voire de l’évitement, quand on enchaîne les tâches domestiques sans affect, sans plus aucun plaisir, quand on repousse le moment de rentrer chez soi, alors peut-être faut-il se demander si l’on ne traverse pas un burn out parental.

Si l’on sent que l’on souffre de burn out parental, est-ce une bonne approche d’en parler à son médecin généraliste ?

Bien sûr ! Dans le livre, nous abordons la prise en charge du burn out parental par la psychothérapie et certaines thérapies alternatives mais en première intention, le médecin généraliste est apte à prendre en charge ce syndrome, même si tous ne sont pas formés, ni sensibilisés à la question du burn out parental. Le signe pour savoir si l’on est accompagné par le professionnel qui nous convient est de se faire confiance. Il est important de se sentir compris par le médecin, ou le thérapeute que l’on a en face de soi. C’est ce que l’on appelle l’alliance thérapeutique, laquelle est un facteur de guérison essentiel. Si la personne malade se sent jugée ou culpabilisée, il ne faut pas hésiter à changer de praticien.

Il faut en effet pouvoir parler le plus possible de ce que l’on ressent et ne pas culpabiliser. Beaucoup de parents vivent la même chose. D’après les rares études sur le sujet, menées en Belgique principalement, 5% des parents souffriraient de burn out parental mais s’en veulent tellement qu’ils n’osent en parler à personne, ni à leur conjoint, ni à leur famille, ni à leurs amis, ni à leur médecin…

Avant d’écrire le livre, nous avions lancé un appel à témoignages, en annonçant, non pas un travail sur le burn out parental mais sur le bien-être parental. Des dizaines et des dizaines de parents se sont manifestés, prêts à témoigner de situations difficiles mais demandant presque toujours de rester anonymes.

En burn out professionnel, on peut se faire prescrire un congé maladie, mais comment fait-on quand il s’agit de sa famille ? Faut-il en parler aux enfants ?

On ne peut effectivement pas quitter sa famille durant plusieurs semaines pour se remettre d’un burn out parental, comme on le ferait pour un burn out professionnel. L’entreprise peut trouver une solution de remplacement mais les enfants ont besoin de leurs parents et il faut prendre en compte, malgré la souffrance, les conséquences émotionnelles qui peuvent rejaillir sur les enfants.

On peut évidemment leur dire que papa ou maman a besoin de temps pour lui ou pour elle, sans que cela ne soit utile de parler de « burn out parental ». Il est encore moins question de dire aux enfants que leur parent ne les supporte plus car cela pourrait altérer sérieusement leur estime d’eux-mêmes.

L’idéal est de pouvoir prendre du temps pour soi, dès que les premiers signes d’épuisement font surface ou d’anticiper si l’on se sait anxieux ou perfectionniste et que l’arrivée d’un enfant pourrait exacerber ce terrain.

Lorsque c’est possible, et que la famille n’est pas enfermée dans un tabou, cela peut d’ailleurs être très intéressant que toute la famille consulte un thérapeute et pas uniquement le parent qui souffre. S’il arrive que le parent en burn out ne veuille pas se soigner, ce qui est souvent le cas au début, où il y a parfois du déni, il n’est pas inutile que l’autre parent qui en aurait pris conscience, consulte un thérapeute de son côté. La famille c’est un « système » et si l’un des membres bouge, cela peut permettre que tout bouge au sein du système et que le parent qui va bien puisse peut-être mieux soutenir celui qui souffre.

Vous parlez d’une éventuelle prise en charge systémique de la famille, mais le burn out parental touche-t-il principalement les familles dont les enfants traversent des moments « difficiles » ?

La survenue d’un burn out parental n’est pas liée aux enfants. Il arrive que des parents en souffrent alors que enfants sont en pleine santé, sans difficulté scolaire ou sociale et sages comme des images.

Les éventuels problèmes de santé des enfants rajoutent une difficulté, mais le burn out parental n’est pas lié à la situation ou au caractère des enfants.

Le moteur du burn out parental est très souvent corrélé à un désir de perfectionnisme qui génère des frustrations et une course éreintante vers un idéal familial inatteignable.

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