Portait de RU : Mamadou Sall, engagé contre la précarité

Arrivé en France dans les années 1990, comme réfugié politique, de Mauritanie, où il militait contre l’esclavage, Mamadou Sall n’a jamais lâché son engagement humaniste et associatif. Aujourd’hui, à 58 ans, il a acquis une grande expérience dans les domaines de la santé, de l’hébergement social et d’urgence et est devenu représentant des usagers il y a un peu plus de 4 ans pour siéger en CPAM.

« Ma mission en tant que RU me permet de nourrir mon travail, grâce aux formations que l’on reçoit et grâce également au réseau que l’on se forge. En outre, je suis toujours au fait des actualités de la CPAM, ce qui me permet d’aider les usagers de l’association où je travaille. Je parle évidemment à tous mes collègues de la représentation des usagers et je leur explique les recours possibles lorsque nous avons des dossiers difficiles. Je précise que Santé Info Droits est également une précieuse mine d’informations pour moi ! ».

Mamadou Sall

Une vie de réfugié politique au service des migrants, de leur bien-être, de leur santé

En Mauritanie, d’où il est originaire, Mamadou était déjà engagé dans un mouvement de défense des droits de l’homme et contre l’esclavage dans son pays. Il y exerçait alors le métier d’enseignant avant d’arriver en France au début de années 1990, où il obtient le statut de réfugié politique. Patienter les bras croisés n’étant pas dans sa nature, en attendant d’être autorisé à travailler, il demande à la mairie d’Elbeuf, où il réside, comment il peut se rendre utile. On lui propose alors de faire l’interface entre les familles d’origine étrangère et le collège de la ville. En parallèle, il reprend des études de santé publique communautaire à l’Ecole de Santé Publique de Rennes et au milieu des années 1990, il est recruté par la DDASS et la ville de Rouen pour s’occuper de la santé des migrants dans les foyers. Puis il est embauché par la SONACOTRA, une société de gestion de foyers de travailleurs migrants. La société devait commencer à accueillir des réfugiés tchétchènes et rwandais mais les mairies refusent alors que leurs enfants soient scolarisés et Mamadou est chargé de résoudre cette situation. « Je me suis alors occupé des demandeurs d’asile, de leurs familles et de la scolarisation de leurs enfants. Je suis ensuite passé directeur de centre d’accueil pour demandeurs d’asile où je suis resté 14 ans. J’ai également participé, dès leur mise en place, dans les années 1990, à la coordination des COREVIH (comité de Coordination de la lutte contre les infections sexuellement transmissibles et le virus de l’immunodéficience humaine), et durant toutes ces années, j’ai ainsi suivi l’évolution de la prise en charge du VIH.», relate Mamadou Sall.

Son premier mandat de RU

Alors qu’il occupe le poste de directeur du pôle social à l’association l’ABRI à Évreux, une association qui se trouve être membre de France Assos Santé, son employeur lui propose de devenir représentant des usagers à la CPAM de l’Eure. « Je savais en théorie ce qu’étaient les représentant des usagers et j’ai un peu hésité au début par rapport à ma charge de travail, mais le directeur général m’a assuré que ces heures seraient intégrées à mon emploi du temps. J’avais à cœur de pouvoir défendre les personnes en situation de précarité et je me suis beaucoup basé sur les retours des conseils de la vie sociale des centres d’hébergement du secteur. », se souvient Mamadou. En effet dans les CHRS (centres d’hébergement et de réinsertion sociale), qu’il connaît bien, sont accueillies des personnes qui vivent avec les minimas sociaux, voire qui n’ont aucune ressource. Ainsi tout ce qui touche, à l’accès aux soins, notamment dans les cabinets de ville et tout particulièrement aux soins dentaires, est un enjeu important à défendre selon Mamadou. « Il en est de même pour les personnes qui vivent dans la rue et sont difficilement accueillies en cabinets de ville, ou alors en toute fin de journée pour ne pas « gêner » les autres patients, car il est vrai que certains ont des problèmes d’addictions, de santé mentale, et bien sûr des difficultés d’accès à l’hygiène. J’ai aussi la possibilité de parler en CPAM des difficultés d’accès aux soins des publics étrangers. Il faut pouvoir identifier ces publics et aller vers eux pour faire en sorte qu’ils puissent bénéficier des offres de soins qu’ils n’iront pas chercher, a priori, eux-mêmes. », explique le RU. Cependant, grâce à sa grande expérience, Mamadou est évidemment en mesure de représenter tout le monde au sein de sa mission de RU à la CPAM, puisqu’il connaît bien les droits de l’enfant, le droit du travail, le droit en santé et la réglementation applicable aux personnes étrangères ou aux personnes vulnérables, en situation de handicap, aux femmes enceintes, aux personnes hospitalisées, aux personnes atteintes du VIH, aux femmes victimes de violences intrafamiliales etc.

Les belles avancées obtenues depuis le début de son mandat

Mamadou Sall se réjouit qu’à la CPAM de l’Eure, où son mandat de 4 ans vient de se terminer, il y a eu de très belles évolutions. La première d’entre elles a été de pouvoir faire en sorte que les aides soient désormais calculées sur le reste à vivre et non plus sur le quotient familial. Il tient à en profiter pour rendre hommage à la mutualité et aux syndicats ouvriers comme patronaux, à la Direction et aux salariés de la CPAM de l’Eure qui ont œuvré pour cette belle avancée, qui est normalement une mesure obligatoire dans les CPAM, mais que beaucoup refusent d’appliquer.

Il se félicite aussi d’une action mise en place avant la pandémie, à travers le financement d’un camping-car pour une association qui vient en aide aux travailleuses du sexe qui exercent dans les bois.

Par ailleurs, les budgets non dépensés à cause de la crise sanitaire ont été en partie réattribués sous la forme d’une aide à tous les étudiants boursiers du département, à hauteur de 200€ pour les garçons et 250€ pour les filles. Pour le reste, ce budget a servi à prendre en charge les surcoûts de certaines associations qui ont eu plus de dépenses que d’ordinaire à cause du Covid et à mettre en place des actions autour desquelles l’ensemble de la CPAM de l’Eure s’est mobilisée, afin d’aller vers les gens qui étaient en renoncement de soins. Enfin, un « déplafonnage » des aides a été accordé à des personnes qui avaient réellement besoin de soins, même si ces soins étaient très coûteux.

Mamadou est évidemment persuadé que toutes ces actions ne seraient probablement pas mises en œuvre sans l’intervention des RU, mais il reconnaît que dans l’Eure, la direction et les salariés de la CPAM leur tendent une oreille attentive. En outre, il précise qu’il ne faut pas négliger une coopération mutuelle et explique par exemple que les RU ont soutenu les représentants du personnel, alors qu’il y avait un allongement des délais dans le traitement des dossiers au plus fort de la crise Covid, pour que la direction accorde un mi-temps supplémentaire afin de rattraper ce retard.

Alors qu’il vient de changer d’emploi, Mamadou vient également de changer de mandat pour siéger, toujours à la CPAM, mais en Seine-Maritime désormais. Son premier combat sera sans doute le même que celui mené avec succès dans l’Eure, pour faire en sorte qu’en Seine-Maritime, le calcul des aides se base également sur le reste à vivre. Il aimerait aussi voir se développer, de façon générale, plus de rencontres et de coopération entre les RU des différentes commissions de sa région pour alimenter un réseau d’échanges, d’entraides et de connaissances entre les diverses institutions de santé.

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