Paquet pharmaceutique et pénuries de médicaments : les usagers ne veulent pas d’un accord a minima au sein du Conseil de l’UE

La révision de la législation pharmaceutique, qui a officiellement débuté en avril 2023 avec la présentation des propositions de directive et de règlement de la Commission européenne (le « paquet pharmaceutique »), est une occasion unique pour établir enfin une réglementation forte en matière de lutte contre les pénuries de médicaments au niveau de l’Union européenne (UE).

Alors que la position du Parlement européen a été adoptée le 10 avril dernier, le chapitre consacré à la sécurité d’approvisionnement est le premier à être discuté au sein du Conseil de l’UE ; or la présidence belge semble bien décidée à arriver à un accord sur ce point avant les élections européennes. Certaines des propositions aujourd’hui à l’étude nous font craindre un compromis a minima, qui limiterait les obligations à la charge des industriels et/ou n’apporterait aucun progrès par rapport à la législation en vigueur en France. Les usagers demandent aujourd’hui au gouvernement français de préserver les avancées proposées par la Commission et le Parlement européens, tout en allant plus loin.

Maintenir le délai de notification de 6 mois

L’une des avancées majeures du texte proposé par la Commission européenne est l’allongement des délais de notification des pénuries de médicaments de 2 à 6 mois. La mise en œuvre d’actions permettant de remédier efficacement à une rupture anticipée demande du temps, et ce d’autant plus dans un contexte d’explosion du nombre des pénuries (près de 5 000 notifications en France en 2023 !).

La proposition de compromis au sein du Conseil d’un délai de notification de 3 mois, voire un maintien du statu quo à 2 mois, amoindrirait considérablement la portée de la législation pharmaceutique en matière de lutte contre les pénuries. Nous demandons donc à la France de soutenir l’allongement des délais de notification à 6 mois.

Le maintien des règles nationales ne peut être considéré comme suffisant

Dans un article publié le 12 avril dernier, France Assos Santé se félicitait de l’amendement adopté par le Parlement européen et qui permettrait aux États membres de maintenir ou d’adopter des règles nationales lorsqu’elles garantissent un plus haut degré de protection contre les pénuries de médicaments que les règles européennes. L’harmonisation doit en effet permettre d’améliorer l’état du droit sans remettre en cause les acquis de la législation française, notamment en matière de stocks de sécurité, pour lesquels aucune obligation générale n’a été introduite dans les propositions de la Commission et du Parlement.

Néanmoins, cet amendement ne peut servir à justifier un accord européen a minima, qui limiterait l’obligation d’établir un plan de prévention des pénuries à la liste européenne des médicaments critiques, beaucoup plus étroite que celle des MITM. Nous demandons au gouvernement de soutenir l’établissement d’un plan de prévention pour tous les produits pharmaceutiques, conformément à la proposition initiale de la Commission européenne.

Aller au-delà des propositions de la Commission et du Parlement

Sur plusieurs points, les propositions de la Commission et du Parlement sont en-deçà des attentes des usagers, voire des règles aujourd’hui applicables en France en matière de lutte contre les pénuries. Quant aux discussions au sein du Conseil, elles semblent se concentrer plutôt sur la réduction du poids des obligations à la charge des entreprises que sur la défense des intérêts des patients et de la santé publique.

Nous demandons donc au gouvernement français d’inverser cette tendance et de soutenir les propositions suivantes, inspirées de notre modèle national et soutenues par différentes associations européennes de patients et d’usagers :

  • Les pénuries doivent être notifiées quelle que soit leur durée anticipée, l’absence de notification ne permettant pas d’en contrôler la durée effective.
  • Toutes les pénuries et tensions d’approvisionnement doivent être publiées sur le site des agences du médicament, dans un souci d’information des patients et de transparence.
  • Les plans de prévention des pénuries doivent être communiqués aux agences du médicament compétentes de façon proactive. La possibilité pour les associations de patients et d’usagers d’y avoir accès, comme c’est le cas en France aujourd’hui pour les PGP, permet également de contribuer au contrôle sur les mesures qu’ils contiennent.

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