AIder les aidants et les malades Alzheimer

Alzheimer : aider les malades et les aidants

Ce mercredi 21 septembre 2016, à l’occasion de la journée mondiale Alzheimer, s’est tenu au ministère des Affaires sociales et de la Santé un colloque sur le thème des vulnérabilités partagées, organisé par l’Espace national de réflexion éthique maladies neurodégénératives, où malades, aidants, professionnels de santé, associations et politiques ont débattu des questions touchant à ces moments où tout se fragilise pour et autour du malade jusqu’à l’impuissance, la détresse. La détresse des malades évidemment, celle de leurs proches, mais aussi celle des aidants et des professionnels de santé. Chacun à son niveau est touché par une telle maladie, devient vulnérable et a besoin de soutien et de reconnaissance pour faire face efficacement aux maladies neurodégénératives.

En France 850 000 personnes souffrent de la maladie d’Alzheimer ou d’une maladie apparentée. En tout, 3 millions de Français sont directement ou indirectement touchés par la maladie.

Lutter contre l’isolement et vivre « ensemble » la maladie

Depuis le début des années 2000, la recherche tarde à mettre au point des médicaments dont on nous promettait qu’enfin ils pourraient aider les malades. Le constat montre en revanche que des approches non-médicamenteuses permettent aux malades de repousser l’apparition des symptômes d’Alzheimer. Ces approches tournent principalement autour de l’importance de stimuler les activités intellectuelles et sociales.

D’ailleurs pour en témoigner, durant le colloque, c’est Nicole Coullaré, elle-même atteinte d’Alzheimer depuis 6 ans, qui prend la parole. Pleine d’humour et ultra dynamique, elle règle son minuteur pour être certaine de ne pas dépasser les 10 minutes qui lui sont accordées et demande de temps en temps à son mari, assis en face d’elle dans la salle, de confirmer ses propos. Mais mis à part ces précautions qui marquent son appréhension à perdre ses repères, la maladie ne vient pas interférer dans son témoignage. Son secret, nous confie-t-elle, c’est qu’elle a la chance de s’être toujours intéressée à plein d’activités, de se passionner pour tout un tas de choses : « Je fais travailler mon cerveau, je bricole. Pour oublier Alzheimer, il faut avoir d’autres choses en tête, des choses qui me font plaisir et dont je peux parler avec mon mari. », précise-t-elle. Et de finir en disant : « Je combats Alzheimer au quotidien et de temps en temps, j’ai l’impression de gagner ». Ses activités la maintiennent en éveil et la possibilité de pouvoir échanger avec son entourage l’encourage, de toute évidence.

Effectivement, l’entourage du malade est plus qu’essentiel, l’échange et l’entraide sont des socles indispensables pour traverser la maladie.

Durant le colloque, l’auteur Jacques Frémontier nous rappelle qu’en février 2007, le Professeur Robert Wilson de la Rush University de Chicago a mis en lumière le fait que les personnes âgées isolées ont deux fois plus de risque d’être confrontées à la maladie d’Alzheimer (lire cet article pour en savoir plus).

L’entourage des personnes touchées par la maladie d’Alzheimer

Cette maladie ne peut donc plus être l’affaire seule des malades. On en partage les vulnérabilités comme on partagerait la peine de quelqu’un, malheureusement pas en la divisant pour espérer alléger le fardeau de celui qui souffre, mais parce que l’on vit peut-être également soi-même une autre forme de vulnérabilité liée à la maladie.

Catherine Ollivet, Présidente de France Alzheimer 93, (et Présidente du CISS-Ile-de-France) l’explique parfaitement, alors qu’elle s’installe devant le pupitre lors du colloque. Selon elle « les vulnérabilités ne se partagent pas, ce n’est pas une part de gâteau que l’on se partage, c’est un bras de pieuvre qui part des vulnérabilités intrinsèques de la personne malade […]  pour venir toucher inexorablement tous ceux qui s’y frottent, qu’ils soient proches, famille, aidant, assistante sociale, médecin, infirmière…  On n’est pas dans le partage, on est dans la contamination. »

La parole des proches-aidants vient à son tour enrichir le débat, avec l’intervention de Danielle Fisher et Nicole Barnavon, deux sœurs qui font face ensemble à la maladie de leur maman. Il est alors question pour elles de gérer les décisions à prendre car tôt ou tard arrive le moment où le malade n’est plus forcément capable de prendre les bonnes décisions pour lui-même. Et comment fait-on pour savoir quand ce moment est arrivé ? Quand il faut peut-être aller contre la volonté de son propre parent, quitte à supporter des phrases blessantes comme celle prononcée par la maman des deux sœurs : « Vous étiez des filles gentilles avant » ? Comment intégrer les conseils des professionnels de santé ? Comment s’entendre au sein d’une même famille ? Quelle place donner à l’aidant, qu’il soit ou non de la famille ?

Les vulnérabilités des aidants

Dans l’entourage des malades, certains mettent parfois leur vie entre parenthèses pour accompagner le malade au quotidien lorsqu’il devient dépendant et désire rester à domicile : ce sont les aidants. Pour ces proches, ainsi que l’explique Joël Jaouen, Président de France Alzheimer, c’est la triple peine. Il y a d’abord la peine du fait même de la maladie, à laquelle s’ajoute la peine financière car il faut souvent mettre de côté sa vie professionnelle, et enfin la peine familiale car ce temps consacré à la personne malade est également du temps que l’on ne passe plus avec le reste de sa famille.

Les aidants vivent des situations parfois très difficiles, un peu résumées par une phrase très juste prononcée au cours du colloque par Armelle Debru, professeur honoraire à l’université Paris Descartes : « On est pris entre le sacrifice de soi ou l’abandon de l’autre ». Les aidants, de façon plus sourde, deviennent eux-aussi vulnérables à cause de la maladie. Aujourd’hui ils sont 8,3 millions en France à accompagner des proches en situation de maladie ou de handicap (on ne parle pas là uniquement de la maladie d’Alzheimer et des maladies apparentées), qui ont impérieusement besoin d’être reconnus et soutenus.

Le discours de la secrétaire d’État chargée des personnes âgées et de l’autonomie

Pascale Boistard, secrétaire d’État chargée des personnes âgées et de l’autonomie, a également pris la parole durant cette journée, pour évoquer la loi d’adaptation de la société au vieillissement promulguée le 28 décembre 2015. Elle insiste sur le fait que les réflexions autour de cette loi sont parties « de ce que nous disaient les personnes âgées, de leurs souhaits. Ce que nous dit une grande majorité d’entre elles, c’est qu’elles désirent continuer de vivre à domicile aussi longtemps que leur état de santé le leur permet. Vivre à domicile, c’est aussi pouvoir garder des liens, être inclus dans la vie quotidienne de la cité. C’est pourquoi un certain nombre d’avancées apportées par la loi concerne le champ du domicile avec tout d’abord la revalorisation de l’APA. La priorité donnée au domicile est ainsi réaffirmée. Pour l’année 2016 ce sont 306 millions d’euros qui sont dégagés et pour 2017 et 2018 ce seront chaque année 453 millions d’euros. »

Dans ce contexte, la place des aidants notamment est revalorisée à travers plusieurs mesures que la secrétaire d’Etat a tenu à rappeler : « La loi créée de nouveaux droits, de nouvelles reconnaissances. La reconnaissance du statut de proche-aidant tout d’abord. Pour la première fois une définition de l’aidant est donnée et inscrite dans la loi. Sont ainsi reconnus tous les proches de la famille exerçant ce rôle mais aussi des personnes ayant des liens étroits et stables tout en n’appartenant pas à la famille. L’aide régulière fréquente peut prendre différentes formes, du ménage à la préparation des repas, de la toilette à la présence physique, en passant par l’aide financière ou morale. Il était important de reconnaître le rôle de ces personnes, sans qui les personnes âgées ne pourraient vivre à domicile. Des personnes qui mettent souvent leur santé, leur travail, leur équilibre personnel en péril. En parallèle de cette reconnaissance, la loi apporte enfin un nouveau droit social pour les aidants : le droit au répit. Dorénavant lorsqu’une équipe médico-sociale du conseil départemental définit le plan d’aide APA de la personne âgée, elle évalue également les besoins inhérents et peut alors mettre en place des dispositifs répondant au besoin du répit. Le plan d’aide APA de la personne âgée peut ainsi être majoré jusqu’à 500€ par an au delà des plafonds de l’APA pour financer, par exemple, le recours à de l’accueil temporaire en établissement ou en accueil familial ou des heures d’aide à domicile supplémentaire. Cette mesure est entrée en vigueur le 1er mars 2016. La loi permet aussi la mise en place d’un relai auprès de la personne aidée en cas d’hospitalisation de son proche aidant. Il s’agit ici de décharger l’aidant hospitalisé qui n’aura plus le souci de savoir qui pourrait le remplacer. C’est donc un « confort » pour celles et ceux qui ne comptent que sur eux-mêmes, étant seuls à prendre en charge un ou une aîné(e). Cette aide ponctuelle dont le montant peut atteindre jusqu’à 992€ au delà des plafonds de l’APA, pourra ainsi servir à financer un hébergement temporaire de la personne aidée ou un relai à domicile. Cette mesure est elle aussi entrée en vigueur le 1er mars 2016. »

Des progrès restent à faire…

En parallèle de ce colloque, durant cette journée mondiale d’Alzheimer, Joël Jaouen, président de France Alzheimer a également remis à Pascale Boistard un livre blanc contenant 13 propositions pour aider à mieux prendre en compte les souffrances des aidants actifs. En effet, on estime que sur les 8,3 millions d’aidants, près de la moitié occupent un emploi et peinent très sérieusement à tout mener de front. Espérons que cette nouvelle reconnaissance dont parlait madame la secrétaire d’Etat n’est qu’un premier pas pour soutenir ces nouveaux enjeux de société et que la parole des patients et de leurs proches, les aidants en particulier, continueront de faire évoluer les décisions prises par les pouvoirs publics.

1 commentaires

  • boulet anne marie dit :

    mon mari parkinsonien donc en ALD doit entrer en séjour temporaire(15j) dans une maison de retraite pour me permettre de me reposer. Les frais de transport en ambulance sont-ils pris en charge ? En ce qui concerne les frais liés à ce sejour, le conseil général y participera en partie (déjà bénéficiaire APA à domicile) par contre avons auprès de notre mutuelle Uneo une assurance autonomie dépendance, pour le reste à notre charge peut-elle en partie participer aux frais également. Quelle est la marche à suivre?  merci d'avance

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