Les dépassements d’honoraires pratiqués par certains médecins peuvent être mal vécus par les patients, en particulier s’ils sont mal couverts et peu fortunés. Marguerite*, une jeune retraitée en a fait les frais récemment lors d’une intervention chirurgicale bénigne qu’elle a subie dans une clinique privée en province.
« Une amie m’a dit que je pouvais demander des facilités de paiement. J’ai finalement réglé en trois fois »
Parole d’Impatients** – Dépassement d’honoraires
Marguerite est une jeune retraitée de 65 ans qui vit dans une zone rurale du centre de la France. Il y a près d’un an, elle commence à éprouver des douleurs à un genou. Les anti-inflammatoires prescrits dans un premier temps par son rhumatologue n’y changeront pas grand chose.
Une radio puis une IRM plus tard, son médecin conclut à la nécessité d’une arthroscopie du genou. Il adresse sa patiente à un confrère exerçant dans le privé. Ça tombe bien, Marguerite garde un mauvais souvenir de son dernier passage à l’hôpital où elle a contracté une infection nosocomiale assez grave. Un rien refroidie par l’expérience, elle accepte sans peine « l’option clinique ». Les dépassements d’honoraires des médecins de secteur 2, elle en avait entendu parler mais n’y avait encore jamais été confrontée.
Deux tiers des interventions chirurgicales en dépassement
L’arthroscopie du genou est un acte fréquemment pratiqué. En 2014, les chirurgiens exerçant dans le privé en ont réalisé environ 64 000. L’intervention vise à retirer les fragments de ménisque usé au moyen de micro-incisions. Le plus souvent, ce fut le cas de Marguerite, le patient est hospitalisé le matin et quitte l’établissement en fin de journée. « L’intervention dure une trentaine de minutes », témoigne-t-elle.
En clinique, dans les deux tiers des cas, cette chirurgie donne lieu à un dépassement d’honoraire dont le montant moyen au niveau national (223,90 €) équivaut environ à 125 % du tarif fixé par la Sécurité sociale pour cet acte (181,30 €). Ainsi, en moyenne au niveau national ce sont 405,20 euros qui sont facturés, dont 223,90 euros à la charge du patient et/ou des complémentaires santé.
Les dépassements d’honoraires peuvent être beaucoup plus élevés dans certaines régions, les grandes agglomérations notamment. Comptez par exemple 466,10 € (260% de dépassements) en moyenne en Seine-Saint-Denis, 421,70 € à Paris (233%), 361,10 € à Lyon (199%) ou encore 308 € (170%) à Strasbourg.
Un tarif qui peut atteindre près de 1 400 €
Cene sont là que des moyennes. Certains n’hésitent pas à pratiquer des tarifs nettement plus élevés. Dans les 10 départements les plus chers de France, les champions du dépassement sont susceptibles de facturer l’intervention, 500, 800 voire jusqu’à 1200 €. Comparez à ces excès, le tarif demandé à Marguerite (200 € de dépassements sur l’acte de chirurgie + 80 € pour l’anesthésie) peut sembler dérisoire.
Sauf qu’elle bénéficie d’une maigre retraite (690 €/mois) et dispose d’un contrat de complémentaire santé qui ne couvre pas les dépassements d’honoraires (sa complémentaire lui coûte près de 70 € par mois). « Sortir 280 € en un coup, c’est un peu compliqué pour moi », indique-t-elle.
Pour le Conseil national de l’Ordre des médecins, « s’il peut déterminer librement ses honoraires, [le spécialiste en secteur 2] doit le faire avec tact et mesure en tenant compte de la situation financière du patient et éventuellement de circonstances particulières. Quatre éléments peuvent permettre au médecin de mesurer et de justifier le tarif des honoraires demandés : les capacités financières du patient, le temps passé et la complexité de l’acte, la notoriété, les exigences éventuelles du patient ».
Dépassements d’honoraires et frais illégaux
Le praticien aurait donc pu proposer à Marguerite un tarif plus adapté à ses ressources. Il ne l’a pas fait. De fait, le prix proposé est celui qu’il pratique habituellement, peut-on constater sur le site de l’Assurance maladie où les tarifs des spécialistes de secteur 2 sont consultables. Modérer ses tarifs ? Le chirurgien a trouvé une solution plus maligne pour faciliter la vie de ses patients sans le sou : l’étalement du paiement. « Une amie m’a dit que je pouvais demander des facilités de paiement. J’ai finalement réglé en trois fois », soupire Marguerite.
Son sentiment sur cette première confrontation avec un médecin de secteur 2 ? L’agacement est contenu. « Je ne sais pas trop. On se trouve impuissant ! C’est impossible de juger si ce tarif est justifié ou non. Il faut croire que la Sécu ne rembourse pas assez. Je trouve la facture quand même un peu élevée pour une intervention de 30 minutes ».
Cerise sur le gâteau, en plus des dépassements du chirurgien et de l’anesthésiste, la clinique lui a imposé 10 € de frais administratifs. Une pratique tout à fait illégale si elle ne fait pas l’objet d’un consentement explicite préalable du patient, pratique dénoncée depuis plusieurs années par de nombreuses associations dont le CISS, l’UFC-Que Choisir et l’Assurance maladie.
* Le prénom a été modifié.
** Chaque mois, 66 Millions d’IMpatients se fait l’écho d’une expérience vécue par un ou plusieurs usagers du système de soins.
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