Exposition des travailleurs au formaldéhyde

Prévention santé au travail : le formaldéhyde dans la ligne de mire

A l’occasion de la journée mondiale de la sécurité et de la santé au travail, 66 Millions d’IMpatients fait le point sur les recherches en cours visant à réduire l’exposition des salariés au formaldéhyde, un composé toxique utilisé en masse dans certains secteurs d’activités.

« Joignez-vous à la construction d’une culture de la prévention en matière de sécurité et santé au travail ». Tel est le thème de la Journée mondiale de la sécurité et de la santé au travail qui se tient aujourd’hui, comme chaque année. Objectif de cet événement, organisé sous l’égide du Bureau international du travail (BIT) : sensibiliser les différents acteurs (employeurs, salariés, pouvoirs publics, etc.) à la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles à l’échelle planétaire.

« La prévention des risques professionnels, indique sur son site l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS), c’est l’ensemble des dispositions à mettre en œuvre pour préserver la santé et la sécurité des salariés, améliorer les conditions de travail et tendre au bien-être au travail. Il s’agit d’une obligation réglementaire qui s’impose à l’employeur et dont les principes généraux sont inscrits dans le Code du travail ».

Focus sur l’exposition des travailleurs au formaldéhyde

Burn-out, accidents professionnels, risques chimiques… Le sujet de la prévention santé au travail comprend de nombreux pans. Tout récemment, l’INRS s’est plus particulièrement penché sur la question de l’exposition de milliers de salariés au formaldéhyde, une substance toxique pourtant utilisée massivement dans plusieurs secteurs d’activité.

« Les professions, activités et tâches associées à l’utilisation du formaldéhyde sont extrêmement variées », peut-on lire dans un dossier consacré au polluant formaldéhyde et publié en février dans les colonnes du mensuel Travail et Sécurité édité par l’INRS. Dans les secteurs concernés, des démarches de substitution ont été initiées de longue date. Souvent sans qu’une solution acceptable techniquement et économiquement ne soit encore en vue.

Le formaldéhyde est une molécule qui connait de « multiples applications industrielles en tant que biocide, conservateur ou fixateur par exemple », indique l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation de l’environnement et du travail (Anses) dans sa fiche d’évaluation des risques sanitaires liés à la présence du polluant.

Le formaldéhyde : une toxicité chronique et aigüe avérée

Par voie aérienne, les effets critiques du formaldéhyde chez l’homme sont des irritations oculaires et des voies respiratoires, observés pour des expositions aiguë et chronique. « Il est également à l’origine de cancers du nasopharynx par voie aérienne chez l’homme, d’après des études épidémiologiques conduites en milieu du travail », ajoute l’Anses.

En Europe, plus d’un million de tonnes du polluant serait produite ou distribuée, estime l’Agence européenne des produits chimiques. Selon l’INRS, 7 salariés sur 1 000 se déclaraient exposés au formaldéhyde en France en 2010 (contre 9 sur 1 000 en 2003), dont 23 % de façon jugée importante.

L’industrie du bois et de la fabrication de meubles est la plus consommatrice de cette molécule aux effets délétères qu’on retrouve en quantités importantes, notamment dans les colles utilisées dans la conception des meubles en aggloméré. Ces produits qui font les choux gras des enseignes Ikéa ou encore Conforama posent par ailleurs problème aux particuliers à la maison mais aussi au bureau où le formaldéhyde constitue l’un des principaux polluants de l’air intérieur. Egalement concernés, les enfants dont l’exposition à la substance dans les crèches et les écoles inquiète, alertions nous il y a quelques mois sur notre site.

« Si l’heure est à la recherche d’alternatives visant à limiter le dégagement de formaldéhyde lors de la fabrication et l’utilisation des panneaux de bois, les industriels se heurtent à des problèmes techniques majeurs, explique le Dr Patrick Levy, médecin-conseil de l’Union des industries chimiques, cité dans le dossier de l’INRS. De gros volumes étant mis en jeu, des questions se posent quant à la disponibilité des matières premières. Par ailleurs, les profils de danger des nouveaux produits doivent être bien connus ».

L’industrie du bois encore impuissante

En attendant que l’industrie mette un terme au règne du formaldéhyde, l’heure est à la diminution des concentrations du produit dans les colles et à l’amélioration de l’extraction sur les sites de production. La situation n’est guère plus réjouissante dans le secteur de l’industrie sucrière qui fait appel au formaldéhyde pour ses propriétés antibactériennes et qui, faute de solution alternative pour le moment, s’emploie surtout à en limiter l’utilisation. Idem au sein des laboratoires d’anatomo-pathologie des établissements de santé, où sont réalisées des analyses sur tissus vivants afin de confirmer la présence d’une pathologie ou son évolution (le cancer, par exemple). Ces laboratoires sont de forts consommateurs de formaldéhyde, utilisé comme fixateur.

Au micro de la revue Travail et Sécurité, Jean-Pierre Bellocq, chef de service au département de pathologie du CHU de Strasbourg, explique : « C’est un produit qui intervient dans une chaîne diagnostique. La modification, sur cette chaîne, d’un paramètre représentant un tel standard, est très compliquée. Elle conduirait d’ailleurs à sortir d’une standardisation recherchée depuis des années en pathologie au niveau international ». Là encore, le gros des efforts porte sur l’amélioration des systèmes d’extraction d’air.

Des progrès encourageants du côté des thanatopracteurs

Le secteur de la thanatopraxie (embaumement de corps) est le seul parmi ceux pointés par l’INRS à enregistrer de réels progrès en matière de substitution avec l’agrément délivré par l’Anses en septembre 2013 de trois nouveaux produits exempts de formaldéhyde. Près de 40 000 « soins » auraient été effectués l’année dernière en ayant recours à ces produits de substitution. Restent les questions des « changements d’habitudes et de réseau de distribution qui peuvent créer des tensions », explique le Dr Patrick Levy. Sans compter que ces produits demeurent sensiblement plus chers que le formaldéhyde.

En dépit de ces progrès, la question de la toxicité du formaldéhyde en milieu professionnel risque de continuer à se poser à de nombreux salariés dans les années à venir. Les secteurs identifiés par l’INRS ne constituant que la face émergée de l’iceberg puisque, on l’a vu, les employés travaillant dans des bureaux sont également directement concernés.

En décembre, Andrée Buchmann, présidente de l’Observatoire de la qualité de l’air intérieur (OQAI) rappelait, citée par le site Actu environnement dans un article « Quels polluants respire-t-on au bureau ? », que ce lieu « présente des spécificités susceptibles d’avoir un impact réel et conséquent sur la qualité de l’environnement quotidien des travailleurs ». Un sujet dont on espère que leurs représentants siégeant au sein des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) se sont emparés…

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