Questions d’environnement en crèches et maternités

Les gestes pratiqués ou les produits utilisés en maternité et dans les crèches font souvent référence aux yeux de parents, lesquels reproduisent à tort ou à raison ce que le personnel applique dans ces établissements. Pourtant, en matière d’environnement, il reste de nombreux points à optimiser, pour protéger d’une part la santé de nos enfants qui est particulièrement fragile, mais aussi celle des équipes soignantes et encadrantes.

Nos enfants sont les sentinelles de notre environnement

« Les 1000 premiers jours de la vie d’un individu, incluant la période intra-utérine, sont primordiaux pour son futur développement », tel est le postulat duquel est parti Philippe Perrin qui a ouvert il y a quelques semaines la dernière conférence éco-maternité organisée par l’association C2DS (Comité pour le Développement Durable en Santé) à Paris. « Du fait de l’immaturité de leur peau, de leurs poumons, de leur système immunitaire, les enfants sont particulièrement fragiles face à leur environnement. Ils sont, à ce titre, les sentinelles de notre environnement », ajoutait Philippe Perrin, éco-infirmier et surtout co-fondateur et directeur de l’IFSEN (Institut de formation en Santé Environnement). Ce postulat est malheureusement corrélé aux résultats inquiétants concernant la santé de nos enfants. Les cas de cancers, par exemple, augmentent un peu plus chaque année. L’Observatoire régional de santé d’Ile-de-France rapporte que l’augmentation de l’incidence des cancers chez les moins de 15 ans est de l’ordre de 1% par an. L’étude indique que certains cancers augmentent davantage que d’autres, comme celui du système nerveux central chez les filles notamment. Ces dernières années ont également vu avancer l’âge de la puberté chez les enfants, une précocité qui peut entraîner des problèmes de croissance.

Les perturbateurs endocriniens dans le collimateur

Les perturbateurs endocriniens sont partout, aussi les maternités et les crèches n’échappent-elles pas à la règle. Dans ce type d’établissement, où l’hygiène est de rigueur, on use et parfois on abuse des produits ménagers industriels qui sont des polluants notoires. C’est d’autant plus contradictoire que les enfants sont par nature plus proches et plus en contact que les adultes avec le sol.

Selon Claire Grolleau Escriva, Présidente du label « Ecolo crèche® », cela s’explique dans les crèches du fait qu’à leur création, on les a conçues comme une extension du système médical. Or les crèches ne sont pas destinées à accueillir des enfants malades et il n’est pas nécessaire d’y appliquer des mesures d’hygiène aussi exigeantes qu’en milieu hospitalier. « Dans les crèches, tout est désinfecté à grand renfort de produits potentiellement dangereux. On nettoie tout du sol au plafond, en passant évidemment par les jouets qui sont facilement mis à la bouche par les enfants. Lors des formations que nous proposons, nous tentons d’expliquer qu’il n’est pas nécessaire de nettoyer autant et surtout qu’il est très important de sélectionner les produits ménagers avec attention en lisant bien les étiquettes et les fiches de sécurité des produits, pour écarter les plus toxiques », précise Claire, écotoxicologue de formation (lire notre interview de Claire Grolleau Escriva en complément de cet article).

Le choix des produits ménagers est important, celui des cosmétiques utilisés dans les maternité l’est tout autant, voire davantage… Car ce choix est associé à un choix de confiance dans l’esprit des jeunes parents. Il est délicat de ne pas céder aux pressions des grandes marques dans les maternités ou de réussir à convaincre la direction de changer de produits ménagers qui seront éventuellement plus coûteux. Pourtant cela devient urgent. En effet, 40% des cosmétiques mis sur le marché contiennent des perturbateurs endocriniens (voir notre article sur les parabènes), et l’on retrouve de l’aluminium dans la plupart des laits infantiles (voir notre article sur les dangers de l’aluminium). Les marques l’ont bien compris, les maternités sont un lieu de prescription idéale pour inciter les parents à utiliser tels ou tels couches, soins, laits…

Certaines maternités font de la résistance !

Bien entendu il y a les maternités qui ouvrent le dialogue pour l’allaitement, qui reste une pratique 100% écologique. Certaines, comme celles de Lons-le-Saunier et de Dole, se sont même engagées dans la voie des couches lavables ! Si sur le papier les chiffres donnent immédiatement raison aux couches lavables d’un point de vue écologique, la réalité mérite un ajustement. En effet, une vie de bébé nécessite en moyenne 3800 couches jetables contre 30 couches lavables. Cependant, si l’on n’est pas attentif au mode de lavage et de séchage ainsi qu’aux lessives utilisées, le gain en termes d’impact écologique n’est pas forcément évident. En outre, le coût initial pour équiper une maternité en couches lavables est très lourd. L’ADEME peut co-financer l’achat des couches lavables mais leur politique sur le sujet est assez inégale d’une région à une autre. Reste la solution de négocier la gratuité des couches lavables avec une marque qui peut y trouver son compte puisqu’une jeune maman qui essaye les couches lavables à la maternité sera plus tentée qu’une autre de poursuivre cette démarche à la maison et d’acheter la marque qu’elle connaît déjà…

C’est certain, la maternité est un excellent endroit pour sensibiliser les consciences à propos de l’environnement et des conséquences sur la santé des enfants. C’est pourquoi l’ONG environnementale WECF a mis en place un programme baptisé Projet Nesting, qui propose des ateliers d’informations sur l’environnement et la santé, à destination des futures et des jeunes mamans. Le programme rappelle quelques gestes simples auxquels il faut penser, comme éviter de peindre la chambre de bébé lorsque l’on est enceinte car les peintures sont souvent toxiques pour le fœtus. De la même façon, il vaut mieux acheter les meubles de la chambre de bébé bien en avance pour permettre aux matériaux de libérer le maximum des émanations de formaldéhyde qu’ils pourraient contenir (lire notre article sur le formaldéhyde).

Quand les nourrissons ont besoin de soins…

Il arrive malheureusement que les bébés aient besoin de soins plus ou moins lourds dès la naissance, notamment dans le cas où ils sont prématurés. Ces enfants sont extrêmement sensibles lorsqu’ils sont exposés à des perturbateurs endocriniens (PE). Or en service de néonatalité on retrouve beaucoup de matériaux classés comme étant des PE. C’est le cas des poches de sang, des tubulures, de certains cathéters ou des gants à usage unique qui contiennent des phtalates, ou encore des incubateurs de nouveaux-nés ou des seringues qui contiennent du Bisphénol A.

Bébé grandit, c’est l’heure de la crèche…

… Un lieu où les enfants passent plusieurs mois de leur vie encore fragile. Un lieu, où comme le disait plus haut Claire Grolleau Escriva, les vieilles habitudes ont la vie dure, notamment en matière d’hygiène. Il suffit pourtant parfois d’un peu de bonne volonté et d’huile de coude pour diminuer l’impact environnemental dans les crèches au quotidien. C’est ce qui s’est passé dans une crèche du Val de Marne où Céline Cautela dépose sa fille tous les jours. La jeune maman était désolée de constater chaque matin le triste état des surchausses jetables qui étaient lavées 2 ou 3 fois, par souci d’économie, avant d’être définitivement mises aux ordures car inutilisables. Elle a donc proposé, l’automne dernier, à la directrice de la crèche, de préparer un patron et de coudre 3 paires de surchausses en tissu, afin que les lingères se chargent ensuite de fabriquer le reste. Le tissu a été récupéré auprès des parents qui ont joué le jeu et ont ramené draps et torchons qui trainaient chez eux. L’initiative a enthousiasmé tout le monde et l’équipe de la crèche en a même profité pour mettre à nouveau en place les serviettes et gants lavables au lieu d’utiliser des jetables. Peut-être suffit-il de peu de choses finalement pour améliorer les choses, d’un peu de bon sens, de solidarité et d’envie de devenir éco-responsable. Heureusement, Claire Grolleau Escriva et la création de son label « Ecolo crèche® » peut accompagner ces envies de changement sur le terrain.

Concluons cet article avec une interview de Claire qui nous explique comment tout a commencé et comment se déroule son programme de labellisation :

« Ecolo crèche, késako ? », entretien de 66 Millions d’Impatients avec Claire Frolleau Escriva, écotoxicologue et Présidente d’Ecolo Crèche.

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