Introduction / Contexte
Depuis plusieurs années, France Assos Santé Auvergne Rhône-Alpes anime, grâce au soutien de l'Agence Régionale de Santé d'Auvergne Rhône-Alpes (ARS), un groupe de travail régional Expression directe, sur la santé des personnes en situation de précarité. Ce groupe a pour but de faire entendre la parole des personnes concernées sur les politiques publiques directement auprès des décideurs concernés. Au moins 50% de ses membres sont des personnes concernées. La Fondation Armée du Salut, le Conseil Régional des Personnes Accueillies et/ou accompagnées (CRPA) ARA, la Fédération des Acteurs de la Solidarité, le Comité D-base, le CHRS "Foyer vers l'Avenir de Riorges (42), les Petits Frères des Pauvres, Médecins du Monde, la Coordination régionale des Permanences d'Accès aux Soins Santé et le Point Précarité Santé Pops (38) font partie de ce groupe en 2024. L'objectif général de ce groupe est de contribuer à l'évaluation année par les personnes concernées des actions mises en oeuvre dans le cadre du projet régional de santé de l'ARS et notamment le Programme régional d'accès à la prévention et aux soins pour les plus démunis (PRAPS).
Le chapitre 1 du PRAPS s’intitule « Favoriser l’accès à la santé des populations en situation de précarité et lutter contre le non-recours ». Il comporte un objectif qui a fortement raisonné pour les membres d’Expression Directe : « 1.4 - Lutter contre le non-recours aux soins, le refus de soins et les discriminations des personnes en situation de précarité »
Le fait que des personnes en situation de précarité soit mal reçues ou non reçues par des professionnels de santé a été abordé dans les échanges. Plusieurs personnes du groupe ont fait l’expérience personnelle ou connaissent quelqu’un qui s’est déjà vu refusé un rendez-vous au motif d’être à l’AME ou d’avoir la CSS2 par exemple. Ces refus découragent les victimes de s’occuper de leur santé et peuvent à terme les faire renoncer à leurs droits. Le groupe est unanime sur les conséquences graves qu’elles entrainent en retardant des soins urgents. Elles engendrent encore plus d’isolement et de baisse d’estime de soi.
Le groupe a donc décidé de consacrer l’année 2024 à faire entendre la voix des personnes en situation de précarité, victimes de refus de soins discriminatoires. La finalité de notre démarche est de montrer la nécessité d’agir contre en donnant à voir le ressenti des personnes victimes et les conséquences pour elles. Ce travail fait suite à la mobilisation de longue date de certaines des structures membres de notre groupe de travail Expression Directe
Objectifs et Méthodologie
L’objectif de cette étude est de fournir une mesure du ressenti des usagers en situation de précarité du niveau de refus de soins discriminatoires en ARA et leurs conséquences sur la santé des usagers. Ces données probantes, photographie régionale de la situation, a permis, après analyse des données recueillis, au groupe de formuler des recommandations concrètes, réalistes, finançables et mesurables pour lutter contre ces discriminations au niveau régional, mais également national.
En effet, dès la phase de revue de la littérature sur le sujet l'absence de données probantes sur le phénomène a surpris le groupe. Absence de données au niveau régional mais également au niveau national. A part des initiatives associatives" de "testing", aucune étude qualitative et quantitative au niveau national n'existe à notre connaissance. Alors que le phénomène est reconnu "sous évalué" par l'ensemble des acteurs du système de santé. Pour rappel en 2023 l'Assurance Maladie au niveau national avait instruit moins de 300 réclamations d'usagers se déclarant victimes de refus de soins discriminatoires pour plus de 60 millions d'usagers en France.
Après une revue de la littérature, et le partage de témoignages de membres du groupe, nous avons co construit un questionnaire anonyme en vue d'une diffusion à toute personne en situation de précarité résidant au moment de l'enquête dans la région. Le questionnaire se voulait rapide, accessible, et permettait par ailleurs de recueillir la parole (verbatim) des personnes concernées sur l'impact concret sur leur santé. Le questionnaire a été partagé en direct par des membres du groupe en contact régulier avec des personnes concernées de la région (maraudes, bus santé, foyers d'accueil/d'hébergement). La diffusion a été également faite par plusieurs délégations départementales de l'ARS à leurs associations partenaires dans le champ de la précarité (en Isère, Savoie, Rhône et en Drôme notamment). Chaque partenaire associatif membre du groupe régional a également partagé dans ses réseaux le questionnaire. Ainsi par exemple l'ensemble des PASS de la région l'ont également diffusé. Au total plus de 250 personnes en situation de précarité ont partagé leur expérience d'usager en matière de refus de soins discriminatoires de tous les départements d'Auvergne Rhône-Alpes. L'inclusion dans l'étude était possible de juin 2024 à décembre 2024.
Résultats et grands enseignements
Alors que l’immense majorité des professionnels de santé sont pleinement engagés pour la santé des personnes en situation de précarité, 40% des personnes en situation de précarité sondées (sur les 250 répondants) indiquent avoir vécu au moins un refus de soins discriminatoire ces dernières années. Avec des impacts très concrets sur leur santé : allongement et rupture du parcours de soins, aggravation de l’état de santé et renoncement aux soins.
90% d’entre eux n’ont pas saisi les voix de recours existantes (CPAM, Défenseur des Droits, Ordres professionnels de santé). Cela confirme la sous-estimation de ce phénomène et la nécessaire évolution des voies de recours
Le groupe de travail a formulé plusieurs recommandations à destination de l'ARS ARA, de l'Assurance maladie et de tous les acteurs concernés à l'issue de cette enquête:
1° lancer une étude régionale quantitative et qualitative sur les refus de soins discriminatoires: cela permettrait de disposer de données probantes et placerait la région à la pointe de la connaissance sur le sujet, tant les études existantes sont rares en France. Cette recommandation est reprise dans le rapport de la Défenseure des Droits sur le sujet: https://www.defenseurdesdroits.fr/rapport-prevenir-les-discriminations-dans-les-parcours-de-soins-un-enjeu-degalite-853.
2° faire faire de la sensibilisation aux professionnels de santé par les personnes concernées
3° produire et diffuser une affiche à destination des usagers.es ( co construction avec les personnes concernées, les professionnels de santé, les travailleur.eurses sociaux
4° porter un plaidoyer sur la simplification des voies de recours (recommandation à dimension nationale)/ Recommandation également formulé dans le dernier rapport de la DDD évoqué précédemment
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