La commission spéciale qui a examiné le projet de loi (PJL) simplification en début de semaine dernière a supprimé à tour de bras des instances qualifiées de Théodule, qui « ne serviraient à rien » et seraient source de dépenses inutiles. Un ménage un peu grossier, aux motifs qui interrogent sur la connaissance réelle des missions desdites instances.
Après la suppression des CESER, au cœur de la démocratie participative, qui éclaire le travail des élus territoriaux, en relayant la parole et les aspirations de leurs concitoyens, c’est aussi le Haut Conseil pour l’Avenir de l’Assurance Maladie (HCAAM) qui a tout bonnement été rayé de la carte, au prétexte qu’il ferait doublon avec le Conseil Stratégique de l’Innovation en Santé.
Or, le Conseil Stratégique de l’innovation en Santé a pour mission de formuler des propositions sur les innovations du système de santé et d’analyser les « expérimentations article 51 » en vue de leur généralisation, alors que le HCAAM, composée d’une grande diversité d’acteurs, dont les représentants d’usagers, assure un rôle d’évaluation du système d’Assurance maladie et de son évolution, et soumet des propositions pour assurer sa pérennité et sa cohésion. Il a d’ailleurs été saisi par le Premier ministre dans le cadre d’une mission de redressement des comptes sociaux et planche en ce moment même sur des propositions !
Au-delà de ces instances, c’est la santé publique qui est sérieusement mise à mal :
- Alors que les maladies en lien avec une alimentation déséquilibrée constituent un enjeu majeur de santé publique, l’Observatoire de l’alimentation qui permet d’effectuer le suivi de l’augmentation ou de la diminution de la quantité de sucre, de gras ou de sel dans les produits alimentaires a été supprimé ;
- Même sort pour la Commission nationale de la déontologie et des alertes en matière de santé publique et d’environnement, qui veille aux règles déontologiques s’appliquant à l’expertise scientifique et technique. Elle veille également au suivi d’alertes en matière de santé publique et d’environnement et à la protection des lanceurs d’alerte. Avec la suppression de cette instance, sont en jeu l’information impartiale des citoyens et la prévention de menaces pour la santé publique ou l’environnement. Composée de 22 membres experts indépendants et bénévoles, l’économie faite en supprimant cette instance est nulle : sous prétexte de limiter les dépenses, ne serait-ce pas en réalité son indépendance qui dérange ?
- Et alors que l’alcool est la deuxième cause de mortalité évitable avec un coût social de 102 milliards par an, les Commissions communales de débit de boisson sont elles aussi sacrifiées, au moment même où le gouvernement souhaite étendre la délivrance de licence IV aux communes de moins de 3 500 habitants, et que ces commissions permettent un contrôle nécessaire. Par ailleurs, un amendement permettant d’autoriser les producteurs de spiritueux de vendre directement leurs produits sur les marchés a été adopté. Cette disposition pourrait favoriser une consommation excessive et irresponsable d’alcool, en dehors de tout cadre réglementé : ne sont en effet envisagés ni la mise en place d’un mécanisme de contrôle de l’âge (comme pour les bars ou les restaurants), ni une formation obligatoire des débitants de boissons.
France Assos Santé enjoint les députés à voter contre ces dispositions qui menacent la démocratie civile et portent une atteinte grave à la santé publique.