Dans les dents !

Le 8 septembre, la Cour des Comptes a rendu son rapport annuel 2010 sur l’application des lois de financements de la Sécurité sociale. De nombreux dysfonctionnements sont révélés par la juridiction financière chargée de contrôler la régularité des comptes publics, de l’État et de la Sécurité sociale notamment. Ce rapport réserve un sort peu enviable à la situation des soins dentaires en France.
Les constats de la Cour des Comptes sont sans appel :

  • Les perspectives démographiques, pourtant scénarisées et connues de tous, n’ont pas été anticipées, si bien que d’ici 2030 « le nombre de chirurgiens-dentistes, de l’ordre de 41 000 en 2010, devrait diminuer de près du tiers d’ici 2030 ».
  • Les tarifs des actes dans le domaine des soins dentaires n’ont pas encore fait l’objet du codage pourtant prévu par la classification commune des actes médicaux. Résultat : les actes non remboursés par l’Assurance maladie « ne font l’objet d’aucun suivi ».
  • Les dépenses de soins dentaires sont de moins en moins bien remboursées par la Sécurité sociale, non seulement en raison de la « stagnation » des tarifs de responsabilité (part du coût des prestations dont le montant est pris en charge par l’Assurance maladie) mais aussi parce que les actes les plus coûteux ne sont pas du tout remboursés.
  • La dernière convention dentaire a revalorisé les soins conservateurs (traitements de la carie, dévitalisation, détartrage etc.), dont le tarif est opposable sans que les praticiens ne modèrent les prix des soins prothétiques. La Cour précise que les derniers tarifs opposables ont même été supprimés en la matière.

 

La Cour des comptes signale que la conséquence du désengagement de l’Assurance maladie se traduit par un financement de la santé dentaire qui repose de plus en plus sur les organismes complémentaires et propose par suite le « développement de réseaux de professionnels respectant des protocoles qui comportent des garanties quant aux niveaux de prix et de qualité ».

 

Il est d’ailleurs intéressant de remarquer que, lorsque l’Assurance maladie se désengage d’un champ de la prise en charge des soins, leur coût augmente de façon presque systématique et en vient à dépasser de beaucoup la mesure.

 

En matière dentaire, les premiers financeurs des soins sont les organismes complémentaires, mais ils peinent à réguler les usages de la profession tant du point de vue du coût des soins que de leur qualité. Pourtant, ils disposent des moyens de constituer des réseaux de prise en charge des soins dentaires  permettant à leurs assurés un accès à ces soins sans reste-à-charge.

 

Pour quelles raisons ces réseaux ne sont-ils pas davantage promus?
Tout simplement, parce que le principal argument commercial des complémentaires c’est le « Venez chez moi, je rembourse plus que votre actuelle complémentaire ! ». Belle aubaine pour les dentistes qui n’ont aucun intérêt à faire baisser le prix de soins pour lesquels ils ont bien compris que les complémentaires étaient prêtes à payer cher.

 

Dans ces conditions, il y a tout lieu de penser que la régulation du secteur dentaire (mais pas seulement) ne viendra pas des complémentaires santé … en dehors de quelques rares exemples où des assureurs complémentaires se sont regroupés pour faire baisser les devis. Mais ces solutions restent encore très confidentielles.

 

En tout état de cause, les inégalités d’accès aux soins proviennent de l’absence d’engagement de l’Assurance maladie. Elle pourrait réformer aisément ses centres d’examen de santé aujourd’hui désoeuvrés en y intégrant une offre dentaire venant en concurrence avec l’offre libérale.

 

Et puis, si nous réfléchissions d’abord en santé publique plutôt qu’en marchands, tout irait mieux : dans certain pays du Nord, les soins dentaires sont gratuits jusqu’à l’âge de 18 ans. Du point de vue de la santé bucco-dentaire, cela les place au premier rang mondial.

 

Un exemple à suivre…

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