Médecin de nuit, maisons médicales de garde ou pharmacies ouvertes le week-end et à l’occasion d’un jour férié… En France, plusieurs dispositifs permettent de bénéficier de soins en dehors des périodes ouvrables. Organisée par les Agences régionales de Santé (ARS), la permanence des soins s’avère parfois complexe et fait intervenir différents acteurs qu’il n’est pas toujours évident de décrypter pour l’usager. Explications.
La permanence des soins ambulatoires est définie dans le décret n°2010-809 du 13 juillet 2010. Elle comporte plusieurs dispositifs de soins mis à la disposition des patients en dehors des périodes ouvrables (nuit, week-end, jours fériés).
Accès à un médecin de garde, au centre 15, à une pharmacie de garde, à un chirurgien-dentiste…
La permanence des soins entend répondre aux besoins de soins non programmés, tous les jours de 20 h à 8 h, le samedi à partir de midi ainsi que les dimanches et jours fériés de 8 h à 20 h. La loi Hôpital, Patients, Santé et Territoires (HPST) du 21 juillet 2009 a confié aux Agences régionales de Santé (ARS) l’organisation de la permanence des soins sur leur territoire.
Ainsi, indique le décret, chaque région « est divisée en territoires de permanence des soins dont les limites sont arrêtées par le directeur général de l’ARS selon les principes d’organisation définis dans le cahier des charges régional ». Ces documents, disponibles sur le site des différentes agences, informent sur les dispositifs mis en place dans chaque région pour assurer la permanence des soins.
Comment accéder à un médecin de garde (nuit, week-end, jour férié…) ?
Depuis 2002 et une longue grève des médecins de garde, ils ne sont plus tenus d’assurer la permanence des soins la nuit, le week-end et les jours fériés. Le système de garde s’appuie désormais sur le volontariat, chaque médecin étant rémunéré par l’Assurance maladie sous la forme d’un forfait d’astreinte (de 50 à 150 € selon la période d’astreinte).
Dans un rapport de 2013, la Cour des comptes a publié les résultats d’une enquête menée dans trois régions françaises. Couplée à l’examen des cahiers des charges obtenu auprès des ARS, cette enquête démontre que ce « brusque changement de modèle intervenu en 2002, n’a pas fini de faire sentir ses effets », que ce soit « par l’instabilité et la fragilité des systèmes mis en place ou par l’explosion des dépenses qui en résulte ». De fait, en 2012, l’Assurance maladie a dépensé 700 millions d’euros pour le poste de la permanence des soins (PDS), soit trois fois plus qu’en 2001.
Permanence des soins : des médecins de moins en moins volontaires
En avril 2015, le Conseil national de l’Ordre des médecins (Cnom) a publié la 12e édition de son rapport annuel sur la permanence des soins chez les médecins généralistes, notamment la nuit. Principal enseignement de cette étude, menée auprès des 100 conseils départementaux de Métropole et d’Outre-Mer : l’année 2014 a connu une progressive érosion du volontariat qui se traduit par une absence de service au-delà de minuit dans de nombreux départements.
« En 2014, seuls 60% des départements rapportent un taux de médecins généralistes volontaires supérieur à 60% (contre 73% des départements en 2012). La démographie en baisse, la surcharge de travail, la recherche d’une meilleure qualité de vie et la baisse de l’intérêt pour l’exercice libéral sont autant de facteurs qui engendrent des tensions sur la continuité de la PDS » pointe le Cnom. De plus, en 2014, « 285 territoires tournent avec moins de 6 volontaires pour assurer la PDS ». Sans médecin de nuit, les patients n’ont alors pas d’autres choix que de se rendre aux urgences ou à défaut de prendre leur mal en patience…
Le centre 15 : une plateforme d’orientation pour la permanence des soins
Urgence médicale ou besoin d’ un conseil rapide ? Le 15 (appel gratuit à partir d’un téléphone fixe ou mobile) vous met en relation, de jour comme de nuit, avec un médecin régulateur. Le rôle de ce médecin consiste à filtrer les appels (jour, nuit, week-end, jour férié) et à prodiguer des conseils médicaux. En cas de besoin, il oriente les patients vers le dispositif le plus approprié à leur état de santé (envoi d’un médecin, d’une ambulance, redirection vers un service d’urgence hospitalier, une maison médicale de garde ou vers une pharmacie de garde). Cet appel peut également être adressé à la plateforme téléphonique d’une association de permanence des soins.
Dans 3 régions, un numéro pour joindre un médecin de garde aux heures de fermeture des cabinets médicaux
Le 116 117 est le nouveau numéro gratuit, opérationnel depuis avril 2017 dans 3 régions – les Pays-de-la-Loire, la Corse et la Normandie -, Marisol TOURAINE, ministre des Affaires sociales et de la Santé, ayant inscrit dans la loi de modernisation de notre système de santé la création d’un numéro de téléphone national et gratuit pour simplifier les démarches des Français en dehors des heures d’ouverture des cabinets médicaux. Composer le 116 117, en Payse-deLoire, COrse ou Normandie, pour joindre un médecin généraliste de garde aux heures de fermeture des cabinets médicaux : tous les soirs après 20h, le week-end à partir du samedi midi et les jours fériés. Réservé aux urgences graves, le 15 reste disponible 7j/7 et 24h/24. En cas de doute sur la gravité de la situation, il faut continuer de composer le 15. A noter que le déploiement national de ce dispositif est prévu d’ici fin 2017.
Les maisons médicales de garde : une solution urbaine
Dans nombre de grandes villes, la permanence des soins est assurée au sein de maisons médicales de garde où se relaient à tour de rôle des médecins, généralistes pour la plupart. Les coordonnées des maisons médicales de garde sont aisément disponibles en ligne. Attention, les tarifs pratiqués hors des périodes ouvrables (nuit, week-end, jour férié) sont plus élevés que ceux d’une consultation classique. Retrouvez dans le tableau suivant, six cas de figure différents.
Permanence des soins : les tarifs et le taux de prise en charge d’une consultation de garde (sous réserve d’une orientation par le médecin régulateur, centre 15 par ex.)
Période de prise en charge |
Tarif facturé |
Remboursement |
Consultation au cabinet du médecin |
||
De 20h à minuit | 65,5 € | 79% |
De minuit à 8h | 74,5 € | 84% |
Dimanche et jours fériés | 49,5 € | 76% |
/ |
Visite à domicile du médecin * |
|
De 20h à minuit | 69 € | 82% |
De minuit à 8h | 82,5 € | 81% |
Dimanche et jours fériés | 53 € | 83% |
Source : Assurance maladie
(*) Dans le cas où l’état de santé du patient ne justifie pas le déplacement du médecin, les tarifs appliqués peuvent être plus élevés.
Comment accéder à une pharmacie de garde (nuit et jour férié) ?
L’organisation de la garde des pharmacies est une mission qui revient aux syndicats représentatifs de la profession. Dans chaque région, les représentants locaux du syndicat majoritaire sont responsables de la mise en œuvre du dispositif de garde sous la houlette de la préfecture qui peut, par exemple, décider de réquisitionner les pharmaciens si leur nombre n’est pas suffisant pour assurer la permanence des soins.
Selon la région et le syndicat qui s’y trouve majoritaire, l’usager qui souhaite connaître les coordonnées des pharmacies de garde à proximité de chez lui est invité à composer différents numéros de téléphone :
- à notre gauche, la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) qui depuis plusieurs années a mis en place le 3237,
- à notre droite, l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) avec le 3915.
Obtenir les coordonnées de la pharmacie de garde la plus proche vous coûtera 34 centimes d’euros la minute depuis une ligne fixe en composant ces numéros… pour un résultat parfois assez décevant !
Le service proposé par la FSPF, aussi disponible en ligne et donc gratuit (voir plus bas la rubrique « Se documenter »), est beaucoup plus étendu que ne l’est celui de l’USPO. Dans certains endroits, les deux se chevauchent. C’est le cas par exemple à Lyon où un testing de nuit des deux services nous a permis d’identifier les coordonnées de trois pharmacies de garde.
Trouver une pharmacie de garde : un dispositif variable selon les régions
Le bilan est moins concluant dans une autre ville de province où, la nuit, le 3237 renvoie automatiquement au commissariat pour des raisons de sécurité ! « Désolé, je sais qu’ils sont pénibles avec ça, mais je ne peux vous donner aucunes coordonnées en matière de pharmacie de garde, indique cet agent de police joint par 66 Millions d’Impatients. Il faut que vous passiez au commissariat ». Dans ce cas-là, l’usager doit s’y rendre muni d’une ordonnance. Le montant de la communication surfacturée reste évidemment dû.
Le Code de la Santé publique impose par ailleurs aux pharmaciens d’indiquer dans la vitrine de leur pharmacie les coordonnées de leurs confrères assurant la garde. Dans les bassins où le passage par la case commissariat a été décidé, la nuit en zone urbaine notamment, cette « obligation tombe », indique-t-on à l’USPO.
A Rennes, par exemple, seules seront indiquées les coordonnées des pharmacies de garde le dimanche et les jours fériés. Dans tous les cas et notamment pour la nuit, le centre 15 devrait être en mesure de vous informer sur la marche à suivre afin d’identifier la pharmacie de garde située à proximité de chez vous.
Le financement de la permanence des soins pharmaceutiques
Pour financer les périodes de garde au sein d’une pharmacie (jour férié, nuit), l’Assurance maladie verse une indemnité d’astreinte aux pharmaciens. Son montant est fixé à 150 €.
Les pharmaciens sont par ailleurs autorisés à facturer un forfait de délivrance allant de 2 € (de 19h30 à 20h00) à 5 € (le dimanche et les jours fériés) et jusqu’à 8 € entre 20h00 à 8h00. Ce montant est pris en charge à la discrétion des caisses primaires d’Assurance maladie en fonction de leur évaluation du caractère d’urgence de la dispensation. Et sous réserve que le patient soit en mesure de produire une ordonnance.
«Ces honoraires ne pourront être perçus », indique la convention passée entre les pharmaciens d’officine et l’Assurance maladie, « que si les produits de santé sont délivrés en dehors des heures normales d’ouverture ». Ainsi, une pharmacie qui se déclare ouverte la nuit ou une partie de la nuit ne pourra pas exiger ces honoraires.
Les chirurgiens-dentistes et la permanence des soins
Comme les pharmaciens et au contraire des médecins, les chirurgiens-dentistes sont tenus par leur code de déontologie (Article 4127-245) d’assurer la permanence des soins : « Il est du devoir de tout chirurgien-dentiste de prêter son concours aux mesures prises en vue d’assurer la permanence des soins et la protection de la santé. Sa participation au service de garde est obligatoire ».
L’organisation du dispositif de permanence des soins est assurée localement par les conseils départementaux de l’Ordre des chirurgiens-dentistes. Ces gardes sont assurées le dimanche et les jours fériés mais pas la nuit.
Une garde en cabinet ou à l’hôpital
« En matière de soins dentaires, on considère qu’il n’y a pas d’urgence vitale et que les gardes nocturnes n’ont pas lieu d’être », explique Catherine Mojaïsky, présidente de la Confédération nationale des syndicats dentaires, principale organisation représentative de la profession. Les chirurgiens-dentistes assument la garde dans leur propre cabinet, au tarif prévu par la Sécurité sociale. Dans certains départements, pour des raisons de sécurité, la permanence des soins a lieu dans un centre hospitalier qui met à disposition du praticien de garde le plateau technique dont il a besoin.
En général, c’est le répondeur du conseil départemental de l’Ordre, les forces de l’ordre ou les pharmacies qui orientent le grand public vers les praticiens de garde. « Notre objectif, à terme, est de parvenir à faire en sorte que l’information aux patients soit centralisée par le Centre 15 », indique Catherine Mojaïsky.
Les urgences : en cas d’absolue nécessité
Les urgences doivent autant que possible traiter des cas nécessitant des soins non programmables qui peuvent entraîner des séquelles s’ils ne sont pas traités en temps et en heure.
La difficulté à trouver un médecin de garde (nuit, jour férié) ou un spécialiste peut cependant pousser les patients à s’orienter vers un service d’urgences (public ou privé) alors que leur état ne le nécessite pas. Cette solution n’est souhaitable ni d’un point de vue individuel (une attente inutile qui se solde par une simple consultation), ni d’un point de vue collectif (engorgement des services d’urgence).
Le bon réflexe : appeler le 15 afin de parler à un médecin régulateur qui décidera de l’option la plus adaptée (pharmacie de garde, maison médicale, médecin de nuit…) à l’état de santé du patient selon les informations fournies.
Se documenter…
- Décret n°2010-809 du 13 juillet 2010 sur le site Légifrance
- Portail des Agences régionales de santé
- La Sécurité sociale : rapport sur l’application des lois de financement de la Sécurité sociale, Cour des comptes, septembre 2013.
- L’état des lieux de la permanence des soins en médecine générale au 31 décembre 2013, Conseil national de l’Ordre des médecins, février 2014.
- Le site SOS gardes de l’Union des syndicats des pharmaciens d’officine (USPO)
- Le site Résogardes 3237 de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) permet de retrouver dans certains départements les pharmacies de garde.
- Arrêté du 4 mai 2012 portant approbation de la convention nationale organisant les rapports entre les pharmaciens titulaires d’officine et l’Assurance maladie sur le site de Légifrance
- Code de déontologie des chirurgiens-dentistes
UNE QUESTION JURIDIQUE
OU SOCIALE LIÉE A LA SANTÉ ?
Santé Info Droits est une ligne d’informations juridiques et sociales constituée de juristes et avocats qui ont vocation à répondre à toutes questions en lien avec le droit de la santé.
Mon épouse est allée consulter en urgence un médecin généraliste hier, samedi 22 août, à la maison de santé de Dieppe (76). Cela lui a coûté 44.06 €. Nous trouvons ce tarif exorbitant. Ne pourrait-il pas y avoir des permanences de médecins généralistes le weekend au tarif habituel ?