Bien que la dernière réforme sur les génériques, visant à accroître encore leur utilisation, était bel et bien annoncée au 1er janvier 2020, elle devait faire suite à un plan de communication, pour permettre aux patients de bien s’y préparer. Cependant, l’application de l’arrêté qui encadre l’article 66 de la loi de financement de la sécurité sociale 2019, est passée sans tambour, ni trompette, laissant les malades parfois extrêmement désemparés.
Ainsi, si jusqu’ici il était laissé à l’appréciation des médecins, de mentionner sur leurs ordonnances, qu’un médicament prescrit était éventuellement « NON SUBSTITUABLE » (NS), ils ont désormais une marge de manœuvre réduite et doivent justifier cette mention.
En outre, depuis le 1er janvier, les princeps ne seront remboursés que sur la base du plus cher de ses génériques. Cela s’ajoute à l’ancienne mesure incitative appelée « tiers payant contre générique » qui bloquait l’accès au tiers payant aux patients désirant obtenir le médicament non générique.
Où placer la limite des génériques ?
Il n’est pas question de remettre en cause les génériques qui sont des très bons médicaments et font faire d’importantes économies à l’Assurance maladie et donc à la collectivité. Beaucoup de malades y ont adhéré sans problème ces dernières années, mais de nombreux patients, sous traitement long ou à vie, se battent et tâtonnent avec leur médecin pour trouver LE médicament qui leur convient le mieux. S’il s’agit d’un princeps, est-il acceptable qu’il ne soit pas remboursé comme les autres médicaments ?
Gilles Bonnefond, président de l’Union de syndicats de pharmaciens d’officine déclare :
« Même s’il faut effectivement renforcer le « NON SUBSTITUABLE » légitime, il faut aussi permettre d’ouvrir une discussion entre médecins, pharmaciens et patients, car ces derniers peuvent rencontrer des problèmes qui ne sont pas purement scientifiques. Certains vivent mal les changements de traitements et il serait injuste de les pénaliser financièrement. Cela dit, il faut soutenir les génériques et sortir du débat des excipients. Les contre-indications à un excipient à effet notoire sont très rares et surtout ces excipients sont finalement plus courants dans les princeps que dans les génériques dont les formules sont plus récentes. »
Ainsi chez France Assos Santé, qui regroupe 85 associations nationales de patients, les premiers témoignages sur l’application de la réforme sont déjà arrivés…
En effet Marie nous dit avoir déjà écrit au Ministère de la santé pour leur demander une aide pour payer tous les princeps de son ordonnance puisqu’elle est intolérante à certains génériques. Pierre quant à lui nous a exposé son intolérance aux génériques et que pour conserver les princeps de son traitement, cela lui coûtait 400€/mois. Enfin Myriam, greffée rénale depuis 2009, nous a écrit : « Je prends quotidiennement 17 médicaments et voilà que brutalement, on me change pratiquement la totalité en génériques, sans que mon médecin ne puisse s’y opposer. Qu’en est-il en cas de problèmes, d’effets secondaires ? A quel médicament faudra-t-il les attribuer ? Et comme les génériques sont presque tous pareils, sans différenciation de formes, ni de couleurs, comment savoir si j’en ai oublié un ? ».
Être ou ne pas être substituable…telle est la question
La mention « NON SUBSTITUABLE » sur les ordonnances est passée de 2% à 9% entre 2012 et 2019, ce qui prouve que c’est utile à certains patients. Cependant, dorénavant, ce n’est plus en consultation médicale que se décidera ou non le bien fondé de ne pas remplacer un princeps par son générique puisque pour la très grande majorité des médicaments, ce sont les politiques qui ont tranché et ce sera génériques pour tous !
Il existe désormais seulement trois cas où les médecins, à condition de la justifier, pourront maintenir la mention « NON SUBSTITUABLE » :
- Pour les patients stables, traités avec certains médicaments non génériques dits « à marge thérapeutique étroite » ;
- Pour les enfants de moins de six ans, lorsqu’aucun médicament générique n’a une forme galénique adaptée à leur cas ;
- En cas de contre-indication formelle à un excipient à effet notoire présent dans tous les génériques et absent dans le non générique.
Sur cette réforme, les docteurs Boyer et Morali du Conseil national de l’Ordre des médecins, défendent bien entendu la liberté de prescription de leurs confrères, dans l’intérêt de leurs patients. Par rapport au cadre de l’arrêté, ils retiennent aussi quelques points de vigilance : « On peut espérer que cette réglementation sera évolutive et appliquée avec la souplesse qui convient. Il est nécessaire d’être attentif pour les patients qui pourraient être perturbés par les changements de formes galéniques de leurs médicaments avec un risque d’erreurs dans la prise de leur traitement, d’autant plus qu’il arrive que, selon leurs stocks, les pharmaciens soient parfois contraints de délivrer des marques de génériques différentes d’un mois sur l’autre. Il serait également intéressant que la liste des médicaments à marge thérapeutique étroite soit réévaluée. »
Yann Mazens, Conseiller technique produits et technologies de la santé chez France Assos Santé regrette le manque d’informations préalables à la mise en œuvre de cette nouvelle mesure, votée pourtant en décembre 2018 et dont l’incompréhension nourrit la méfiance à l’égard des médicaments génériques. Le problème principal pour les personnes malades ne concerne pas les médicaments génériques mais les changements de médicaments en général, qu’ils s’agissent de génériques ou de princeps.
France Assos Santé souhaite que des mesures correctrices soient mises en œuvre notamment avec une réévaluation de la liste des médicaments à marge thérapeutique étroite qui doit être établie avec l’ensemble des parties prenantes, incluant les sociétés savantes et les associations de patients. Il est également nécessaire de mettre en œuvre une stabilité de la prescription des médicaments génériques, telle qu’elle est actuellement proposée pour les personnes de plus de 75 ans.
Avec le remboursement sur la base du générique le plus cher, et la restriction du « NON SUBSTITUABLE », la loi entérine clairement une médecine à deux vitesses, où seuls les plus riches peuvent choisir le traitement qui leur convient le mieux.
* Les docteurs Boyer et Morali sont respectivement Président de la section Santé Publique et délégué général aux relations internes du Conseil national de l’Ordre des médecins.
cette loi montre bien une médecine à deux vitesses, une pour les riches et une pour les « pauvres ». Liberté, égalité !!!! cela n’existe plus en France ! alors je propose la chose suivante : puisque les génériques ont soit disant fait leur preuve (j’en doute fortement), que les princeps soient retirés du marché pharmaceutique ! ainsi les laboratoires de grands renoms seront obligés de fabriquer leur « génériques », pourquoi ne pas vendre le princeps avec la mention GE dans le nom des médicaments, baisser leur marge …
A bon entendeur !