Santé mobile : la labellisation en marche

Santé mobile : la labellisation en marche. 3 questions à Guillaume Marchand, fondateur du label mHealth Quality

L’appli que vous vous apprêtez à télécharger est-elle digne d’intérêt ? Les informations restituées sur votre smartphone sont-elles fiables ? Êtes-vous certain que vos données de santé ne sont pas espionnées ?

Pour permettre aux utilisateurs de séparer le bon grain de l’ivraie, Guillaume Marchand, médecin psychiatre de son état, fonde en 2012 dmd Santé, une plateforme d’évaluation collaborative des applications mobiles et des objets connectés dédiés à la santé.

Fin 2015, il affine son projet et lance mHealth Quality, premier label qualité en santé mobile. Depuis septembre dernier, la plateforme de labellisation est pleinement opérationnelle. Le point avec Guillaume Marchand sur ses premiers mois de fonctionnement. 

« Le but de cette démarche est de mettre en lumière des outils à la fois pertinents du point de vue médical, conformes à la loi et validés sur le terrain par les utilisateurs ».

Pourquoi ce dispositif de labellisation de la santé mobile ?

Nous avons eu très tôt l'idée de labelliser, mais ce n'était pas pertinent de le faire à notre lancement, car le marché n'était pas suffisamment qualitatif. Il n'y aurait eu que deux ou trois applications labellisées. Sauf que depuis, le marché des applis (dont le nombre est passé de 160 000 à 260 000 en 2016) et des objets connectés dédiés à la santé a explosé. La nécessité de proposer un dispositif plus robuste méthodologiquement que la plateforme initialement lancée par dmd Santé s’est imposée.

A la question de la pertinence médicale qu’on avait partiellement résolue avec l’évaluation par des confrères et des patients, se posent maintenant celles de l’usage et de la sécurité dans le traitement des données (en gros : où vont les données ?) et du statut de l’appli qui, parfois, peut être considérée comme un dispositif médical (DM). Auquel cas, il convient de l’évaluer en tant que tel.

En quoi consiste concrètement votre démarche ?

La labellisation mHealth Quality propose aux éditeurs de s’auto-évaluer en ligne au moyen d’un questionnaire multithématique inspiré notamment des référentiels de la Haute Autorité de Santé ou encore des recommandations de la CNIL et d’obtenir un feed-back gratuit et complet. Ce questionnaire permet de valider la pertinence médicale, la conformité juridique et règlementaire et les aspects éthiques de l’outil. Suite à cette étape, seules les applis ayant obtenu le seuil minimal imposé tout en évitant les critères éliminatoires (l’absence de conditions générales d’utilisation est par exemple rédhibitoire) sont retenues. C’est ce même questionnaire qui a servi à sélectionner les applis mises à l’honneur à l’occasion des trophées de la santé mobile que dmd Santé a organisé récemment (lire ci-dessous).

Dans un deuxième temps, sur un modèle payant cette fois, mHealth Quality propose un audit sur la sécurité informatique des données, une relecture de l’auto-évaluation menée en amont par deux experts chez dmd Santé et une évaluation de la valeur d’usage par des patients et professionnels de santé rémunérés (ce qui n’était pas le cas auparavant). Des tests dans des laboratoires métrologiques (qui certifient la précision des capteurs) sont également prévus pour évaluer la fiabilité des données générées par les objets connectés. Le but est clairement de mettre en lumière des outils à la fois pertinents du point de vue médical, conformes à la loi et validés sur le terrain par des utilisateurs.

Comment les acteurs de la santé mobile ont-ils accueilli l’initiative mHealth Quality ?

Depuis le lancement de notre plateforme l’année dernière, 134 éditeurs sont passés entre les fourches caudines de notre outil d’auto-évaluation. 60 % des applications mobiles ayant entrepris cette démarche ont franchi l’auto-questionnaire avec succès, 20 % ont été recalées et plus de 20 % sont encore de nouveau en cours d’évaluation. Ce processus d’auto-évaluation est souvent l’occasion pour les éditeurs de s’apercevoir des failles de leur produit et de les modifier afin de mieux coller à nos critères d’évaluation et aux attentes des usagers.

A ce jour, une cinquantaine d’entre eux ont également candidaté à la deuxième étape de la labellisation mHealth Quality. Sur ce nombre, 20 ont déjà obtenu la labellisation, 20 sont toujours en phase d’examen (ils devraient être labellisés à la mi-mars) et 10 autres ne l’obtiendront à priori pas.

En général, les applis sont retoquées parce que l’intérêt qu’elles présentent ne saute pas aux yeux de nos évaluateurs. Parmi les questions qui leur sont posées : seriez- vous prêt à payer pour cet outil ou est-ce que vous en parleriez à vos confrères ou aux patients qui sont concernés par la pathologie ? En cas de réponse négative, le label ne sera généralement pas accordé.

Quels sont les chantiers en cours pour l’année à venir ?

On travaille avec deux Agences régionales de santé (ARS) afin de confronter notre modèle d’évaluation à la réalité des patients. Le premier gros chantier est celui qu’on mène avec l’ARS Centre Val-de-Loire qui trouve son origine dans un projet de télésurveillance des patients atteints d’une insuffisance cardiaque.

Quatre types d’objets connectés sont au cœur de ce dispositif : balance, tensiomètre, podomètre et oxymètre de pouls. L’objectif du partenariat est donc d’élaborer une grille d’évaluation pour chaque type d’objet connecté utilisé dans le cadre de ce programme. Et de tester ces objets avec les professionnels et les patients afin de valider leur utilité dans des conditions réelles d’utilisations.

A terme, on souhaite aussi mettre en place une plateforme, un « hub », disponible en open source, qui permettrait aux différents acteurs intéressés à l’évaluation des outils de santé mobile, y compris à l’étranger, de partager leur expertise. Et d’œuvrer collectivement, en toute transparence, à ce que les solutions proposées aux utilisateurs améliorent effectivement leur qualité de vie.

Le meilleur de la santé mobile

La quatrième édition des trophées de la santé mobile s’est tenue à Paris le 28 janvier dernier. A l’occasion de cet événement, 7 applis santé et 1 objet connecté ont été récompensés après sélection par un jury composé de professionnels de santé et d’utilisateurs.

Gestion de la douleur, suivi du diabète, échange entre professionnels de santé, hygiène buccodentaire, sevrage tabagique… Diverses problématiques sont adressées par les outils connectés présents dans le palmarès de cette année, dont une description détaillée peut être retrouvée ici.

Pour sa sélection, le jury s’est appuyé, pour partie, sur le protocole de labellisation mHealth Quality, développé par dmd santé, la start-up à l’instigation de cette soirée Plus d’une quarantaine d’applis ont postulé pour figurer dans le palmarès final.

La première étape de sélection a consisté en une évaluation portant sur des aspects juridiques, de pertinence médicale et d’éthique que les éditeurs d’applis étaient invités à réaliser eux-mêmes en répondant à un questionnaire (voir, ci-dessus, l’interview de Guillaume Marchand). 

Pour la seconde étape, les 9 membres du jury ont été invités à noter de 1 à 10 chacune des applications mobiles de santé candidates sur la base de trois critères : intérêt de l’application vis-à-vis de la population cible, qualité de la réalisation (ergonomie, facilité d’usage) et ressenti personnel quant à l’opportunité de figurer dans le palmarès final.

Chaque application s’est donc vue attribuer par le jury une note sur 50. Cette dernière est ensuite additionnée à la note globale reçue lors de l’auto-questionnaire permettant d’établir le palmarès final des Trophées de la Santé Mobile.

2 commentaires

  • Abaq dit :

    Bonjour, en complément de votre interview, les patients intéressés pourront trouver des informations complémentaires en parcourant le référentiel HAS de bonnes pratiques sur les applications et les objets connectés en santé, téléchargeable ici : http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2016-11/has_ref_apps_oc.pdf Sa lecture est riche d'enseignement, car on s'aperçoit, en confirmation de votre article, que des critères qui pourraient sembler évidents sont loin d'être respectés par nombre d'applications. Bonne journée.

  • charlestrojani dit :

    Bonjour !
    Du colloque singulier : Patients avec praticiens de santé au colloque pluriel, grâce aux actes authentiques électronique de la télé administration publique de notre République numérique, se conçoit bien.

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