Prix Prescrire : focus sur les lauréats 2016

L’édition 2016 du Prix Prescrire a distingué trois ouvrages traitant respectivement de la communication soignant/patient, des débats qui ont animé l’adoption de la loi sur l’IVG et des soins aux migrants en situation de précarité. Présent à l’événement, 66 Millions d’IMpatients en livre un compte-rendu.

La revue Prescrire a présenté récemment une sélection d’ouvrages primés dans le cadre de son prix 2016. Cet événement organisé par la revue médicale indépendante depuis 1989 vise à distinguer des écrits « sur lesquels on peut compter pour améliorer l’information en santé des soignants et du public ».

Cette année, le jury, composé des membres de la rédaction de Prescrire, a sélectionné trois ouvrages : un premier portant sur la communication professionnelle en santé, un deuxième qui rassemble des textes rédigés entre 1971 et 1975 témoignant de la virulence des débats entourant l’adoption de la Loi Veil et un troisième sur les soins et l’accompagnement des migrants, véritable guide pratique à l’intention des professionnels du secteur médico-social.

La communication professionnelle en santé (1)

Déjà primé en 2005 par la revue Prescrire lors de la publication de sa première édition, cette épaisse production rassemble des bases théoriques et un abondant matériau pédagogique pour améliorer les compétences des soignants en communication. « En France comme ailleurs, la communication professionnel en santé demeure peu enseignée, a expliqué lors de la remise du Prix Prescrire, Pierrick Fostier, médecin généraliste qui a participé à la conception de cet ouvrage. Notre travail entend apporter des réponses autant théoriques que pratiques sur les méthodes de communication ayant fait leurs preuves ».

Au total, 60 auteurs, dont 12 exerçant en Europe, se sont relevés les manches pour la rédaction sous la coordination de Claude Richard spécialiste québécois en communication patient-médecin et auteur d'articles scientifiques en santé, et Marie-Thérèse Lussier, médecin de famille à la Clinique de médecine familiale de la Cité de la santé de Laval (Québec) et professeure agrégée au département de médecine de famille et de médecine d'urgence à l'Université de Montréal. Parmi les auteurs, des médecins, donc, mais aussi des pharmaciens, des psychologues ou encore des sociologues.

« La plus grande partie de l’ouvrage (son sommaire peut être consulté en ligne), explique Prescrire, aborde, à l’aide d’exemples commentés, des situations communicationnelles parmi les plus courantes (enfants, adolescents, personnes âgées, ndlr) et/ou difficiles (soins palliatifs, plaintes médicalement inexpliquées, patients vivant dans la pauvreté, ndlr), selon diverses caractéristiques des patients, selon divers contextes et aussi entre professionnels de santé (…). Un ouvrage à lire au fil des besoins, assis à une table, conclut Prescrire, ou en version numérique en ligne, qui offre en outre l’accès à un moteur de recherche ».

Ils ne décideront plus pour nous ! Débats sur l’IVG : 1971-1975 (2)

17 janvier 1975, la loi autorisant sous certaines conditions l’interruption volontaire de grossesse (IVG), dite aussi loi Veil, est votée. L’ouvrage primé par Prescrire a été publié à l’occasion du 40ème anniversaire de cet événement. Il se présente, après une mise en perspective du contexte de l’époque sous la forme d’un recueil de 19 textes, pétitions, articles de presse, discours et prises de positions publiés entre 1971 et 1975.

Ce recueil démarre avec le « Manifeste des 343 salopes » paru dans Le Nouvel Observateur en 1971 et signé de la main de 343 femmes réclamant l’accès à un avortement libre et gratuit. Il termine avec la déclaration de Simone Veil à l’Assemblée nationale le 26 novembre 1974. Les textes publiés par ailleurs témoignent de « la virulence des débats de l’époque et rappelle que ce droit reste fragile ».

Pour l’auteure, Anne-Cécile Mailfert, porte-parole et présidente d’Osez le féminisme, « si la loi Santé a permis de substantiellement améliorer l’accès à l’IVG avec la suppression du délai de réflexion et l’autorisation accordée aux sages-femmes de pratiquer les interruptions médicamenteuses, on voit qu’ailleurs le débat est loin d’être clos ». Référence au dépôt d’une proposition de loi (rejetée depuis) au Parlement  polonais visant à interdire l’IVG.

Et la jeune femme de rappeler également la récente polémique qui a suivi l’annonce d’une consultation par l’Ordre des pharmaciens quant à la possibilité d’instaurer dans le code de déontologie de la profession (en cours de dépoussiérage) une clause de conscience dont il était fort à craindre qu’elle aurait permis à certains professionnels de se dédire de leur obligation de délivrance des traitements de contraception d’urgence. Là encore, le soufflé est retombé et la mesure n’a pas été adoptée.

Anne-Cécile Mailfert n’en demeure pas moins méfiante. Le droit d’avorter reste précaire. « Il n’est même pas protégé par la Constitution. La mobilisation des femmes doit rester forte afin de contenir l’action des réactionnaires contre l’IVG », a-t-elle martelé lors de la remise de son prix.

Migrants/ étrangers en situation précaire – Soins et accompagnement. Guide pratique pour les professionnels (3)

Ce guide a été rédigé afin d’éclairer les soignants non seulement sur les problèmes de santé les plus fréquents rencontrés par les personnes migrantes ou étrangères en situation de précarité mais aussi pour les aider à faire face à une demande souvent associée de soutien, d’accès aux soins ou encore de conseils juridiques.

De fait, la connaissance des aspects médicaux, psychologiques, sociaux et administratifs du parcours de ces patients est déterminante dans les soins et l’accompagnement qui peuvent leur être proposés, estiment les auteurs de cet ouvrage.

« Une des richesses de ce guide, fait valoir la revue Prescrire, est d’apporter de nombreuses informations médico-sociales difficiles à trouver ailleurs, par exemple : l’intérêt et les limites d’un bilan de santé en fonction de la situation et de l’origine géographique de la personne ; les précautions à prendre pour la rédaction des certificats médicaux en vue d’une demande d’asile ou d’une demande de séjour pour étranger malade ; les conséquences physiques et psychologiques des mauvais traitements (tortures, violences, mutilations sexuelles, mariage forcé, etc.) ; les possibilités d’accès aux dispositifs des soins urgents et vitaux pour les personnes dépourvues de droit à l’Aide médicale d’Etat (AME). »

L’ouvrage, édité par le Comité pour la santé des exilés (Comede) comporte 70 articles classés en 19 chapitres ventilés en quatre parties principales : repères, droits et soutien, accès aux soins, soins et prévention. La version primée par la revue Prescrire est la cinquième édition du guide publié une première fois en 2003. Elle peut être téléchargée gratuitement en ligne sur le site de (feu) l’Institut national de prévention et d’éducation en santé (Inpes).

 

  • (1) Richard C et Lussier M-T, La communication professionnelle en santé 2e édition, Editions du Renouveau pédagogique Inc. (ERPI), Montréal (Québec, Canada) 2016 : 828 pages, 89 €.
  • (2) Mailfert A-C, Ils ne décideront plus pour nous ! Débats sur l’IVG : 1971-1975 Les petits matins, Paris 2015 : 160 pages, 9,90 € (2)
  • (3) Comité pour la santé des exilés (Comede), Migrants/ étrangers en situation précaire – Soins et accompagnement. Guide pratique pour les professionnels, Le Kremlin Bicêtre 2015 : 536 pages

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