Prothèses PIP : peu convaincante proposition d’indemnisation amiable par l’assureur

Dossier PIP – Chronique d’une tromperie trop longtemps ignorée

C’est en 2010 que les pouvoirs publics ont véritablement pris la mesure du scandale. Retour sur les grandes dates ayant animé cette affaire depuis la découverte de l’escroquerie.

 

2010 – L’alerte est donnée

 

Les signalements de ruptures prématurées se multiplient en France et à l’étranger. Le gel utilisé dans les implants PIP n’est pas celui déclaré. Pire, ce n’est pas même un gel de qualité médicale mais un gel industriel beaucoup moins cher. Cette tromperie aurait permis à l’entreprise d’économiser des centaines de milliers d’€ en coût de production.

17 mars 2010 – Inspection de l’Agence française de Sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps, depuis renommée Agence nationale de sécurité du médicament [ANSM]) dans les locaux de la société Poly Implant Prothèse (PIP). C’est alors que la fraude est découverte.

30 mars 2010 – L’Afssaps annonce le retrait de la mise sur le marché des prothèses incriminées et recommande aux femmes qui en sont porteuses de consulter leur chirurgien.

30 septembre 2010 – Le ministère de la Santé annonce que les frais liés à l’extraction des prothèses PIP seront pris en charge par la collectivité. Pour les femmes ayant eu recours à ces prothèses dans le cadre d’une reconstruction suite à un cancer (seulement 20 % des victimes), cette prise en charge comprend aussi le remplacement de la prothèse.

19 novembre 2010 – l’Association de défense des femmes porteuses de prothèses PIP (Association PPP), porte plainte contre TÜV Rheinland, l’organisme certificateur qui a renouvelé, chaque année, les certificats de conformité à la société PIP.

2011 – Les incidents se multiplient

Le gel trafiqué des prothèses PIP fragilise l’enveloppe de l’implant, ce qui explique le nombre élevé de ruptures. En outre, ce gel se répand plus facilement que les gels homologués, et induit un risque de migration dans l’organisme, notamment au niveau des ganglions lymphatiques, qui se trouvent sous les aisselles.

23 décembre 2011 – Les autorités françaises recommandent aux porteuses d’implants PIP, de les faire retirer à titre préventif. A ce stade, 8 cas de cancer ont été signalés chez des femmes porteuses des implants défectueux.

24 décembre 2011 – La Caisse nationale d’Assurance maladie annonce son intention de porter plainte contre X pour « tromperie aggravée et escroquerie ».

27 décembre 2011 – Les autorités sanitaires américaines (FDA) font état de « graves violations » dans le processus de fabrication constatées dès 2000, suite à une inspection de ses enquêteurs dans l'usine de PIP.

30 décembre 2011 – L’Afssaps annonce que 20 femmes porteuses de prothèses PIP ont développé un cancer. A ce jour, aucun Lien de cause à effet n’a été établi.

2012 – Le début des procédures

Malgré une rémunération estimée à 300 000 € annuels, Jean-Claude Mas, fondateur de la société PIP, le responsable de cette escroquerie, a rapidement organisé son insolvabilité pour se soustraire à une probable indemnisation des 400 000 femmes porteuses de ses prothèses à travers le monde, dont 30 000 en France.

27 janvier 2012 – Jean-Claude Mas est mis en examen pour « blessures involontaires », puis à nouveau le 5 juillet suivant pour « abus de biens sociaux, blanchiment et blanchiment de fraude fiscale ».

9 février 2012 – Le parquet de Marseille ouvre une enquête à l’encontre de Jean-Claude Mas pour « banqueroute frauduleuse, abus de biens sociaux et organisation frauduleuse d'insolvabilité ».

14 juin 2012 – Le tribunal de commerce de Toulon déboute Allianz, la société assurant la société PIP en responsabilité civile de sa demande visant à annuler la validité du contrat souscrit par la société PIP. Quelques jours plus tard, l’assureur est condamné à indemniser une première victime porteuse de prothèses PIP.

29 octobre 2012 – Jean-Claude Mas, incarcéré à la prison des Baumettes depuis le mois de mars est remis en liberté dans l’attente du procès pour tromperie aggravée prévu au printemps de l’année suivante.

2013 – Le temps des condamnations

L’année 2013 voit la responsabilité des dirigeants de la société PIP et de l’organisme certificateur confirmée. Les condamnations tombent et les demandes d’indemnisation se multiplient. Le droit est du côté des victimes. Il leur faudra toutefois patienter encore de nombreux mois avant de pouvoir obtenir quoi que ce soit.

11 avril 2013 – La cour d'appel d'Aix-en-Provence juge recevables les plaintes de cinq femmes dont les prothèses enlevées ne présentaient pas de rupture. Cette décision ouvre la voie à l'indemnisation de plusieurs milliers de femmes qui ont choisi de retirer à titre préventif leurs prothèses mammaires.

Avril à mai 2013 – Le procès pour tromperie aggravée et escroquerie se tient au tribunal correctionnel de Marseille. A la barre des accusés : Jean-Claude Mas ainsi que quatre de ses collaborateurs.

14 novembre 2013 – L’organisme certificateur TÜV Rheinland, est condamné par le tribunal de commerce de Toulon à indemniser environ 1600 porteuses d’implants frauduleux, ainsi que des distributeurs de prothèses PIP à l’étranger.

10 décembre 2013 – Jean-Claude Mas et 4 autres prévenus inculpés dans cette affaire, anciens cadres ou dirigeants de la société PIP, sont condamnés à de la prison (4 ans pour Jean-Claude Mas). Le tribunal correctionnel de Marseille accorde par ailleurs aux plaignantes (plus de 4000) une somme d’environ 40 millions d’euros visant à couvrir les frais d’interventions (retrait de la prothèse mammaire défectueuse puis implantation d’une nouvelle) ainsi que le préjudice moral et d’anxiété.

2014 – Et maintenant ?

Les responsables de la société étant insolvables, les plaignantes devront se retourner, pour espérer être indemnisées, vers la Commission d’indemnisation des victimes d’infraction (Civi) ou vers le Service d’aide au recouvrement des victimes d’infraction (Sarvi). Ces fonds, garantis par la collectivité, prennent le relais lorsque l’auteur de l’infraction n’est pas en mesure de régler la note des dégâts qu’il a occasionnés.

A savoir : le montant des indemnisations versées par la Civi ou le Sarvi est dans bien des cas plafonné à quelques milliers d’euros. Elles risquent donc d’être inférieures aux indemnisations prononcées par le tribunal de Marseille, et à peine suffisantes pour couvrir les frais de l’intervention chirurgicale visant à remplacer la prothèse.

Sans compter que les victimes doivent encore attendre le résultat de la juridiction d’appel qu’a saisie Jean-Claude Mas immédiatement après le jugement en première instance. « On espère une indemnisation dans le courant 2014, si tout va bien », estime-t-on du côté de l’Association PPP.

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