Nutri-Score : au Sénat, les lobbies l’emportent sur la santé publique !

Le Sénat a tranché. Dans le cadre de l’examen du PLFSS 2026, la chambre haute a finalement voté, le 21 novembre dernier, contre l’obligation d’afficher le Nutri-Score sur les emballages des aliments — un revers majeur pour la santé publique, et un signal préoccupant envoyé aux citoyens. Un vote d’autant plus incompréhensible que les sénateurs avaient, quelques minutes plus tôt, adopté des amendements visant à exclure les produits AOP/IGP du dispositif, anticipant les inquiétudes régulièrement agitées autour du « camembert de terroir » soi-disant menacé.

L’écoute des débats a mis en lumière un décalage saisissant entre les arguments scientifiques et les prises de parole des opposants à l’obligation du Nutri-Score. D’un côté, des sénateurs rappelant calmement l’intérêt, l’efficacité et la solidité scientifique de cet outil de santé publique. De l’autre, un flot de discours gastro-populistes où chacun se faisait le défenseur du fromage de sa région, invoquant la tradition, le patrimoine ou une prétendue menace pour l’identité gastronomique française.

À ces arguments émotionnels s’est ajouté un discours classique porté de longue date par les lobbies agroalimentaires : la prétendue « pénalisation » des petits producteurs artisanaux. Un argument fallacieux, puisque ces artisans…sont déjà exemptés par la réglementation sur l’étiquetage nutritionnel. Les fromagers fermiers ou producteurs de charcuterie artisanale ne seraient, en réalité, absolument pas concernés par l’obligation du Nutri-Score.

Il est d’ailleurs utile de rappeler que de nombreux fromages AOP ou IGP, dont les sénateurs ont défendu la « tradition », ne sont pas produits par de petits producteurs. Les filières sont aujourd’hui largement structurées par des groupes agroalimentaires majeurs : Lactalis, Savencia, Sodiaal… À eux seuls, ces trois géants contrôlent plus de 80% de la production de Roquefort. Ces entreprises combattent depuis des années le Nutri-Score, perçu comme une menace pour leurs marges et l’image de leurs produits. Au Sénat, à nouveau, leur stratégie a porté ses fruits.

Certains sénateurs ont tenté de justifier leur vote en invoquant une prétendue incompatibilité avec la réglementation européenne. Une ligne de défense qui ne tient pas face à l’urgence sanitaire et l’intérêt public largement démontré scientifiquement du Nutri-score. Ce supposé « risque juridique » relève davantage du prétexte commode que d’un obstacle insurmontable.

Soyons clairs : ce sont Lactalis, Ferrero, Coca-Cola, Mars, Mondelez, Kraft, Danone et tous ceux qui refusent l’affichage nutritionnel simplifié qui se réjouissent aujourd’hui. Les sénateurs ont refusé de « forcer la main » à des industriels qui pourtant ont déjà démontré leur capacité à influencer les politiques publiques en matière de nutrition.

Mais rien n’est encore définitivement joué et la mobilisation citoyenne est cruciale pour la bataille à venir ! En effet l’Assemblée nationale a voté le 7 novembre, en première lecture, en faveur de l’obligation du Nutri-Score. Le texte va à présent revenir devant les députés. Les lobbies vont redoubler d’efforts, à nous de contrebalancer leur influence !

Une pétition officielle a été déposée sur le site de l’Assemblée nationale :

« Pour rendre obligatoire l’affichage du Nutri-Score sur les emballages des aliments en France »

Signer cette pétition, c’est envoyer un message simple : la santé publique doit primer sur les intérêts privés. L’avenir du Nutri-Score – et plus largement, du droit de savoir ce que nous mangeons – se joue maintenant.

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