Des rubans conter le cancer

Avec l’initiative Ma ville se Ligue, la Ligue contre le cancer distingue les communes qui s’investissent dans la prévention de la maladie. Parmi les première labellisées, Colmar, dans le Haut-Rhin, décroche d’emblée quatre rubans, qui symbolisent un niveau d’engagement maximum.

Vous connaissiez les fleurs apposées sur les panneaux d’entrée de ville, qui récompensent les cités les plus vertes, les arobases pour saluer les plus numériques, ou le label « Les plus beaux villages de France ». Place désormais aux rubans décernés par la Ligue contre le cancer dans le cadre de l’initiative Ma ville se Ligue, pour mettre en valeur les municipalités qui s’engagent dans la prévention de la maladie. Ce dispositif part d’un constat simple. « La santé dépend à 80 % de déterminants environnementaux et comportementaux, note Patrick Michaud, vice-président de la Ligue contre le cancer et coordonnateur du projet. Les collectivités sont en mesure d’agir sur ces déterminants à travers leurs politiques locales. Notre objectif est par conséquent de les inciter à s’engager aux côtés de nos comités départementaux pour mettre de la santé dans toutes les politiques. »

Agir sur les déterminants de la santé

En pratique, les villes signataires s’engagent sur plusieurs fronts : tabac, alimentation, activité physique, pollution, exposition solaire, etc. « Nous proposons un répertoire d’une trentaine d’actions types, du développement de mobilités douces à l’amélioration de la restauration collective, et demandons aux villes d’en choisir au moins trois, qu’elles devront mettre en place dans les deux années à venir », décrit Patrick Michaud. Parmi les mesures que les villes peuvent déployer, citons les actions d’urbanisme incluant par exemple le développement des zones ombragées, des espaces sans fumée, la rénovation des logements pour améliorer la qualité de l’air intérieur, l’adoption d’une réglementation locale visant à limiter l’exposition à des publicités pour l’alcool ou la malbouffe, ou encore les campagnes de dépistage « avec une démarche d’aller vers, en facilitant l’accès notamment à travers la mise à disposition de transports », détaille Patrick Michaud.

« Autant d’actions qui agissent sur les principaux déterminants du cancer : alcool, tabac, pollution, acticité physique… sans pour autant nécessiter des moyens conséquents. Quand une ville végétalise une cour d’école ou élargit un trottoir, elle fait de la santé sans le savoir », poursuit le vice-président de la Ligue contre le cancer. Un premier ruban est attribué dès l’entrée d’une commune dans le dispositif en guise d’encouragement, les suivants saluent le niveau d’engagement : deux rubans pour trois actions mises en place, trois rubans pour six actions, quatre rubans pour neuf actions. Précision importante : les politiques de santé ainsi récompensées peuvent avoir été lancées avant l’existence de Ma ville se Ligue, l’attribution des rubans étant alors rétroactive.

Colmar dans les premières villes engagées

Aux côtés de Paris, Nice et Saint-Etienne, Colmar est l’une des quatre premières collectivités labellisées en juillet dernier, et la seule de sa taille à décrocher directement quatre rubans. « Une ville qui vit est une ville en bonne santé, observe Nathalie Prunier, adjointe au maire en charge de la solidarité, des personnes âgées, du handicap et de la santé. Même si la santé n’est pas une compétence municipale, elle reste un enjeu majeur sur lequel nous pouvons agir. Aussi, il nous a paru évident nous nous inscrire dans la démarche proposée par la Ligue et d’œuvrer pour prévenir les 40 % de cancers évitables. En résumé, Ma ville se Ligue peut être considéré comme un levier d’action concret pour construire une ville plus saine en informant la population et en transformant l’environnement. » L’engagement de la ville alsacienne n’est pas nouveau, elle multiplie depuis plusieurs années les initiatives en matière de prévention, notamment avec la création d’espaces sans tabac autour des écoles, des parcs et aires de jeu.

Au-delà de la lutte contre le tabagisme, la ville a misé sur l’encouragement aux mobilités douces. Le Pass’Sport Santé s’adresse ainsi aux plus sédentaires et les encourage à reprendre une activité physique en offrant la première année d’adhésion à un club, et les aménagements urbains favorisant la marche et le vélo se multiplient (trottoirs élargis, réseau de pistes cyclables agrandi, aménagement de sentiers sportifs). Colmar accorde même des primes à ses agents municipaux s’ils viennent travailler à pied ou à vélo. Des zones d’ombre ont, en outre, été créées et des campagnes visant à sensibiliser sur l’alimentation ou les comportements à risque lancées. « La nourriture servie dans nos cantines est bio et totalement traçable, reprend l’élue. Autre exemple de notre engagement, nos 1400 agents municipaux ont pu se rendre, pendant leurs heures de travail, dans un mammobus afin de profiter d’un dépistage du cancer du sein. »

Transformer l’essai

En décrochant quatre rubans, Colmar adresse un signal fort : les villes moyennes – la cité alsacienne compte 70 000 habitants – peuvent être motrices dans la prévention des cancers. Un engagement que la Ligue aimerait voir repris partout sur le territoire. « Nous avons déjà signé quinze lettres d’engagement avec des communes désireuses de rejoindre notre dispositif », indique Patrick Michaud. Brest, Quimper, Albi, Grenoble ou Le Havre devraient prochainement rejoindre les quatre cités déjà labellisées. Et pas question de s’arrêter là, le projet consistant à enrôler un maximum de localités, ambitionne Patrick Michaud : « Dès que les nouvelles équipes seront mises en place après les prochaines élections municipales, l’ensemble de nos comités départementaux les contacteront pour présenter la Ligue et le programme Ma ville se Ligue ». La Ligue, par ailleurs partenaire de l’Association des Maires de France, présentera cette initiative à l’occasion du salon annuel des maires et des collectivités locales, qui se tient du 16 au 18 novembre prochain. De quoi susciter de nouvelles vocations, y compris de communes de petite taille. Reste que le répertoire des actions proposées par la Ligue n’est pas forcément adapté à ce type de villes. « Pour répondre à ce problème, nous allons décliner le label en Mon village se Ligue, développe le vice-président de la Ligue. Nous réfléchissons pour l’heure aux mesures que pourraient prendre les communes rurales. »

En Alsace, en tout cas, cet enthousiasme se retrouve dans l’agglomération colmarienne où plusieurs communes aimeraient s’inspirer de l’exemple de la préfecture du Haut-Rhin. « Certaines de nos actions peuvent être reproduites, y compris dans des villes de quelques milliers d’habitants seulement, assure Nathalie Prunier. Nous œuvrons avec elles pour les associer, notamment, aux conférences que nous proposons ou aux campagnes de dépistage itinérants des mammobus ou du programme M ta santé. » Parallèlement, Colmar planche sur les nouvelles mesures qu’il lui faudra mettre en place pour conserver ses quatre rubans. Pour cela, elle mettra l’accent au cours des prochains mois sur la lutte contre la pollution intérieure et la multiplication des points d’eau potables dans l’espace public. De quoi inscrire encore davantage la prévention dans les politiques locales et contribuer à renforcer la santé publique. « Notre dispositif va en réalité plus loin que la seule lutte contre le cancer, confirme Patrick Michaud. En luttant contre le cancer, on prévient aussi nombre d’autres pathologies chroniques. C’est donc un véritable projet de santé publique, mené à l’heure où la prévention reste malheureusement peu développée en France. »

Paris, Saint-Étienne et Nice, les autres villes labellisées

Comme Colmar, Paris et Saint-Etienne ont récolté quatre rubans dès leur entrée dans le dispositif Ma ville se Ligue. La capitale a été récompensée pour la création d’espaces sans tabac et de zones ombragées, l’aménagement de rues scolaires, la mise à disposition de points d’eau potable publics et la mise en place de zones à trafic limité.

A Saint-Etienne, le label salue la création d’aménagements promouvant l’activité physique dans l’espace public, l’accès à une alimentation équilibrée via des marchés solidaires ou bio, des jardins familiaux et des ateliers destinés aux étudiants.

Les trois rubans décernés à Nice distinguent l’engagement de la ville contre les perturbateurs endocriniens, la mise en place d’espaces non-fumeurs et le développement d’une offre saine en restauration collective.

Laisser un commentaire public

Votre commentaire sera visible par tous. Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

Logo Santé Info Droits

Partager sur

Copier le lien

Copier