Les exclusions santé méconnues des assurances voyage

A l’heure de partir en vacances, se pose souvent la question de prendre une assurance voyage optionnelle ou de régler son voyage avec une carte de paiement qui offre ce même type de garanties. Lorsque l’on est atteint d’une maladie chronique, on est évidemment davantage tenté par ces options. Pourtant il est important de bien lire son contrat car tous les problèmes de santé antérieurement diagnostiqués sont soumis à des exclusions. Êtes-vous concernés ? Quelles sont les alternatives ? On fait le point !

 Exclusions systématiques des assurances voyage pour les maladies, blessures, états de santé préexistants

Qu’il s’agisse d’une assurance voyage prise en option (même la plus chère) ou de garanties incluses dans le contrat de votre carte de paiement (et à condition d’avoir payé votre voyage avec ce moyen de paiement), ou dans vos contrats habitation, auto, etc., toutes les compagnies d’assurance prévoient des exclusions pour les problèmes de santé préexistants. Évidemment, cela s’applique uniquement pour les complications liées à ces états de santé. Un problème de santé nouveau ne relèverait pas de l’exclusion.

Voici quelques exemples de formulation d’exclusion de diverses compagnies pour des assurances voyage :

  • « Les conséquences médicalement prévisibles des maladies (et/ou d’accident) préexistantes diagnostiquées et/ou traitées, ayant fait l’objet dans les 6 mois précédant la demande d’assistance : d’une consultation, ou d’une hospitalisation continue, de jour ou ambulatoire. »
  • « Les suites séquelles, complications aggravations d’une maladie ou d’un accident corporel qui ont été constatées avant la réservation du voyage.»
  • « Les convalescences, les affections en cours de traitement et non encore consolidées et/ou nécessitant des soins ultérieurs programmés.»

POINT DE VIGILANCE : Un passage, même pour quelques heures, à l’hôpital pour la prise de médicaments particuliers, la pose d’une pompe à insuline, un programme d’éducation thérapeutique du patient, une reconnaissance en affection de longue durée, des arrêts de travail récurrents etc. peuvent, selon les termes de telle ou telle compagnie, tout à fait suffire à justifier une exclusion.

Florence Navattoni, coordinatrice adjointe de Santé Info Droits rapporte : « Nous avons régulièrement des appels de personnes malades qui cherchent des recommandations sur les assurances voyage. Malheureusement, à notre connaissance, toutes les assurances voyages excluent les maladies antérieurement constituées. C’est une discrimination légale qui existe depuis toujours. Beaucoup de gens malade contractent des assurances voyage sans savoir que s’ils ont un problème lié à leur pathologie sur place, ils n’auront droit à aucune prise en charge par l’assurance. »

Des témoignages éloquents

« Mes parents qui ont presque 70 ans ont chacun des problèmes de santé désormais. Suite à la réservation d’un voyage, ils ont pris une assurance voyage avec les options les plus chères, justement car leur santé est fragilisée. En relisant le contrat, nous avons réalisé que les garanties excluaient toutes les situations qui justement les inquiétaient le plus. », relate Geneviève, bénévole dans une association de patients.

En 2012, Elisabeth, alors âgée de 50 ans et qui souffraient de séquelles digestives après un cancer survenu plusieurs années auparavant a aussi appris à ses dépens le système des exclusions. Pensant être protégée par les garanties d’une carte de paiement premium avec laquelle elle avait réglé un voyage en Océanie, elle a été confrontée à une complication de santé sur place. Elle explique : « Ni l’assurance, ni la sécurité sociale ne m’ont remboursé. Cela m’a coûté 2000€ et cela aurait pu être bien pire car si mon état s’était aggravé, le médecin voulait m’envoyer en avion dans une plus grande ville pour me faire opérer. Aujourd’hui j’hésite à voyager en dehors de l’Europe. ».

 Engagement associatif & assurances

« Sur le sujet de l’assurance voyage, il n’y a pas eu de travaux de négociations entre assureurs, Etat et associations d’usagers tel qu’on l’a fait pour l’assurance emprunteur par exemple, où nous sommes parvenus à faire bouger les lignes, comme avec la loi Lemoine. », constate Florence Navattoni.

Catherine Simonin, patiente-ressource bénévole à la Ligue contre le cancer, déplore évidemment la discrimination que cela cause pour les voyages touristiques mais s’inquiète surtout du sort des personnes malades chroniques qui effectuent des déplacements professionnels. « C’est lamentable que les assureurs empochent les polices d’assurance sans prévenir vraiment des exclusions pour les maladies chroniques surtout quand on sait que 12 millions de patients en France souffrent d’une maladie chronique reconnue officiellement comme une affection de longue durée (ALD). Au vu du nombre de personnes que cela représente, on pourrait imaginer que les exclusions soient obligatoirement notifiées très clairement avant toute souscription d’une assurance voyage. », dénonce la bénévole.

Jeanne Prat-Diquélou, juriste pour le service Diabète et Droits de la Fédération française des diabétiques, rapporte qu’en 2024, 12% des demandes des usagers au service concernaient les assurances (toutes catégories confondues) et 2% étaient des questions relatives à des voyages et séjours à l’étranger. « Le sujet des assurances est récurent et les assureurs ne reculent devant rien pour faire valoir les exclusions. Récemment nous avons défendu un malade diabétique qui, suite à une blessure à son travail a été amputé. La compagnie refuse de le dédommager sous prétexte que l’amputation n’est pas due à l’accident mais à son diabète. Nous n’avons pas eu de cas de litige à traiter pour des assurances voyage mais on peut supposer que les compagnies chercheraient, également, dans ces cas-là, des moyens d’appliquer leurs exclusions. On peut ainsi imaginer que la prise en charge d’une blessure, lors d’un voyage, qui n’aurait pas de lien apparent avec le diabète, lui soit quand même imputé. L’assureur pourrait, en effet,  chercher, par exemple, à savoir si cela ne fait pas suite à une hypoglycémie. Dès lors, même avec les meilleures garanties, l’assurance pourrait refuser une prise en charge. », anticipe la juriste.

Remboursement des soins à l’étranger par la Sécurité sociale

Une prise en charge, sous certaines conditions, des soins reçus dans un autre État membre de l’UE/EEE, du Royaume-Uni ou en Suisse est possible grâce à une coordination européenne des systèmes de sécurité sociale. C’est le cas des soins inopinés pouvant survenir durant des vacances ou un séjour professionnel, et ce, même pour des soins en lien avec une maladie préexistante. Dans un tel cas, sur présentation de votre carte européenne d’assurance maladie (CEAM), vous pouvez bénéficier de la prise en charge de vos soins médicaux selon les règles et les formalités qui s’appliquent dans le pays où vous séjournez, dès lors que vous utilisez des prestataires du service public local. S’il s’agit de soins du secteur privé, vous pouvez demander le remboursement auprès de votre caisse à votre retour en France, et selon le tarif en vigueur en France. Votre complémentaire peut éventuellement palier le reste à charge. En revanche, si vous n’avez pas de CEAM, que vous l’avez oubliée ou qu’elle n’est plus valable, vous devrez faire l’avance de la totalité des frais – que vous soyez pris en charge dans le secteur privé ou public – puis demander le remboursement à votre retour en France en fournissant toutes les factures et justificatifs.

Tout est détaillé sur cette page du service-public.fr .

Dès lors que votre voyage se déroule hors d’un pays membre de l’UE/EEE, du Royaume-Uni ou de la Suisse et de quelques États avec qui la France a établi des accords (voir la liste sur cette page du site du CLEISS – Centre des liaisons européennes et internationales de sécurité sociale), vous pouvez demander, à votre retour en France, un remboursement auprès de votre caisse d’Assurance maladie qui peut, mais n’est pas obligée, prendre en charge tout ou partie de ces frais mais dans la limite des tarifs de la Sécurité sociale française. Selon l’état sanitaire et les tarifs pratiqués dans le pays de séjour, les restes à charge peuvent être très élevés.  Dans tous les cas, l’Assurance maladie ne prend pas en compte les frais de rapatriement.

Il s’avère donc judicieux de bien se préparer, de bien lire les garanties du contrat d’assurance envisagé et les explications du CLEISS, selon le pays où l’on part, lorsque l’on a une maladie chronique ou que l’on traverse un état de santé qui pourrait entrainer des complications.

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