Des chiens d’assistance pour les jeunes diabétiques de type 1

A l’heure où les technologies aident de plus en plus les patients à mieux vivre avec leurs maladies, en ce qui concerne le diabète et la reconnaissance des hypo et hyperglycémies, les chiens n’ont rien à envier aux capteurs de glycémie « dernier cri ». A condition d’être spécifiquement entraînés. En France, une association se charge d’éduquer des chiens d’assistance pour personnes diabétiques, ACADIA, créée en 2015, dans la Drôme. Efficacité et réconfort assurés pour les jeunes patients et leurs familles.

L’éducation d’un chien d’assistance

Imaginer un chien qui flaire l’état glycémique de son maître avant même que ce dernier ne commence à en ressentir les premiers symptômes, et qui le prévient afin d’éviter les éventuels troubles et malaises liés aux hypo et aux hyperglycémies. Cela peut paraître un peu magique. C’est pourtant une réalité ! Inspirée par l’existence d’écoles américaines qui éduquent des chiens en ce sens, une famille au sein de laquelle un jeune enfant est atteint de diabète a créé, dans la Drôme, en 2015, l’association ACADIA. « On ne sait pas exactement quels composants alertent les chiens mais nous savons que cela se joue au niveau d’un cocktail d’odeurs dans la transpiration de la personne diabétique », précise Thibault Durand, éducateur canin pour Acadia.

Durant plusieurs mois, chaque chien est entraîné à reconnaître ce cocktail d’odeurs grâce à des échantillons de transpiration prélevés au moment d’une hypoglycémie sur la personne qui bénéficiera de ce chien d’assistance. Ainsi dressé, ce chien détectera également les hyperglycémies qui semblent relever d’un cocktail d’odeurs assez similaire. Il est aussi éduqué à alerter son futur maître ou les parents de ce dernier, de la survenue d’une hypo ou d’une hyperglycémie, via un coup de museau ou l’activation d’un bouton d’alarme durant la nuit. « Lorsque le chien est prêt, l’éducateur chargé de son entraînement le remet à sa nouvelle famille au cours d’un séjour de dix jours au siège de l’association. Puis, nous assurons un suivi chaque année, ajoute Léa Durand-Mas, référente familles chez ACADIA. Le coût global pour l’éducation d’un chien d’assistance aux personnes diabétiques est de 25 000€, aujourd’hui financé par des donateurs privés. » Ces dons ont permis d’éduquer, depuis 2015, 45 chiens d’assistance pour personnes diabétiques.

ACADIA met un point d’honneur à sélectionner ses chiens en refuge, même si évidemment l’association drômoise a des critères de sélection exigeants, notamment concernant l’âge du chien, idéalement entre 1 et 3 ans au moment de commencer son entraînement. Par la suite, le caractère du chien et les habitudes de vie des familles demandeuses sont également pris en compte, pour éviter, par exemple, de confier un chien qui a besoin de beaucoup d’exercice à une famille plutôt casanière.

Des chiens plus performants que les capteurs de glycémie ?

L’intérêt de cette éducation canine reste pertinente, en dépit de l’arrivée, ces dernières années, des capteurs de glycémie en continu qui proposent des systèmes d’alarme en cas d’hypo ou d’hyperglycémies. En premier lieu parce que les chiens peuvent détecter les variations de glycémies environ 20 minutes avant le capteur. Cela permet parfois de se resucrer avant de ressentir les symptômes, potentiellement très invalidants d’une hypoglycémie, pouvant mener au malaise, voire au coma. Ce temps gagné évite à la personne diabétique de rester en hyperglycémie durant de longues heures – ce sont les hyperglycémies qui, sur le long terme, entraînent les éventuelles graves complications du diabète au niveau des reins, des yeux et des pieds.

Le second argument est que les capteurs ne conviennent pas à tous les patients. Certains sont allergiques à leur colle, d’autres n’ont pas envie d’être constamment « connectés » à des machines. Emma, 22 ans, qui a reçu sa chienne Perle il y a trois ans, raconte : « Avant Perle j’avais un capteur mais il se décollait tout le temps à cause de la transpiration car je suis très sportive. Or j’avais de très grosses crises d’hypoglycémie qui ont entrainé des comas et des convulsions à plusieurs reprises. C’est ma diabétologue qui m’a proposé un chien d’assistance. Depuis l’arrivée de Perle, je n’ai plus fait aucun coma et ma chienne est très précieuse quand je fais du sport. Elle m’accompagne en randonnée ou quand je monte à cheval ».

La moyenne des glycémies d’Emma est aujourd’hui très proche de celle d’une personne qui n’a pas de diabète. Mathis, 16 ans, a également beaucoup amélioré ses glycémies depuis l’arrivée de Rio dans sa vie. En diabétologie, les patients ont souvent des dosages de sucre dans le sang au-dessus et au-dessous desquels il faut éviter de passer. C’est ce que l’on appelle leur cible. Avant d’avoir Rio, Mathis passait en moyenne 60 % du temps dans sa cible. Aujourd’hui, il atteint 80 %. Par ailleurs, il a grandement augmenté son activité physique depuis qu’il promène chaque jour son chien. « Rio est toujours alerte. Il prend sa mission d’assistance très à cœur. Il me prévient jusqu’à 30 minutes avant que je ne tombe en hyper ou en hypo, de jour comme de nuit. Il arrive même à les détecter quand il est dans le jardin et moi à la maison ! »

Une source de joie pour toute la famille

Léa insiste sur le fait, qu’au-delà de l’aspect « médical », l’arrivée d’un chien adoucit considérablement la vie de l’enfant diabétique, mais aussi de sa famille : « Les enfants diabétiques sont assez souvent stigmatisés et mis à l’écart, que ce soit à l’école ou dans leurs loisirs. Le chien agit dans l’entourage de l’enfant comme un médiateur et permet de recréer du lien social ». Par ailleurs, Léa souligne que le diabète pour un enfant et sa famille représente beaucoup de stress, de charge mentale. Il n’est pas rare que les enfants aient des angoisses de mort la nuit, liées à la crainte de faire un coma diabétique. « L’arrivée d’un chien est vue comme celle d’un ange gardien, rassurant et apaisant pour toute la famille », constate la référente familles de l’association. Et tous les témoignages le confirment. La maman de Mathis reconnaît qu’elle s’est apaisée et a laissé plus d’autonomie à son fils depuis que Rio l’accompagne partout. Flora, la maman d’Héloïse, une enfant diabétique de 7 ans, se sent beaucoup moins nerveuse lorsqu’elle n’est pas dans la même pièce que sa fille depuis que Ragnar, leur chien d’assistance, veille sur elle. « Héloïse était heureuse de l’arrivée de Ragnar. Il représente un point positif dans tout ce processus autour de la maladie. Il fait tout pour rassurer Héloïse : il reste près d’elle et pose même sa tête sur ses genoux pendant ses soins, par exemple. »

Rio et Ragnar ne suivent pas Mathis et Héloïse à l’école, mais l’association propose aux enfants de le mettre en place à partir du lycée. Léa explique qu’avant ce stade, cela représente une trop grosse responsabilité pour l’enfant. Mathis aurait l’âge de le faire, mais il trouve que cela attire trop l’attention sur sa maladie alors qu’il cherche au contraire à la rendre discrète. Il y songe plutôt après le bac, quand il fera des études supérieures. De son côté, Emma, assistante vétérinaire, emmène Perle tous les jours au travail : « Elle est devenue la mascotte de la clinique vétérinaire où je travaille ! Elle m’a sauvée plusieurs fois la mise. Parfois, quand il y a des urgences, je cours partout et je ne pense pas assez à surveiller ma glycémie. Elle anticipe les choses pour moi. Je dois dire que Perle est la plus belle chose que la maladie m’aura apportée. Elle est mon double, mon ombre, elle me suit partout. », conclut la jeune femme qui n’imagine plus sa vie sans Perle.

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