Selon notre enquête exclusive sur les coûts cachés de la santé, les restes à charge invisibles (RACI) pour les personnes malades, en situation de handicap ou de perte d’autonomie représentent des montants alarmants : 1 557 € en moyenne par an et par personne. Des frais non sans conséquences. Pour n’en citer qu’une : le renoncement à des soins pour plus de la moitié des répondants. Des associations du réseau, grandes et un peu moins, proposent des aides financières ponctuelles qui permettent d’adoucir la note. Explications et tour d’horizon non-exhaustif.
Précisons d’emblée que ces aides, qui couvrent de nombreux domaines dont celui de la santé, sont facultatives. Elles ne peuvent en aucun cas se substituer aux dispositifs de droit commun (Sécurité Sociale, Mutuelle, MDPH…). L’examen des droits auxquels la personne peut prétendre par la législation en vigueur et les démarches visant à les faire valoir auprès de l’autorité compétente est un préalable à toute demande.
La Ligue Contre le Cancer, du fait de son champ d’action, est peut-être l’association la plus connue pour en avoir mise en place. Bien que la maladie soit prise en charge dans le cadre des affections de longue durée (ALD), patients et famille doivent faire face à des dépenses supplémentaires restées à leur charge (dépassement d’honoraires, prothèses, frais de transports, aides à domicile…). Quand elles deviennent trop pesantes, ils peuvent solliciter le comité départemental de la Ligue de leur lieu de résidence. Les motifs des demandes acceptées par la commission sociale représentent une aide financière liée directement à la maladie dans 19 % des cas, 57,3 % pour la vie quotidienne. Le montant moyen accordé par dossier est de 449 €.
« Un universalisme proportionné »
Du côté de Vaincre la Mucoviscidose, l’article 1er de ses statuts précise que « l’association se propose de servir de trait d’union entre les malades et de les aider, eux et leurs familles, à résoudre les divers problèmes matériels et moraux causés par cette maladie, ainsi que d’assurer la défense de leurs droits ». Ainsi, elle propose, au-delà d’informations et conseils spécialisés et d’un soutien moral, la possibilité d’un soutien financier, en fonction des situations rencontrées, notamment pour faciliter le parcours de soins. Il est destiné prioritairement aux patients et aux familles les plus vulnérables. « Nous avons en la matière une politique d’universalisme proportionnée. Elle repose sur trois critères principaux : la sévérité de la maladie, son impact sur le parcours de vie et le niveau de ressources financières du patient », explique Amandine Courtin, directrice du pôle qualité de vie de l’association qui instruit les demandes d’aides, au regard des justificatifs fournis. Leur attribution est du ressort de la commission d’aides financières qui se réunit toutes les deux semaines. « En 2023, nous avons accordé au total 851 aides pour 519 personnes, une seule personne pouvant en avoir plusieurs. Cela représente près de 653 000 € distribués », détaille Pauline Besse, l’une des assistantes sociales de l’équipe. Jean-Yves, 60 ans, qui vit à La Machine, dans la Nièvre, bénéficie de plusieurs aides. Atteint de la mucoviscidose, diagnostiquée quand il avait une dizaine d’années, il est greffé des deux poumons depuis 2011 et d’un rein depuis 2021. La maladie a bousculé sa vie, entre autres sur le plan professionnel. « J’ai une petite retraite calculée sur un mi-temps. Je dois faire attention à mon budget. Ces aides me permettent de ne pas me mettre en difficultés. Elles me sont très précieuses. Dans mon for intérieur, j’ai toujours peur d’en demander trop. Mais heureusement, on m’en propose très souvent », témoigne-t-il. Il en a notamment pour financer en grande partie sa mutuelle et suivre une psychothérapie. « J’en suis très reconnaissant ! Cela participe à ma sérénité », ajoute-t-il.
« Une explosion du reste à charge »
Des organisations plus modestes en termes de taille proposent, elles aussi, un soutien financier. C’est le cas de l’Association Française du Syndrome d’Angelman (AFSA) qui compte autour de 400 familles adhérentes. Il prend la forme de l’opération Coup de Pouce renouvelée chaque année depuis 2022. Une aide de 300 € maximum par an. Selon Elodie Lautissier, chargée de communication de l’AFSA, « elle a été créée à l’initiative des membres du bureau de l’association, tous parents d’enfants porteurs de la maladie. Ils constataient déjà à l’époque une explosion du reste à charge au sein de leur foyer ». Elle a pour objectif d’aider les familles adhérentes (sur l’année en cours et la précédente), sans conditions de ressources, à faire face aux dépenses liées au handicap de leur enfant. Il peut servir par exemple à financer l’achat ou la location d’un fauteuil roulant, du matériel éducatif et de communication ou encore des séjours adaptés. Une trentaine de Coups de pouce ont été donnés l’an passé.
« Double peine pour les personnes âgées les plus pauvres »
Ces aides financières ne sont pas que l’apanage d’associations exclusivement du domaine sanitaire. Les Petits Frères des Pauvres offrent également la possibilité d’un soutien matériel et pécuniaire aux plus précaires des personnes âgées isolées qu’ils accompagnent. « Les personnes vieillissantes ayant des problèmes de pauvreté ont un vieillissement prématuré, et donc elles peuvent avoir des difficultés de santé plus tôt que d’autres. C’est une double peine », constate Christophe Figeac, chef de projet sur les thématiques pauvreté et précarité dans la structure. Chaque équipe locale de bénévoles de l’association a un budget propre pour intervenir si besoin, au cas par cas, en fonction de la trésorerie de la personne, de son « reste pour vivre ». L’aide sert à régler un dépassement d’honoraires, pallier le déremboursement de plus en plus fréquent de médicaments, payer des compléments alimentaires non remboursés ou encore une avance de frais pour un scanner ou une IRM. Au niveau national, il existe aussi une réserve d’aide à la personne pour financer des dépenses encore plus importantes, comme du maintien à domicile, par exemple. En 2023, Les Petits Frères des Pauvres ont octroyé plus de 1,4 million d’euros d’aides diverses (matérielles ou financières) à des personnes en situation de détresse financière ou connaissant des difficultés momentanées, qu’elles accompagnent. « Concernant la santé, nos aides sont presque malheureusement incontournables de par la pauvreté de plus en plus grandissante des personnes âgées – le nombre de personnes de 60 ans et plus vivant sous le seuil de pauvreté est estimé à 2 millions les personnes, selon le dernier rapport de l’association sur le sujet. De par le fait aussi qu’il y a des soins ou des actes paramédicaux très efficaces pour elles mais qui sont de moins en moins pris en charge par les aides de droit commun », résume Christophe Figeac.
« Compenser les conséquences de la maladie »
Pour Amandine Courtin de Vaincre la Mucoviscidose, « verser des aides financières s’explique par notre volonté de compenser les conséquences de la maladie. Dans toutes les secteurs de la vie du patient dont celle de la santé. Très peu de malades de la mucoviscidose rentrent dans les critères de compensation de la loi handicap dont on vient de fêter les vingt ans », argumente-elle. « Souvent, nous sommes là aussi pour compenser les manquements ou les déficiences des administrations (CAF, MDPH…). Exemple, quand les délais de traitement des dossiers des patients sont exponentiels ou qu’il y a des coupes ou des erreurs de calcul de droits. Parfois, sans nous, il y aurait des situations dramatiques », complète Pauline Besse, assistante sociale du pôle qualité de vie.
Un fonds spécial à l’Assurance maladie
Si vous disposez de revenus modestes, l’Assurance maladie peut vous aider à faire face aux dépenses imprévues liées à une situation matérielle rendue difficile par votre état de santé (maladie, maternité, accident du travail, handicap, invalidité).
L’action sanitaire et sociale de l’Assurance Maladie peut vous permettre de bénéficier d’un soutien financier ponctuel, en complément de prestations habituellement versées (remboursement des soins, indemnités journalières…). Elle intervient notamment dans les domaines de l’accès à des soins médicalement justifiés (prothèses dentaires, appareils auditifs, frais d’optique ou liés à une hospitalisation…), la complémentaire santé ou encore le retour et maintien à domicile (participation aux frais à l’aide-ménagère en cas d’isolement familial ou géographique, par exemple, lors d’une sortie d’hospitalisation, interventions de gardes malades auprès d’un patient en fin de vie…). Pour en bénéficier, vous devez constituer un dossier de demande et l’adresser à votre caisse d’Assurance maladie. Votre situation sera examinée par une commission. Ces aides étant facultatives, les refus ne peuvent pas être contestés. Elles sont versées soit à vous-même, soit directement au tiers (professionnel de santé, organisme complémentaire, association d’aides à domicile…) pour vous éviter une avance de frais. Pour 2025, le fonds d’aide aux CPAM, voté fin 2024, s’élève à près de 130 millions d’euros, dont une bonne part va aux usagers – le reste allant aux associations.
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