Précautions à prendre avant de se faire tatouer

Vous avez décidé de franchir le pas et de rejoindre les 10% de Français tatoués ? Vous avez choisi le style, le dessin, l’artiste qui réalisera votre tatouage ?

Pour vous aider à vivre cette expérience avec sérénité, nous avons interrogé des experts sur les précautions à prendre avant de faire peau neuve !

Tatouages et règlementations

Le week-end dernier, s’est tenu à Paris le Mondial du Tatouage. Un événement qui attire de plus en plus de monde et qui témoigne d’un marché florissant. Dans les colonnes du Monde, on pouvait lire dimanche 9 mars les propos de Paul Ghoubaira, patron d’American Body Art, qui possède entre autres 6 salons de tatouage et piercing à Paris. Il y expliquait que, dans ce secteur « les faillites restent rares ». Un métier qui attire donc de plus en plus de passionnés, qui respectent majoritairement l’application des règles d’hygiène élémentaires.

Certes, d’un point de vue administratif, la profession de tatoueur n’est pas reconnue, c’est-à-dire qu’elle ne dispose pas d’un code NAF identifié dans la nomenclature des activités professionnelles françaises. Ainsi, juridiquement, un tatoueur peut avoir un statut de prestataires de services, d’artisans, de commerçants… et il n’existe aucun diplôme validant ses compétences. Cependant, si l’administration ne tranche pas sur ce sujet, face à l’essor de la profession, les services sanitaires ont pris des mesures, en 2008, par le biais d’un arrêté. Ce dernier oblige les tatoueurs à se déclarer auprès de leur préfecture ou de leur Agence Régionale de Santé (ARS) et à suivre une formation réglementée de 3 jours sur les bonnes pratiques d’hygiène et de salubrité.

Une formation bien adaptée au métier de tatoueur

D’après Olivier Laizé de la société de formation CorpsTech, les professionnels du tatouage n’ont évidemment pas attendu cet arrêté pour se poser les bonnes questions en matière sanitaire. Lui-même proposait, avant 2008, des séminaires destinés aux tatoueurs et il a d’ailleurs participé à la rédaction du texte de loi. Le SNAT (Syndicat National des Artistes Tatoueurs) avait également travaillé sur les pratiques d’hygiènes appliquées au métier avant l’arrêté de 2008. D’après Olivier Laize, les « anciens » n’ont évidemment pas bondi de joie à l’idée de devoir faire cette formation. « La plupart des tatoueurs confirmés n’ont pas besoin de bouleverser leur façon de tatouer après la formation car ils connaissent et appliquent déjà les bonnes pratiques, mais ils peuvent avoir besoin d’actualiser leurs connaissance, parfois de modifier leurs protocoles basés sur des habitudes dépassées ou de vieilles certitudes culturelles. Majoritairement ils sont très satisfaits à la fin des 3 jours, ne serait-ce que parce qu’ils se sentent rassurés lorsqu’ils se rendent compte qu’ils font déjà bien les choses« . Aujourd’hui Olivier forme très peu d’anciens, la plupart se sont mis en conformité avec la loi. Ses stagiaires sont désormais principalement des apprentis ou de futurs tatoueurs.

Concrètement, que risque un tatoueur qui ne ferait pas sa déclaration ou ne suivrait pas la formation ? D’après Olivier Laize, il y a des brebis égarées, soit parce qu’elles n’aiment pas l’idée d’être « fichées », soit par manque d’information ou par négligence administrative. « Les tatoueurs n’ont pas conscience qu’il s’agit en fait simplement de sécurité sanitaire, et en aucun cas de les surveiller« , constate Olivier.

Cette sécurité sanitaire ne concerne d’ailleurs pas uniquement les clients. C’est un aspect que les tatoueurs occultent souvent mais la contamination du client vers le tatoueur est également en jeu lorsque ce dernier se pique accidentellement. « Aujourd’hui la prévention est meilleure dans notre profession mais il y a eu des cas de tatoueurs contaminés par l’hépatite B ou C dans le cadre de leur travail. En outre, ils pensent alors rarement à le déclarer comme accident du travail. Lors de la formation, nous abordons également ces questions », précise Olivier Laize.

Contamination et traçabilité

Effectivement, en matière de tatouage, il y a une vérité universelle : la pratique implique une effraction cutanée, et donc un risque de contamination infectieuse.

Le tatoueur doit maîtriser un « chemin » d’asepsie rigoureux, qui va du lavage des mains, au port des gants, en passant par l’utilisation de matériel à usage unique, la stérilisation et la mise en place d’une traçabilité des instruments stérilisés. C’est peut-être l’un des points que les stagiaires connaissent le moins, mais lorsque l’on stérilise les instruments qui ne sont pas à usage unique, il faut les étiqueter et noter quels instruments ont servis à quels clients. En effet, en matière de sécurité sanitaire, il est important de pouvoir identifier la source d’une éventuelle contamination.

Tatouage et hépatites

C’est d’ailleurs un constat important pour Patrick Favrel, porte-parole de l’association SOS Hépatites. « Les malades qui souffrent d’hépatites n’ont de cesse de chercher l’origine de leur contamination, c’est donc essentiel dans le vécu du patient face à sa maladie ». Et malheureusement, il existe des cas de contamination à l’hépatite C dus à la pratique du tatouage. « L’hépatite B est moins concernée, on suppose que c’est parce que le virus C est plus résistant, il peut survivre plus d’une semaine à l’air libre », précise Patrick Favrel.

En France, il n’y a pas de chiffres précis sur les liens entre tatouages et contamination à l’hépatite. Le Canada en revanche a fait quelques études et a constaté que plus les personnes ont des tatouages, plus le risque de contamination est élevé. Les populations les plus exposées sont les jeunes et les personnes incarcérées. Plus précisément, en prison, 12 à 25% des détenus tatoués sont contaminés, contre 6% dans la population générale. Pour Patrick Favrel, ces chiffres révèlent que les vrais risques concernent les tatouages sauvages. On ne saurait trop vous conseiller de passer votre chemin si vous êtes tenté de vous faire tatouer en dehors d’un cadre qui respecte TOUTES les normes sanitaires en vigueur, car chacune a un sens et est importante, même si elle vous semble superflue.

Mais quelle est la position de SOS Hépatites sur les précautions à prendre lorsque l’on se sait atteint par l’hépatite C et que l’on décide de se faire tatouer ? Faut-il prévenir le tatoueur dans la mesure où le risque de contamination existe ? Les malades n’ont bien entendu aucune obligation de le faire, mais SOS Hépatites encourage les malades à « vivre avec » l’hépatite C, sans se cacher, en toute transparence, « à en parler quand ils le jugent utile », comme le dit Patrick Favrel. Certes certains tatoueurs se sentiront peut-être mal à l’aise, craindront de mal s’y prendre, et dans le doute pourraient refuser de pratiquer le tatouage. Mais l’ouverture au dialogue est sûrement le meilleur moyen de sensibiliser le monde du tatouage aux risques infectieux potentiels et aux moyens de les éviter.

Tatouages sauvages : la mode de la valise et les festivals

Toujours est-il que la plus grande urgence sanitaire reste de se mobiliser contre la pratique du tatouage sauvage, qui représente 8 à 10% du marché selon Olivier Laize. Pour la plupart, les salons de tatouage qui ont pignon sur rue, se sont déclarés et ont suivi la formation obligatoire. Ils font évidemment l’objet de contrôles de la part des Agences régionales de Santé (ARS), qui ont des pouvoirs de sanction si elles relèvent des infractions par rapport à la loi (amendes de 1500€, avertissements, voire poursuites pénales).

La plupart du temps, les tatoueurs « installés » sont soucieux de bien faire les choses. Le vrai problème est qu’il est simplissime d’acheter du matériel sur internet et de pratiquer à domicile. C’est ce qu’on appelle la mode « de la valise », du nom du matériel de base que les tatoueurs achètent, qui est conditionné dans une petite valise facilement transportable. « Il y a peu, le propriétaire d’un café m’a contacté pour savoir s’il pouvait accueillir un tatoueur le temps d’une soirée pour une démonstration. Il a été assez étonné quand je lui ai déconseillé de le faire, en lui précisant que la pratique du tatouage nécessitait un environnement adapté qui ne s’improvisait pas et que s’il y avait un problème de contamination, le propriétaire du café serait juridiquement responsable« , rapporte Olivier Laize. Il en va de même pour les stands de tatouage lors de festivals, comme il s’en tient chaque été lors des rassemblements musicaux : « Les organisateurs apprécient les animations autour du tatouage car c’est un plus pour les festivaliers, mais comme ils ignorent les règlementations, ils ne vérifient pas si tout est conforme. Bien souvent ce n’est pas le cas », ajoute Olivier.

Vous l’aurez compris, même si vous rencontrez le tatoueur (ou la tatoueuse !!) le plus sympa et le plus talentueux du monde, faites-vous tatouer dans un lieu spécifiquement dédié et équipé pour la pratique du tatouage. N’hésitez pas à dialoguer, à poser quelques questions d’hygiène, à faire état de vos éventuelles inquiétudes. La plupart des tatoueurs seront enclins à vous rassurer, à sortir leur certificat de formation, à vous montrer leur appareil de stérilisation, à vous expliquer ce qu’ils font et pourquoi ils le font.

 

Les gestes incontournables sur lesquels avoir l’œil

C’est évident qu’au moment de se faire tatouer, on appréhende, on a le trac, bref, on ne pense pas aux gestes sanitaires de base.

Voici pourtant une petite « check list » si vous avez besoin d’être rassuré :

• Le plan de travail doit être désinfecté

• Le tatoueur doit se laver les mains et les avant-bras

• Le tatoueur porte des gants à usage unique

• Le tatoueur désinfecte votre peau AVANT de la raser avec un rasoir à usage unique

• Les encres doivent être disposées dans des caps à usage unique. En aucun cas une aiguille ne doit être réintroduite dans un échantillon d’encre qui a déjà servi pour quelqu’un d’autre.

• Le matériel stérilisé doit être conditionné et étiqueté.

• Les instruments stérilisés et ceux à usage unique doivent être déballés devant vous.

 

Interview du Docteur Schartz, dermatologue

66 Millions d’Impatients : Grains de beauté et tatouages font-ils bon ménage ?

Docteur Schartz : Non. Il convient de contourner tous les grains de beauté de la zone à tatouer, sans aucune exception. Il n’y a aucune preuve médicale qu’un grain de beauté tatoué puisse évoluer en cancer, mais sans même parler de l’interaction avec l’encre, le simple fait de faire une piqûre sur un grain de beauté engendre une inflammation et modifie sa structure.
Un autre argument doit être exposé, c’est qu’un grain de beauté caché par un tatouage ne pourrait pas être correctement surveillé.

Y’a t-il également des problèmes avec les tâches de rousseur ?
Il n’y a aucun problème, les tâches de rousseur résultent simplement d’une accumulation de mélanine, qui se produit lors d’une exposition au soleil. C’est la raison pour laquelle on en a davantage en été. Le seul écueil est que certains grains de beauté ressemblent parfois beaucoup à des tâches de rousseur. Le tatoueur peut évidemment les confondre.

Le tatouage est-il contre-indiqué dans le cas de certaines maladies ?
Oui, lorsque l’on est atteint de psoriasis, lichen plan, lupus cutané, sarcoïdose ou vitiligo, il ne faut pas envisager de tatouages, même sur des endroits du corps où il n’y aurait pas de manifestations de la maladie.
En effet, ces pathologies se développent davantage sur les zones cutanées traumatisées, comme c’est le cas lors d’un tatouage. C’est pour cela notamment que le psoriasis apparaît dans les cheveux, sur les genoux ou les coudes, qui sont des parties du corps particulièrement soumises aux frottements.
Précisons qu’une zone tatouée est une zone de développement privilégiée dans le cadre de l’évolution de ces maladies mais le tatouage ne déclenche pas ces maladies. Il n’y a donc pas lieu de s’interdire de se faire tatouer par peur de contracter l’une de ces pathologies.

Peut-on tatouer sur une cicatrice et est-ce un bon moyen de la masquer ?
On peut tout à fait tatouer une cicatrice, si la phase de cicatrisation est absolument terminée, bien entendu. En dermatologie, on pratique d’ailleurs le tatouage couleur « peau » pour les atténuer. Le seul problème pour le tatoueur est que c’est plus compliqué de tatouer une cicatrice et que le rendu ne sera pas forcément aussi satisfaisant que sur une peau nette.

Est-ce une bonne précaution de consulter un dermatologue avant d’envisager un tatouage ?
Ce serait idéal. Cela me semble indispensable si on a beaucoup de grains de beauté et pour vérifier si l’on ne présente pas de signes de psoriasis.

Que faire si, suite à un tatouage, on déclenche une allergie ?
On essaye de calmer l’allergie à l’aide d’une crème à base de cortisone, par exemple.

Comment fonctionne le laser, pour le détatouage ?
Le faisceau lumineux produit par l’appareil « éclate » l’encre en particules suffisamment fines pour être éliminées par les macrophages (des cellules qui absorbent notamment nos débris cellulaires et agents pathogènes).

Avec les anciennes machines (Q-switched), il fallait environ 2 ans pour venir à bout d’un tatouage, à raison d’une séance tous les 2 mois. En outre, cela ne fonctionnait pas sur le blanc, ni le jaune, et difficilement sur le turquoise. Avec les machines de dernière génération (Picosure), le tatouage part en 1 an ou 1 an et demi, mais elles coûtent deux fois plus cher et n’effacent pas le rouge. Il faut donc travailler avec les deux machines pour les tatouages multi-couleurs.

Le détatouage est-il douloureux ?
D’après les patients, il est plus douloureux de se faire détatouer que de se faire tatouer…

Tatouage et péridurale

Une petite vidéo de Michel et Marina vaut aussi bien qu’un long discours…

Extrait de l’émission Allô Docteur sur France 5 – Pourquoi refuse t-on la péridurale aux femmes tatouées ?

 

Sources et en savoir + :

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