Loi de financement de la Sécurité Sociale (LFSS): ce qui va changer pour les usagers en 2023

Le Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale pour 2023 a connu un parcours chaotique : entre les différents 49.3 qui n’ont pas permis d’ouvrir les débats sur des questions fondamentales telles que la question des déserts médicaux ou les politiques publiques sur les médicaments, les motions de censure, le rejet par le Sénat puis la censure de plusieurs dispositions par le Conseil Constitutionnel, il laisse un goût d’inachevé dans sa version définitive.

Voici les principaux commentaires de France Assos Santé sur la version finale du PLFSS :

Sur le volet prévention

Les représentants d’usagers demandent à être associés à l’élaboration de la mise en œuvre :  nous considérons que ces consultations de prévention doivent pouvoir être délivrées par l’ensemble des professionnels de santé sur leur champ de compétence, et ne pas reposer uniquement sur les médecins. Par ailleurs, une attention particulière devra être portée auprès des populations les plus éloignées du système de santé, pour qui ces dispositions sont particulièrement bénéfiques. Des actions d’aller-vers, en partenariat avec l’ensemble des acteurs, y compris associatifs, devront être déployées.

Sur le volet accès aux soins

  • Une expérimentation de 3 ans permettant l’accès direct aux Infirmiers de Pratique Avancée, sans prescription médicale préalable, dans le cadre de structures d’exercice coordonné et pour des affections bénignes. Cette disposition devrait permettre de faciliter le recours aux soins, notamment dans des zones à fortes tensions médicales.

France Assos Santé avait émis plusieurs propositions pour aller plus loin, en permettant notamment aux malades chroniques de pouvoir désigner un autre professionnel de santé qu’un médecin, tel qu’un infirmier par exemple, comme coordonnateur du parcours de soin. L’organisation du système de santé actuelle ne permet plus de faire reposer ce parcours uniquement sur un médecin isolé, au regard du nombre important de personnes sans médecin traitant aujourd’hui. Il est désormais nécessaire de construire un parcours de soins centré sur le patient avec une équipe de soins traitante, coordonnée et pluridisciplinaire.

  • La suppression du ticket modérateur sur les transports sanitaires urgents

Si cette disposition va dans le bon sens, en supprimant le reste à charge sur les transports sanitaires urgents, nous regrettons qu’elle soit assortie d’une hausse du ticket modérateur concernant les transports programmés. Si la majorité de ces transports concernent des soins en lien avec une affection de longue durée, et donc exonérés du ticket modérateur, nous avons demandé à avoir des évaluations sur l’impact en termes de reste à charge pour les patients. Par ailleurs le Sénat avait adopté une de nos propositions visant à assouplir les conditions de prises en charge rigides des transports, en tenant compte de la situation individuelle du patient, mais celle-ci n’a pas été validée dans la version finalisée.

  • L’instauration de la Complémentaire Santé Solidaire à Mayotte.

Dans la lignée de l’harmonisation progressive des dispositions de Sécurité Sociale sur l’ensemble du territoire, l’instauration de la C2S à Mayotte était très attendue, notamment au regard du taux important de précarité dans le département, et du développement nécessaire de l’accès aux soins. La mise en œuvre concrète reste encore un point d’interrogation concernant les modalités qui seront retenues.

Sur le volet plus général de la Complémentaire Santé Solidaire, les associations font le constat de marges de progrès importantes et nous avons émis plusieurs propositions : amélioration de l’information et de la communication autour du dispositif ; facilitation de l’accès avec examens automatiques pour l’ensemble des bénéficiaires de minimas sociaux, notamment Allocation aux Adultes Handicapés ; hausse du plafond de ressources qui reste en dessous du seuil de pauvreté, mais également proposition de cotisations modulées en fonction des ressources et non plus de l’âge, pour instaurer un véritable contrat solidaire.

  • L’intégration des prothèses capillaires dans le cadre du 100% Santé

France Assos Santé et les associations réclament l’élargissement du panier de soins 100% Santé à l’ensemble des dispositifs médicaux entrainant des restes à charge élevés. La possibilité ouverte par la LFSS d’intégrer des prothèses capillaires à ce dispositif est une avancée, mais nous demandons expressément que les représentants des usagers concernés soient étroitement associés à l’ensemble des travaux, de la définition du panier de soins à l’évaluation du dispositif, au risque de passer à côté des besoins réels des patients. De même nous demandons que soient progressivement intégrés d’autres prestations et dispositifs médicaux, telle que l’implantologie lorsqu’elle s’avère nécessaire médicalement, ou encore les fauteuils roulants électriques, sources de reste à charge très élevés

Les dispositions cruellement absentes :

Nous regrettons fortement l’absence de mesures structurantes concernant la problématique des déserts médicaux, de plus en plus criante, aggravée par la montée en charge des dépassements d’honoraires :

  • Plus de 10% de la population n’a pas de médecin traitant,
  • La fracture sanitaire en termes d’accès aux spécialistes est alarmante, selon une étude de l’UFC-Que Choisir[i], 27.5% des enfants sont en situation de désert médical pour l’accès à un pédiatre, 23.6% des femmes pour l’accès à un gynécologue et 19% de la population pour l’accès à un ophtalmologue. Si l’on tient compte de l’offre de soins en secteur 1, sans dépassements d’honoraires, ces taux explosent passant du simple au double voire au triple pour certaines spécialités.
  • 69% des médecins spécialistes nouvellement installés en 2020 se sont installés en secteur 2 à tarifs libres.

France Assos Santé a soutenu et fait plusieurs propositions en matière de régulation de l’installation des médecins libéraux, de refonte du parcours de soins coordonné et de limitation des dépassements d’honoraires, qui n’ont pu être débattues lors de l’examen du texte.

L’inquiétante augmentation des pénuries de médicaments :

Nous regrettons l’abandon d’une mesure initialement proposée par l’exécutif mais supprimée en 1ère lecture qui proposait d’exiger des industriels, lors de la prise en charge d’un nouveau médicament, de garantir l’approvisionnement de leurs produits anciens. En effet, les revendications de prix élevés sur les nouveaux produits sont parfois accompagnées par des choix stratégiques de certains laboratoires pharmaceutiques de concentrer leur activité sur ces nouveaux médicaments à forte marge et donc d’abandonner l’exploitation d’autres produits matures moins rentables. Une large étude effectuée sur la période 2012-2018 confirme en effet que les médicaments anciens sont en effet les plus affectés par ces pénuries3. Les pénuries actuelles d’antibiotiques pour les enfants constituent un douloureux exemple.

Les prix des médicaments :

Les prétentions de prix demandés par les industriels atteignent aujourd’hui des sommets. Depuis plusieurs années, France Assos Santé propose une modification législative permettant de  prendre en  compte les investissements publics de la recherche dans la fixation du prix des médicaments. Cette proposition permettrait ainsi d’éviter aux contribuables de payer plusieurs fois (aide au développement de médicaments, paiement de prix faramineux) et de préserver l’équilibre de  notre système solidaire d’assurance maladie).  Nous regrettons, une nouvelle fois, l’absence de toute avancée significative sur ce point.

Le texte passe également sous silence toute la question de la protection des travailleurs malades, rien concernant les dispositions relatives aux indemnités journalières (IJ) maladie, l’invalidité, ou la prévoyance. Les associations alertent depuis des années sur la nécessité d’une refonte des prestations en espèce qui aujourd’hui ne protègent plus contre le risque de précarité, avec des règles totalement inadaptées et une vision en silo. Nous proposons une vision centrée sur le parcours du travailleur, avec des règles de prises en charge souples, facilitant le maintien en emploi : Période d’IJ Affection Longue Durée moins rigide, indemnisation des absences pour soins des malades chroniques, opposabilité du temps partiel thérapeutique aux employeurs, opposabilité du temps partiel pour les invalides lorsqu’il est souhaité, garanties socles obligatoires en matière de prévoyance, etc.

Retrouvez l’ensemble des propositions pour le Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale 2023 de France Assos Santé ici

La Loi de Financement de la Sécurité Sociale pour 2023

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