Payer plus pour être soigné ? Après les difficultés d’accès aux soins territorial, les facturations abusives des médecins : la double peine pour les usagers

Tous les voyants sont au rouge pour les usagers : difficultés à trouver un médecin traitant, plus de 12% de la population aujourd’hui n’en ont pas, et des délais de rendez-vous chez les spécialistes qui s’allongent…se soigner devient un chemin de croix…ou un luxe.

Depuis quelques temps, sur fond de mécontentement des médecins libéraux, insatisfaits de l’augmentation d’1,50€ de la consultation, des pratiques de facturations abusives se multiplient :

  • Contournement des Dépassements Exceptionnels sans motif avéré
  • Facturation de frais de dossiers, ou de matériel (qui rappelle fortement les facturations de forfaits administratifs illégaux facturés par certaines cliniques)
  • Facturation de la consultation généraliste par des médecins en secteur 1 à 30€ (totalement illégale)

Tout cela dans un contexte où déjà près de 70% des jeunes médecins spécialistes qui s’installent, le font en secteur 2, avec application de tarifs libres, et où les appels au déconventionnement commencent à se concrétiser, avec notamment l’annonce du déconventionnement d’un des plus gros cabinets médical de Cholet où 6 médecins généralistes poursuivront leur activité hors convention. A cela s’ajoutent diverses pratiques d’autres acteurs de santé : forfait de 1 à 8€ facturé par des pharmacies pour l’usage d’une cabine de téléconsultation ou encore l’abonnement Ramsay pour profiter de téléconsultations 24/24.

La déontologie médicale atteint donc ses limites et le message est clair : ceux qui pourront se faire soigner sont ceux qui en ont les moyens !

Les pratiques abusives et illégales sont justifiées par leurs auteurs par une trop faible rémunération de la consultation, notamment de médecine générale, qui passera de 25 à 26.50en octobre prochain.

Un schéma valant plus que des mots, voici la décomposition de la valeur réelle d’une consultation de médecine générale :

Ainsi on constate donc qu’une consultation de médecine générale est facturée en moyenne  26.50€, mais que le médecin est lui « rémunéré » 35.20€, car s’ajoutent les différents forfaits de rémunération existants (forfait médecin traitant, forfait structure et Rémunération sur Objectif de Santé Publique) payés par l’Assurance maladie, ainsi que les exonérations de cotisations sociales accordées. Cette valeur a augmenté de 15.8% en 10 ans, soit une évolution bien supérieure à celle des salaires sur le même laps de temps, qui se situe elle autour de 6.5%.

Malgré l’échec des négociations conventionnelles, les médecins libéraux ont bénéficié de nombreuses revalorisations dans le cadre du règlement arbitral entré en vigueur en mai 2023 : revalorisation de plusieurs forfaits existants et création de nouveaux forfaits mieux rémunérés ( consultation initiale en tant que médecin traitant pour les patients en affection de longue durée, pérennisation des dispositions valorisant la participation aux soins non programmés valorisation du forfait patientèle médecin traitant pour les ALD et les plus de 80 ans,…), avec une absence totale de contrepartie d’engagement des médecins pour l’accès aux soins.

Si l’étendard du libéralisme est brandi pour refuser toute contrainte que l’on voudrait imposer aux médecins libéraux, il a été opportunément mis de côté au moment de réclamer à l’Assurance maladie des aides pour compenser la perte financière liée à leur baisse d’activité pendant la crise Covid.

Aujourd’hui la nouvelle stratégie de certains médecins est donc de faire payer aux usagers leurs insatisfactions, quitte à s’asseoir sur la déontologie, et à ignorer que les premières victimes sont les patients qui ne trouvent plus de médecin sauf à y mettre le prix.

France Assos Santé condamne fermement toutes ces dérives et demande que des sanctions soient prises pour faire cesser ces pratiques.

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