Représentants des usagers en établissements de santé : un rôle majeur au service des patients

Dans la plupart des régions, les mandats des « RU » qui siègent en établissement de soins ont été renouvelés en cette fin d’année pour trois ans. Une mission exigeante pour la majorité des quelque 6 000 bénévoles engagés dans la représentation des usagers à travers la France.

A quoi ressemblent les bénévoles de 2025 ? Alors qu’une journée internationale leur est consacrée ce 5 décembre, le baromètre France Bénévolat réalisé par IFOP réalisé tous les trois ans et publié en mars dernier nous livrait quelques informations : 19 millions de Français déclarent donner de leur temps pour les autres ou pour une cause, quelle qu’elle soit, et la plupart d’entre eux, 12 millions (21% des plus de 15 ans), sont engagés au sein d’associations. Un chiffre relativement stable, mais qui reste inférieur au niveau affiché avant le Covid (24% des plus de 15 ans). Parmi eux, plus d’un million (2% des plus de 15 ans) déclarent œuvrer au sein d’associations de santé. « Dans les faits, ils sont sans doute plus nombreux à être engagés dans le sanitaire, commente Elisabeth Pascaud, administratrice et responsable du baromètre à France Bénévolat, car certains ne se déclarent pas comme tels mais oeuvrent dans le social, par exemple, et soccupent, de fait, de questions en lien avec la santé. »

Autre enseignement du baromètre : la part des bénévoles de plus de 65 ans est en net recul et celle des 50-64 ans fléchit, quand la tranche des 15-34 ans progresse significativement. « Les jeunes sont de plus en plus souvent encouragés durant leurs études à faire lexpérience de la vie associative, et tout lenjeu aujourd’hui est de leur donner envie de s’engager dans la durée. Quant au recul des plus de 65 ans, il sexplique sans doute en partie par des départs en retraite plus tardifs et la gestion de plus en plus fréquente de parents très âgés qui mobilise leur temps », précise Elisabeth Pascaud.

« La pandémie a marqué une rupture terrible, on a perdu à l’époque 40% de forces vives, confirme Christine Haulot, présidente de l’association VMEH, dont les quelque 3 600 bénévoles visitent toute l’année, partout en France, des patients et des personnes âgées à l’hôpital et en EHPAD. On note cette année une reprise (+ 6% chez nous en 2025), sans pour autant retrouver les effectifs d’avant la crise. » Au sein de sa structure, Christine Haulot dresse un constat assez proche de celui du baromètre : « Si les plus de 60 ans forment toujours l’essentiel des troupes, on a un peu moins de retraités et davantage de jeunes, mais ces derniers demandent plus de flexibilité sur les horaires, sont plus volatils et s’engagent moins durablement. On a donc pas mal de turn-over. Les plateformes telles que jeveuxaider, tousbenevoles ou France benevolat, qui sont très dynamiques, nous aident à les recruter ».

Porter la voix des usagers

C’est dans ce contexte d’un bénévolat en mutation qu’ont été renouvelés, ces derniers mois, les mandats des représentants d’usagers au sein des établissements de santé. Les périodes de candidatures étaient propres à chaque région mais la plupart des bénévoles volontaires ont pu déposer leur dossier jusqu’à fin septembre auprès de l’agence régionale de santé (ARS) de leur territoire, qui leur a ensuite confirmé leur nomination dans un voire plusieurs établissements donnés. Leur mission ? Siéger pendant trois ans (renouvelables), en tant que bénévole d’une association d’usagers de santé agréée, au sein des commissions des usagers (CDU) des hôpitaux, cliniques et autres centres médicaux publics ou privés de leur département, pour y porter la voix des patients et y défendre leurs droits et leurs intérêts, contribuant ainsi à améliorer leur accueil et leur prise en charge, en accord avec les directions administratives et médicales.

Ils sont quelques milliers de bénévoles à remplir spécifiquement ce rôle en France – la représentation en établissement de santé représente environ 80 % de l’ensemble des mandats. Les sortants ont-ils l’impression d’avoir été utiles ? « Oui ! », s’exclame Yvette Martin, présidente de la délégation France Assos santé de Nouvelle Aquitaine et représentante des usagers (RU) depuis six ans. Elle rempile d’ailleurs pour trois années supplémentaires : « Je trouve cette fonction très intéressante, témoigne-t-elle. J’en suis fière et j’ai renouvelé ma candidature afin de poursuivre les actions que j’ai initiées à l’hôpital de Guéret dans la Creuse. De fait, les progrès ne s’obtiennent pas en huit jours, il faut savoir être patient et s’inscrire dans la durée pour construire une action efficace ».

Un impact positif

« Globalement, les représentants des usagers pensent avoir un impact positif sur la vie des patients et de leur entourage », renchérit Nathan Boumendil, responsable de la représentation et du partenariat en santé à la Ligue contre le cancer, qui a réalisé un sondage, récemment, auprès des RU issus de ses rangs. « Les réponses varient cependant en fonction des établissements. Certains RU disent aussi se sentir peu reconnus et avoir du mal à se faire entendre », poursuit Nathan Boumendil qui constate également des freins à l’exercice. « Les RU encore actifs ont théoriquement droit à un congé de représentation, jusqu’à 9 jours par an pour siéger, mais les employeurs ne leur accordent pas toujours. Par ailleurs, les frais de déplacement ne leur sont pas toujours remboursés à la hauteur des dépenses engagées. »

Un autre frein couramment cité est l’investissement que la mission exige. Retraité, Patrick Blanc, 64 ans, termine un mandat de trois ans dans la Drôme, et n’a pas envie poursuivre, faute de temps et d’énergie. Fragilisé par de récents problèmes de santé et mobilisé par sa fille adolescente et des parents nonagénaires qui ont besoin de lui, il préfère jeter l’éponge, à regret. Un sentiment partagé par André le Tutour, 76 ans, qui vient de céder sa place, après avoir représenté les usagers de l’hôpital de Vannes pendant… dix-neuf ans ! « Il faut savoir passer la main et j’ai besoin de consacrer plus de temps à ma famille, explique-t-il. Pour être entendu et insuffler des dynamiques, siéger au moins une fois par trimestre en commission des usagers, participer à différents groupes de travail, se faire connaitre des patients, les accompagner au quotidien, et apprendre à connaitre le fonctionnement et les acronymes, nombreux, du monde hospitalier, il faut aimer ça, être présent et s’investir à fond. C’est forcément chronophage et difficile à concilier quand la santé décline, qu’on doit s’occuper de proches ou qu’on est encore dans la vie active. » D’après le sondage de la Ligue contre le cancer, la plupart des RU sont retraités : 79% ont plus de 66 ans.

Des mandats non pourvus

L’ampleur de la tâche ferait-elle renoncer d’éventuels candidats ? Dans la région Grand Est, Corinne Kremer, chargé de gestion à France Assos santé reconnait que le recrutement n’est pas simple. « C’est vrai que ça peut faire peur… un bon tiers des mandats de représentants en commissions des usagers ne sont pas pourvus dans la région, faute de bénévoles, regrette-t-elle. On a aussi des abandons, parfois, en cours de mandat. » Plus optimiste, Magalie Aveline, chargée de mission à France Assos Santé Auvergne Rhône Alpes, admet, elle aussi manquer de candidats, mais, assure-t-elle, « les choses s’améliorent, on a davantage de candidatures cette année et on va faire mieux qu’à la précédente mandature, en 2022 ! ». Le mérite en revient, d’après elle, aux efforts menés cette année par France Assos Santé pour convaincre les bénévoles à s’engager, efforts largement relayés par les associations membres au sein de leurs réseaux.

« Devenir représentant d’usagers, ça s’apprend et France Assos santé organise des formations pour ça, on est accompagnés pour réussir notre mission, et ça ne doit pas intimider, au contraire : la démocratie sanitaire, il faut la faire vivre ! renchérit Yvette Martin, qui sait manifestement communiquer son enthousiasme : au dernier forum des associations de son département de la Creuse, en septembre dernier, elle a parlé avec passion des mandats de représentants d’usagers… et elle a recruté quatre nouveaux bénévoles prêts à relever le défi !

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