Les honoraires de l’activité libérale en hausse chez les médecins de l’AP-HP

Un service public hospitalier fort, porté par des valeurs d’égalité d’accès aux soins et de  solidarité, c’est en substance ce qui avait été promis par l’ex Ministre des Affaires sociales et de la Santé, Marisol Touraine.

Et pourtant, le rapport de la commission centrale de l’activité libérale (CCAL) de l’AP-HP pour 2016 révèle que l’activité libérale et les honoraires des médecins l’exerçant sont en hausse de respectivement 4,5% pour les actes et 5,8% pour les honoraires au sein de ses établissements. 350 praticiens (soit 5 de moins qu’en 2015) se sont partagés 38,6 millions d’euros pour ce seul secteur privé de leur activité, soit 115 000 euros d’honoraires chacun en moyenne, mais avec de fortes disparités. Si 105 praticiens ont perçu moins de 50 000€, 7 atteignent le haut du panier avec plus de 450 000€. Concernant les contrats d’activité libérale, ce sont les chirurgiens qui arrivent largement en tête de peloton avec environ 50% de la totalité des contrats qui leur sont attribués.

Une hausse de l’activité libérale au sein d’un service public hospitalier, et des dépassements d’honoraires qui en découlent fatalement, paraît assez éloignée de la promesse qui avait été faite…

Un rapport qui montre que les faits contredisent les principes pourtant revendiqués

Et pourtant on y avait bien cru…pendant un moment ! Marisol Touraine, avait fait de la lutte contre les dépassements d’honoraires son cheval de bataille. Cela avait été traduit dans la Loi de modernisation du système de santé de 2016 qui avait abrogé la possibilité de dépassements d’honoraires au sein des établissements de santé ayant une mission de service public. L’écho de l’allocution de Madame Touraine en mars 2016, lors des Journées de l’Association des directeurs d’hôpitaux, résonne encore dans nos oreilles et dans nos cœurs : « Avec la loi de modernisation de notre système de santé, le service public hospitalier est désormais structuré autour d’un bloc d’obligations indissociables que sont l’absence de dépassements d’honoraires, la permanence de l’accueil et l’égalité d’accès aux soins« .

Les usagers de santé s’étaient félicités de l’affirmation de ce principe, mais c’était sans compter sur le gouvernement qui, par ordonnance en janvier 2017, a permis d’y déroger en autorisant la possibilité de dépassements d’honoraires pour l’activité libérale au sein des services hospitaliers publics, sous certaines conditions (PH à temps plein au sein de l’établissement notamment). Ce revirement incompréhensible pour les usagers l’est d’autant plus que cette dérogation n’est possible que pour les établissements publics et pas pour les établissements privés ayant une mission de service public, qui eux doivent respecter la stricte non application des dépassements d’honoraires…De l’art de marcher sur la tête !

Une infraction aux principes pour contenter une extrême minorité de praticiens

Ils ne sont pourtant qu’une poignée de médecins hospitaliers publics à pratiquer une activité libérale (moins de 5%) au sein de ces établissements, ce qui interroge d’autant plus sur ce retour en arrière, qui, en réintroduisant la possibilité des dépassements d’honoraires, maintient et accroit un système de médecine à deux vitesses au sein des hôpitaux et  nous éloigne un peu plus des valeurs que le service public hospitalier est censé porter, comme mis en lumière par le rapport de la CCAL de l’AP-HP.

Rapport 2016 de la commission centrale de l’activité libérale (CCAL) de l’AP-HP

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