Marathon et cœur : trouver son rythme

Comme chaque année, le premier dimanche du mois de novembre, a lieu le grand marathon de New York. Il comptait plus de 50 000 participants l’an dernier, et ce chiffre pourrait encore augmenter lors de l’édition 2014. En effet, le running et le marathon en particulier ont le vent en poupe !

En France également, les runners sont de plus en plus nombreux à s’entraîner pour s’aligner et courir les fameux 42,195 km. Entre 2012 et 2013, ils étaient 10% de plus à franchir les lignes d’arrivée des marathons de l’hexagone.

Attention cependant, le marathon est une épreuve difficile pour le cœur, qui mérite que l’on s’y prépare sérieusement !

Faisons le point avec le docteur Laurent Uzan, cardiologue du sport à l’Institut Cœur Effort Santé.

66 Millions d’Impatients : Courir un marathon, est-ce bon pour tout le monde ?
Dr Uzan : Si l’on est sportif et que l’on aime courir, s’entraîner et courir un marathon est un sport tout à fait accessible. En revanche, si l’on est dans une phase de reprise du sport, la course à pied n’est pas forcément la pratique la plus adaptée. En outre, il y a des cas, comme pour les personnes en fort surpoids, où il vaut mieux envisager des sports portés comme le vélo ou la natation, moins traumatiques pour les tendons et les articulations et évidemment moins difficiles pour le cœur.

Peut-on décider de s’entraîner et courir un marathon du jour au lendemain ?
C’est une épreuve difficile et qui veut y parvenir devra de toute façon s’entraîner plusieurs mois. En général, les coureurs qui s’entraînent sentent d’eux-mêmes que leur hygiène de vie doit s’adapter s’ils veulent atteindre leur objectif. Mais encore une fois, si l’on n’est pas spécialement sportif à la base, pratiquer la course à pied de manière intense n’est pas idéal. En tout cas, il faut envisager un bilan cardiaque complet avant de s’y mettre.

Les marathoniens « amateurs » sont-ils davantage exposés aux risques cardiaques ?
Le sport agit comme un révélateur des maladies cardiaques. Le marathon sollicite votre cœur autour d’une dépense énergétique et une consommation d’oxygène élevées qui le mettent à rude épreuve. D’ailleurs on retrouve dans les prises de sang de coureurs amateurs (ce n’est pas le cas avec les coureurs professionnels) des traces « d’enzymes cardiaques » après la course. Ces enzymes sont le reflet de petites destructions de cellules cardiaques, que l’on retrouve également après un infarctus. Heureusement, les quantités après un marathon sont bien moindres que dans le cas d’un infarctus. C’est un phénomène que l’on ne comprend pas bien et qui mérite sans doute de rester prudent. En outre, cette fameuse distance de 42,195 km est tout à fait arbitraire et ne s’inscrit en aucun cas dans une logique de bonne santé. Il faut éviter de considérer le marathon comme un Saint-Graal. Certains coureurs font parfois un véritable « burn out » à cause de l’accumulation des entraînements (souvent intenses, notamment les fractionnés), des contraintes de la vie professionnelle (transport, fatigue, faible période accordée pour la récupération) et de leur vie privée.Pourquoi ne pas préférer le semi-marathon ou tout simplement pratiquer avec plaisir un sport bon pour sa santé, avec des objectifs adaptés selon chaque individu ? Un entraînement bien fait est celui qui permet la performance tout en préservant la santé (physique et mentale).

On peut courir un marathon à n’importe quel âge ?
Si l’on est en bonne forme physique, que l’on pratique déjà du sport régulièrement, cela ne pose pas de problème. Il faut cependant savoir que c’est au-delà de 35/40 ans qu’apparaissent les premiers problèmes au niveau des artères du cœur qui peuvent entraîner des angines de poitrine et des infarctus. À partir de 35 ans (45 ans pour les femmes), si l’on décide de reprendre une activité sportive intense, il est donc nécessaire de faire un bilan médical. Dans tous les cas, lors de l’inscription à un marathon, un certificat d’aptitude est demandé.

En quoi consiste le bilan médical idéal pour la course à pied ?
Il faut au moins aller voir son généraliste, au mieux réaliser un bilan cardiaque avec un test d’effort. Le test permet de détecter d’éventuelles anomalies cardiaques et permet également de définir les fréquences cardiaques idéales sur lesquelles courir.

Quel est l’intérêt d’un bilan cardiaque avec test d’effort ?
Sachez déjà qu’en France, il y a, chaque année, environ 1500 morts subites liées à la pratique du sport. Dans tous les cas, il s’agit de malades cardiaques qui s’ignoraient, or malheureusement, le premier symptôme d’une maladie cardiaque peut être la mort subite. Il y a pourtant des moyens de détecter les anomalies cardiaques. Un électrocardiogramme réalisé sans effort permet de mettre à jour 60% des maladies cardiaques à risque de mort subite, et si l’on pratique un test d’effort avec une échographie, ce taux monte à 80/90%. Lorsque l’on pratique des sports qui sollicitent beaucoup le cœur, cela vaut vraiment la peine de réaliser un bilan poussé. Bien entendu, en cas d’antécédents familiaux de mort subite, ce bilan est indispensable.

Hormis les antécédents cardiaques familiaux, dans quels autres cas doit-on consulter ?
Lorsque l’on ressent des douleurs dans la poitrine, des palpitations, des essoufflements anormaux, des problèmes de récupération après un effort et également lorsque l’on observe une baisse inexpliquée de ses performances. Je vous invite d’ailleurs à vous reporter aux 10 règles d’or à suivre pour concilier cœur et sport sur le site du Club des cardiologues du sport.

Fumer et courir le marathon sont-ils incompatibles ?
En tout cas, les deux ne font pas bon ménage. En tant que cardiologue, je ne peux que conseiller l’arrêt définitif du tabac mais pour limiter les dégâts, il est vraiment important de ne pas fumer dans les deux heures qui précèdent ou suivent une séance de sport, quel que soit le sport pratiqué, car la cigarette génère des spasmes au niveau des artères qui augmentent les risques d’accidents cardiaques. Pour cette même raison, il faut éviter les douches très chaudes ou très froides juste après l’effort !

La course est-elle un bon sport pour les enfants ?
Entre 6 et 13 ans, il vaut mieux choisir des sports fractionnés comme le football ou le tennis. D’ailleurs à ces âges, les muscles ne sont pas assez développés pour pratiquer la course à pied. Après 13/14 ans, c’est tout à fait envisageable mais il ne faut pas pour autant les obliger absolument à aller courir avec vous 10 km tous les dimanches, au risque de les dégoûter !

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