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Essais cliniques : une proposition de loi réintroduit un risque de lien d’intérêt

Les Comités de Protection des Personnes (CPP) sont chargés d’émettre un avis préalable sur les conditions de validité de toute recherche impliquant la personne humaine. Les CPP se prononcent sur les conditions dans lesquelles le promoteur de la recherche assure la protection des personnes et notamment des participants, sur le bien-fondé et la pertinence du projet de recherche et sur sa qualité méthodologique. L’avis favorable d’un CPP est indispensable, en plus de l’autorisation de l’Agence nationale du médicament et des produits de santé (ANSM), pour pouvoir commencer une recherche.

Début 2016, un patient est décédé des suites d’une lésion cérébrale lors d’une étude menée par le centre Biotrial à Rennes. Ce drame a mis en exergue des liens d’intérêt et de proximité majeurs ou possibles entre promoteurs des essais de recherche et CPP.

L’événement a été pris au sérieux par le gouvernement qui a publié par la suite le décret d’application de la loi Jardé, votée en 2012 et modifié la loi  pour restreindre les candidatures des membres de CPP (article R 1123-5 : nul ne peut être membre d’un comité de protection des personnes, à titre de titulaire ou de suppléant s’il exerce des fonctions exécutives au sein d’un établissement promoteur de recherches). Depuis, les CPP sont tirés au sort au niveau national, apportant ainsi une certaine garantie d’indépendance en limitant les liens de proximité et les conflits d’intérêts potentiels.

Un certain nombre d’industriels ont rapidement fait connaître leur désapprobation craignant un frein à la mise en œuvre des projets de recherche et une « dégradation de la compétitivité ». Ces nouvelles modalités de protection des personnes sont de nouveau sous le feu des critiques des industries du médicament.

Une proposition de loi visant à spécialiser les CPP et indirectement limiter l’objet même du tirage au sort sera présentée le 17 mai prochain à l’Assemblée nationale par le groupe Modem. Nous sommes particulièrement surpris de cette proposition alors qu’une nouvelle réglementation européenne va être mise en place en 2019, encadrant notamment les délais d’instructions des dossiers de recherche sur le médicament. Nous craignons que cette proposition soit à ce jour principalement motivée par des intérêts industriels au détriment de la protection des personnes.

Nous appelons donc les parlementaires à voter contre cette proposition qui, en l’état, n’apporte pas les garanties suffisantes pour assurer les meilleures conditions de compétences ET d’indépendance aux CPP pour avaliser ou non les protocoles de recherche impliquant les personnes humaines.

Plutôt que de voter trop vite un texte aujourd’hui porteur de risques, il est essentiel de réviser cette proposition de loi de façon à ce qu’elle crée réellement les conditions permettant À LA FOIS :

  • de maintenir un tirage au sort effectif et efficace,
  • d’organiser la mise à disposition des CPP des compétences nécessaires afin que le plus grand nombre de ces Comités soit en mesure de se prononcer sur tout protocole de recherche qu’elle qu’en soit la spécialité médicale,
  • de garantir que les avis soient rendus dans les délais prochainement impartis par le nouveau règlement européen, qui entrera en vigueur mi 2019 et prévoyant que le dépassement des délais vaut accord tacite… soit un gros risque de voir des protocoles non satisfaisants être validés de fait parce qu’examinés hors délais !

Il sera ainsi également possible de se donner en parallèle les moyens pour que la prise en compte de ces conditions, essentielles au respect de l’éthique dans la recherche pharmaceutique impliquant la personne humaine, fasse l’objet de financements adaptés, afin d’améliorer le dispositif en dotant les CPP de moyens à la hauteur de leurs missions.

Contact presse :

Responsable communication – 06 18 13 66 95
communication@france-assos-sante.org

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